Le rivage des Syrtes, de Julien Gracq
Comme beaucoup de bons élèves littéraires, je suis passé par une hypokhâgne. Comme un certains nombre d’entre eux, j’en suis sorti peu glorieusement au bout d’un an. Je ne regrette rien, ce n’était pas fait pour moi. Toutefois, un jour, nous avons eu un devoir sur table en français, qui devait être une explication de texte, et l’extrait était tiré du Rivage des Syrtes de Julien Gracq. Comme souvent durant cette année, je découvrais plein d’auteurs que j’aurais dû connaître avant de venir. Mais cette fois, je voyais bien que mes compagnons n’en avaient jamais entendu parler non plus. Le texte était brillant. Et j’ai voulu en lire plus. Il n’était pas au CDI. Puis, le temps passa, et à la fac, j’ai pu enfin mettre la main dessus.
Quelle langue. Quelle prose. Quelle beauté ! C’était beau, c’était d’une telle perfection stylistique que mon cerveau jouissait tout seul au contact de ces phrases. Et pourtant l’action est modeste. Mais justement, il ne se passe rien et on laisse planer le doute sur une possible action, sur l’ombre d’une guerre, dont on a aucune preuve, aucune trace, rien.
Tout est amené avec subtilité. Les espaces sont mythiques, insaisissables. Ni le temps ni l’espace ne sont déterminés. Et l’on flotte dans cet univers savoureux et inquiétant.
Ce livre a eu le Goncourt en 1951. Julien Gracq l’a refusé. Il est entré dans le panthéon de la littérature française.
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