Vie d'un simple
Je bénis le hasard qui, dans sa clairvoyance,
A mon désœuvrement, offrit ce livre-là...
La couverture était ridée, comme en souffrance
Et les feuillets jaunis, détachés par endroits.
Son récit démodé, comme enduit de passé,
Sait faire vivre en moi, quand mon esprit s'y perd,
La malheureuse histoire, aride et peu contée,
De pauvres métayers, nos arrières-grands-pères.
Leur vie emprisonnée dans les haies du domaine
S'écoulait monotone au labeur gris des champs ;
De l'aube au crépuscule, et toute la semaine,
Ils trimaient. C'était dur, ordinaire pourtant.
Ils n'avaient pas le temps de songer politique,
Diluaient leur désarroi avec du mauvais vin,
Les orages d'été, comme les lois iniques
Les mettaient en péril, en les privant de pain.
Ils s'étaient endurcis, si bien que la mort même,
Lorsqu'elle avait frappé en arrêtant l'horloge,
Ne leur arrachait rien qu'un hochement de tête
Puisque à la loi de Dieu, c'est sûr, nul ne déroge
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