Dispute
Peut-être ai-je parlé trop fort à ton oreille,
Ou bien les mots qu'il faut m'auront soudain manqué...
Puisque pour exprimer réalité pareille
Les termes quotidiens sont toujours sans effet.
J'aurais pu emprunter aux pages de mes livres
Quelque vocable rare tout laqué de vernis...
Il aurait sonné faux, et que Dieu me délivre
Des discours compassés que sincérité nie.
Il est des mots légers qui s'envolent d'abord
Sans qu'on ait pu sentir leurs diaphanes pensées ;
Il en est de trop lourds tout cousus de remords,
Dont l'haleine cruelle empêche d'avancer.
Si j'avais réfléchi, impassible miroir,
Sans doute aurais-je tu mon mécontentement,
Etouffant ma colère au gros coussin tout noir
D'un silence de plomb aux muets grondements.
Un flot de mots boueux aurait brisé un jour
La digue de mes lèvres, close par volonté,
Peut-être aurait cassé alors, et pour toujours
Jusqu'aux fondations de la complicité.
J'ai donc laissé couler, il faut que tu comprennes,
Les mots qui me venaient spontanément, sans haine,
Je t'attendais toujours, un peu avant midi...
Je ne l'ai su qu'hier : tu m'attendais aussi
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