Le rapprochement 3/3
Dès que Sarah sortit de la chambre, Fiona vint aussitôt se joindre à elle. Croyant, sans doute, la soutenir d’une terrible épreuve elle se réfugia dans ses bras et au lieu de la réconforter, elle se mit à sangloter. C’était plutôt la maitresse qui rassurait sa dame de compagnie en lui essuyant ses larmes. Seulement, plus elle lui accordait de l’importance, plus Fiona dramatisait et pleurait davantage. Sarah finit par perdre patience et protesta : « Cessez de pleurnicher ! Vos larmes de crocodile n’ont plus aucun effet ! » Puis, d’une main amicale, elle la tira vers elle et descendit toutes deux les escaliers. Andrew qui était assis à la dernière marche se leva sans rien dire pour les laisser passer. Quant au reste du personnel, ils attendaient en chuchotant devant l’entrée.
Je me précipitai en courant vers le bureau pour récupérer le document et je le signai à mon tour. Au moment où Sarah voulut monter dans la voiture, je le lui tendis entre les mains. Elle fit un hochement de tête en guise de remerciement.
« Je compte sur vous monsieur pour faire taire les mauvaises langues ! finit-elle par rajouter, en même moment qu’elle s’installait prêt de Fiona. Il est inutile de vous rappeler que ce qui s’est passé aujourd’hui ne doit pas sortir des murs de votre maison.
— Vous avez ma parole, mademoiselle. Mon personnel sait faire preuve de discrétion.
— Quelle idée d’avoir eu de changer votre chemise, reprit-elle cette fois-ci d’un regard réprobateur, espérant qu’ils n’ont rien remarquer ! »
Mais avant même que je puisse y répondre, elle avait déjà fait signe au cocher pour démarrer.
Je restai pendant un moment à observer la calèche s’éloigner, en me demandant comment j’avais pu me comporter ainsi.
« Elle ne vous a jamais trompé, Kerwan ! m’interrompit soudainement Andrew dans mes pensées. Votre servante a mal interprété les choses… elle a vu ce dont elle voulait croire. J’avais essayé d’embrasser Elizabeth, mais elle m’avait aussitôt rejeté.
— Gardez vos distances, Andrew, ce n’est pas Elizabeth ! »
Il me regarda d’un air désorienté, comme s’il venait tout juste de comprendre ce que je tentais de lui expliquer depuis des jours.
« Ne voulez-vous pas plutôt connaitre les raisons qui m’ont poussé à agir ainsi ? interrogea-t-il avec assurance.
— Non, ce ne sont pas mes affaires ! Mais le problème même si ça ne me concerne pas, je n’ai plus confiance en vous.
— Ah, la confiance ! Et moi qui me demandais si vous aviez déjà oublié sa signification. Vous avez séduit sa défunte sœur, Émilie, alors que vous saviez qu’elle s’était engagée avec moi. Puis, dès qu’Élisabeth a commencé à montrer de l’intérêt à mon égard, vous avez délaissé l’ainée pour être avec la cadette… Vous êtes mal placé pour invoquer la confiance !
— Ne me faites pas porter le chapeau ! Vous deviez régler vos comptes avec votre ami. Non pas avec moi. Vous savez très bien que je ne suis pas Kerwan ! Si vous avez autant de reproches à lui faire, vous auriez dû lui en parler, au lieu de ça, vous vous vengez de la sorte. »
Comme il ne disait rien, je continuais : « Je ne comprends toujours pas comment vous avez pu garder pour ami une personne dont vous n’avez pas confiance !
— Mon amitié pour vous et plus forte qu’une simple histoire de femme ! »
À sa dernière affirmation, il prit son chapeau et s’en alla.
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