Suite1
Cet énoncé lui faisait penser spontanément à une chèvre, une petite, énervée comme le sont les jeunes. La biquette se trouve dans un pré, balayé par le vent. Insouciante, heureuse de vivre, avec toute la nourriture dont elle peut rêver, et bien protégée par ses parents. Elle s'amuse à rattraper les brins d'herbe, rendus récalcitrants par le vent, qui se soustraient à la prise de sa gueule. Le ventre creusé par toute son agitation, elle veut tous les engouffrer.
Cela paraissait si évident. Il ne lui avait pas fallu dix minutes pour trouver cette explication. Etait il possible que le second test fut aussi facile ? Cela lui semblait peu probable. A moins que sa mémoire soit d'une efficacité exceptionnelle, si grande que même le conteur n'avait pas prévu une telle puissance ? Achille chassa immédiatement cette pensée prétentieuse. Tout ce qu'il connaissait de lui même et du conteur lui indiquait que ce dernier lui était nettement supérieur. Donc le jeune homme ne pouvait avoir une mémoire si efficace que le conteur ne puisse l'avoir prévu. Par conséquent, le plus probable était la fausseté de l'interprétation de la jeune chèvre.
Achille relut le quatrain : pourtant il parlait bel et bien d'herbe, et encore d'herbe. Et qui se trouve dans son élément dans un pré ? A priori un animal, un herbivore même. A moins que : un être humain peut également se sentir à son aise dans une prairie. Surtout un enfant, un "petit énervé". Voire un bébé, tout excité, un citadin, voyant pour la première fois des brins d'herbe. Et comme tous les bébés, essayant de s'emparer de ces objets qui bougent, désirant tous les attraper. En quelques minutes, lors d'une seconde lecture du quatrain, Achille venait de trouver une nouvelle interprétation, alors que la première lui avait paru si évidente.
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