Chapitre 12
Le lendemain se passa sans problème. Aucun signe d’Affamés - je supposas que les rares Affamés encore vivants devaient être morts - ni de Mesint, ou de l’équipe de Tilaal.
Le soir, alors que je distribuai les rations, un rayon de lumière nous éclaira soudain. Nous levâmes instinctivement les yeux vers le ciel, et nous vîmes une soucoupe des Autres qui nous survolait, balayant le désert d’un grand faisceau de lumière.
- On s’en va !
Ce fut ce que je lâchai devant cette menace imminente. Je rangeai les rations et en moins d’une minute, nous étions repartis.
- On va où, comme ça ? demanda Corentin.
- On ne peut pas marcher devant nous jusqu’à ce que la providence nous offre une issue ! renchérit Cléa. Il nous faut un plan, sinon, il nous trouvera.
Le faisceau de lumière passa alors sur nous, révélant notre présence à l’occupant de la soucoupe. Je criai :
- On court !
Nous déguerpîmes vers la dune la plus proche. Je m’écriai :
- C’est bon, j’ai un plan ! On monte au sommet de la colline, et une fois de l’autre côté, vous plongez chacun d’un côté ! Ne vous retournez surtout pas, c’est compris ?
Je vis Corentin et Cléa acquiescer, l’air totalement effrayé et désemparé. En jetant un coup d’œil derrière moi, j’entrevis un visage à travers le rebord de la soucoupe. Le visage de Mesint qui nous regardait, l’air victorieux.
- Nos chances de survie viennent d’augmenter ! annonçai-je. C’est Mesint qui conduit ! Comme il est tout seul, il ne peut pas et conduire et tirer ! Il va devoir choisir.
- Effectivement, nos chances de survie viennent de passer de 1% à 5%, haleta Corentin, déjà à bout de souffle.
Nous commençâmes à gravir la dune, le plus rapidement que nous pûmes. Le faisceau lumineux nous suivait toujours, lorsque retentit une énorme explosion.
- Visiblement, Mesint a choisi de tirer, pensai-je.
Il y eut une deuxième explosion, plus proche de nous, alors que nous arrivions au sommet de la dune. Corentin et Cléa ne s’arrêtèrent pas, comme je leur avais dit, et continuèrent leur course folle. Je criai :
- Partez chacun d’un côté !
Puis je me tournai vers la soucoupe. Mesint, ayant compris notre plan, du moins partiellement, avait changé de poste et monta dans le ciel pour finalement se jeter sur moi. Ma main glissa vers la sacoche, et je sortis l’as de Carreau.
Je brandis la carte haut vers le ciel, vers l’immense silhouette de la soucoupe qui fonçait vers nous. Un faisceau lumineux jaillit de la carte, plus fort que celui de la soucoupe.
Je criai pour libérer ma colère accumulée depuis plusieurs jours. Mesint continuait sa course vers nous, mais je voyais bien que mon plan se réalisait.
Lorsque mon rayon s’atteignit, je plongeai en avant, mon front frôlant la soucoupe qui arrivait sur moi, m’arrachant quelques cheveux et un cri de douleur. Mesint, encore aveuglé, ne put s’arrêter et la soucoupe dévala la dune.
Je tombai tête la première, me cognant contre les rochers qui ressortaient du sable. Je finis par terre, les bras en croix, le souffle court, tremblant de tous mes membres. Lorsque j’essayai de me relever, je m’écroulai aussitôt.
Je restai dans cette position jusqu’à ce que Corentin et Cléa viennent s’accroupir près de moi :
- Qu’est-ce qu’il y a ?
- J’ai failli me faire trancher la tête, dis-je.
- Tu as choisi de prendre le risque, répondit Corentin.
- Donc vous avez regardé ce que j’ai fait, en conclus-je. Ce n’est pas grave, je savais que vous le feriez.
- Difficile d’ignorer l’écart de quelque chose qui brille plus fort que le soleil, dit Cléa.
- Tu parles de moi ? plaisantai-je, avant de reprendre plus sérieusement. Oui, je savais que je risquais de mourir, mais ça a été le moment le plus critique de ma vie.
- Une seconde plus tard et tu serais mort, acquiesça Corentin, à qui cette idée ne semblait pas déplaire.
- Je ne vais pas pouvoir bouger, annonçai-je en tentant de me relever. Mes muscles sont totalement engourdis.
- On est trop à découvert, ici, dit Corentin.
- On va t’aider à marcher, poursuivit Cléa.
- Où voulez-vous aller ? protestai-je faiblement alors que Corentin et Cléa me soulevaient. On n’a aucun endroit où se cacher.
- Tu sembles oublier la soucoupe, répliqua Corentin. On va pouvoir se cacher dedans.
- Et Mesint ?
- On a eu le temps de vérifier, dit Cléa. Je ne suis pas sûr qu’il soit mort, mais en tout cas il est suffisamment assommé ne pas se réveiller avant demain matin.
- On n’est jamais trop prudent, décidai-je. On va devoir l’attacher.
- Avec quoi ?
- On trouvera bien, dis-je. Il doit y avoir un tas de choses utiles dans la soucoupe.
Nous montâmes péniblement la dune, aidant du mieux que je le pouvais mes deux compagnons. Nous arrivâmes durement au pied de la soucoupe.
Corentin et Cléa me posèrent à terre, avant d’enclencher un système d’échelle qui me permettait de monter.
Une fois à l’intérieur, je m’enfonçai dans un des sièges, face au corps de Mesint, tandis que les deux autres allaient explorer la soucoupe. Après avoir repris des forces, je m’approchai du corps et tâtai le pouls de l’Autre.
Immédiatement, Mesint se redressa et me saisit le bras. Mais tout comme moi, il était trop faible, et je parvins à me dégager. J’allai prendre une carte lorsque deux rayons traversèrent la pièce et allèrent frapper Mesint.
Sous la violence du choc, Mesint fut éjecté de son siège, traversa le rebord fait d’une matière étrange et tomba en contrebas. Lorsque je me penchai pour voir s’il avait survécu, le cou de Mesint formait un angle bizarre, et du sang coulait de son nez.
- Il est mort, annonçai-je. Merci.
- Comment ça mort ? s’étonna Corentin. Je croyais que ces armes ne tuaient pas les Autres ?
- C’est la chute qui l’a tué, pas les armes, dis-je. Il s’est brisé le cou en tombant.
- Tant mieux ! décréta Corentin. Ça nous aurait évité des ennuis.
- On aurait pu l’interroger, déplorai-je. Il nous aurait donné plus d’informations.
- Plus d’informations ! railla Corentin. Sur quoi ? Sur les raisons qu’ils ont de nous tuer ? On sait déjà qu’ils n’en ont pas. Sur leur plan pour nous exterminer ? On va tous mourir, c’est le plus important.
- Par exemple, où est l’équipe de Tilaal ! répliquai-je. C’est seulement l’équipe de Mesint qui nous a poursuivi, mais nous n’avons pas de nouvelles de Tilaal.
- C’est normal, dit Cléa. Ils ont une humanité entière a détruire. Ils ont dû conclure qu’une seule équipe suffirait à nous tuer, nous, trois gamins. L’équipe de Tilaal est parti tuer des pauvres gens.
- Je ne crois pas, dis-je. Ils nous en veulent. Ça m’étonnerait qu’ils nous laissent partir comme ça.
- S’ils communiquent par télépathie, dit Corentin, Mesint les a sûrement prévenu de sa mort. On ne devrait pas rester ici.
- Pour une fois, je suis contre la prudence, dis-je. Je suis épuisé, j’ai failli mourir, si on continue à marcher, nous allons mourir d’épuisement.
- Faisons des tours de garde, alors, proposa Corentin.
- Je prends le dernier dans ce cas, dis-je.
- D’accord, maugréa Corentin. Et nos rations de nourriture ?
- Prenez-les, dis-je en fermant les yeux. Je suis trop fatigué pour manger. Laissez-moi tranquille.
Je tentai de rester éveillé pour surveiller que Corentin ne prenait pas plus de nourriture que d’habitude, mais mes yeux se fermaient tout seuls. Je m’endormis bientôt, vaincu par la fatigue.
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