Chapitre 5

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Le petit garçon lève les yeux et son sourire se fige. Ses yeux et sa bouche s’arrondissent.

— Maman, tu vois ce que je vois ? Mon papa est revenu !? jubile-t-il.

Kenna ravale un gémissement et, du regard, sollicite une explication à Marine, mais déjà son fils l'invite à ses côtés. Elle lui cède la place.

Son petit bonhomme lui semble revigoré. Il porte une petite main douce sur sa joue rugueuse et le mitraille de questions.

— … ton travail est fini, Maman dit que tu voyages beaucoup ?

Kenna discute avec son fils, ignorant s’il a auparavant été si heureux. Cependant, des tuyaux qui lui sont introduits dans les narines le font tomber de son nuage. Il retient ses larmes, l’embrasse sur le front et lui promet de revenir vite.

Marine tente de le rattraper dans le couloir.

— Il va mieux, Amour ! Il aura juste besoin de séances de ki…

Mais ses paroles se perdent derrière la porte coupe-feu.

***

Kenna accède à la cafeteria de la clinique après environ 1 heure. Renouer avec son dieu lui a fait du bien. Il commande un café et un beignet aux fruits rouges.

Chargé d’un plateau, il fouille la salle lorsque sa jolie brune attire son attention. Marine est seule. Il cille et se dirige vers elle.

Assis dos à la porte, il engloutit sa friandise en quelques bouchées.

— Où est ma fille ? s’enquiert-il, le ton dur, après avoir siroté sa boisson chaude.

Les yeux rougis, elle toussote.

— Ma cousine a commis l’erreur de s’arrêter dans un centre commercial qui propose des manèges. Elles ne vont plus tarder.

— Et tes parents ? s’informe-t-il.

— Je ne fréquente plus Maman depuis ma grossesse et Papa passe très souvent à la maison.

— Pour voir également mes enfants? s’informe Kenna frappé d’étonnement.

— Ils s’adorent, dit-elle en lui décochant un faible sourire.

— Laisse-moi deviner : il te préfèrerait en mère isolée plutôt que mariée à un Africain ?

— Il n’est pas d’accord que tu ne sois pas au courant.

Stupéfait, il se ressaisit en toussotant à son tour.

— Mon fils c’est Jeffrey et ma fille ?

— Il s’appelle Kenna Jeffrey comme toi et ta fille, c’est Nour.

Comme ma mère ! se réjouit-il en son for intérieur tout de même hébété.

— Merci de ne pas m’avoir également volé ce rêve.

— Pardonne-moi, Amour, vraiment pour ce mail, il y a 3 ans. Même si j’étais perdue, j’étais au moins certaine d’une chose : sans celui-ci, tu serais revenu me chercher et resté si tu avais su ma grossesse difficile. Seulement, tu t’en serais voulu d’avoir abandonné tes neveux, ils avaient encore plus besoin de toi. Moi, j’avais mon père.

— Bien sûr, il doit être aux anges que mes enfants s’appellent de Waldener-De Reiset et non Tesfamariam, signifie-t-il le ton lugubre, malgré une grande joie intérieure.

— Nous allons y remédier. J’ai déjà apprêté les formulaires de reconnaissance de paternité.

Leurs regards se soudent. Kenna lutte contre une envie pressante de l’embrasser.

— Je ne peux pas revenir vivre ici, Marine, mais je veux les voir autant que possible, participer à leur éducation. Il va falloir qu’on trouve...

— Je suis prête à te suivrejusuqu’au bout du monde.

Oh, mon Dieu… ! s’écrie-t-il en son for intérieur.

— Nous partirons avec toi, souligne-t-elle.

— Tu me fais marcher ?

— Non. Dès que Jeffrey sera rétabli et les démarches administratives finalisées, on prendra l’avion.

Son légendaire sourire en coin renaît. Kenna se penche ensuite par-dessus la petite table et capture les lèvres de Marine avec gourmandise.

— Amour, on nous regarde, glisse-t-elle, rouge comme une pivoine.

Je vais rentrer avec ma famille… eh, merde !

Aurèlie vient seulement de traverser son esprit. Sa mine s’assombrit, il se rassoit.

— Mon cœur, commence-t-il en saisissant la main de Marine dans la sienne, je t’aime, follement, tu n’as pas idée, mais…

Il se tait, prend une profonde inspiration et capture ses yeux dans les siens avant de poursuivre :

— J’ai quelqu’un.

— Mon Dieu ! souffle Marine dans un bref sanglot en retirant sa comme si elle s’était brûlée.

Elle l’appuie sur sa bouche, baisse les paupières et se tient raide comme hypnotisé, puis elle se lève brusquement :

— Je t’ai vraiment perdu…

Kenna l’imite et la rattrape en saisissant son bras, et la colle à lui. Il lui essuie les pommettes ravagées de larmes.

— Calme-toi, Mon cœur, dit-il tout bas, tu es mon grand amour, l’amour de ma vie.

Il se penche vers sa bouche et l’embrasse avec une infinie tendresse.

— Plus rien ni personne ne t’enlèvera à moi, dit-il ensuite doucement, le souffle court.

Marine consent d’un hochement de la tête.

— Nous allons affronter ce nouvel obstacle, mais ensemble, d’accord ? J’ai juste besoin de parler à Au…

« Maman ! » s’écrie avec gaité la voix d’une fillette, Papa !

Kenna se retourne à peine que déjà une petite-fille, au teint plus clair que celui de son fils, vient se jeter dans ses bras.

Il la hisse sur ses hanches et ses éclats de rire joyeux se confondent aux siens. Son cœur est sur le point d’exploser de bonheur.

— Maman a dit que tu vas revenir de ton *crès crès (très très) long voyage demain...

— Seigneur ! Tu es la plus belle petite fille du monde ! Tu as des yeux magnifiques !

Une fois de plus, la fillette émet un son joyeux et cristallin.

— Hum, fait-elle ensuite en hochant vivement la tête, comme Maman.

— On dit merci, Nour, la réprimande sa mère.

Leur fille lève les yeux au ciel en signe d’exaspération. Kenna lâche enfin son rire tonitruant et contagieux.

— Ce son m’a tant manqué, murmure Marine debout à côté d’eux.

— Je suis hyper heureux ! signifie-t-il avant de se pencher pour l’embrasser sur les lèvres, merci pour ces deux bouts de choux, ils sont beaux et adorables.

— Toi aussi t’es *crès (très) beau, Papa !

— Oh, ma princesse, merci !

Kenna embrasse sa fille sur la tempe. Elle a un énième petit rire et ajoute :

— Plus que sur les photos qui sont dans ma chambre et dans la chambre de Jeffrey, et aussi dans toute la maison, même dans la chambre de Maman, et même dans son téléphone…

Marine sait que sa fille est partie pour décrire leur maison dans les moindres détails et même celles des voisins.

— Nour, où est Tata ‘Lie ? l’interrompt-elle.

Leur fille, occupée à babiller et à caresser chaque trait du visage de son père, lui désigne la porte d’une main flasque.

— Tata Lie ? Ta cousine est chinoise ? s’enquiert Kenna.

— Non, lorsqu’on était enfant, je n’arrivais pas à dire Aurèlie, donc je coupais ‘Lie

Le cœur de Kenna fait un bond convulsif.

— Aurèlie ? répète-t-il, toute gaité disparue.

Non, le destin ne peut pas me jouer ce genre de tour ? pense-t-il.

— Elle est également arrivée ce matin, on s’est à peine parlé que déjà il fallait qu’elle aille récupérer Nour…

Bien sûr qu’il peut, conclut-il au fond de lui.

— Ma nounou a mal au *vencre (ventre), explique leur fille.

— ‘Lie, viens ! appelle joyeusement Marine, les yeux portés derrière Kenna.

Il sent tout à coup un lourd poids sur ses épaules, mais sa fille toujours dans ses bras, il s’oblige à se retourner. Son cœur, mis à l’épreuve depuis des jours, manque de s’arrêter. Aurèlie se tient debout à quelques tables d’eux, la main en appui sur l’une d’elles.

— ‘Lie est kiné’. Elle avait mis une croix sur notre famille depuis les évènements que tu connais. Mais, je continuais de lui écrire. Elle me répondait parfois. Je lui ai parlé de ma galère à obtenir un rendez-vous proche chez un Kiné. ‘Lie est venue apporter son aide à Jeffrey.

Soudain, la jeune femme s’écroule.

— Aurèlie ! s’écrient-ils d'une même voix.

Marine cille et le considère. La frayeur s’inscrivant tout doucement sur son visage, elle part en courant retrouver sa cousine étendue au sol.

« Je suis médecin ! s’annonce un homme qui vient s’accroupir devant celle-ci, reculez, s’il vous plait ! Un peu d’air ! »

Nour se met à pleurnicher dans les bras de Kenna. Il la console par des mots doux et lui applique des baisers sur la tempe afin de la calmer. Après quoi, il se rapproche de Marine et lui décoche également un tendre baiser sur la tempe. Elle se laisse aller contre lui. Il la rassure d’une main autour de sa taille.

— J’ai peur, Ken’, avoue-t-elle tout bas, les pommettes rougies.

— C’est un nouvel obstacle, Mon cœur, nous allons le surmonter, notre amour est plus fort et il n’est plus question que notre famille soit séparée.

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