"Pour le meilleur et pour le pire." Ou pas !
Les épingles de mon chignon s'enfoncent douloureusement dans mon crâne. J'en retire une dans un soulagement bien mérité et la cache dans mon décolleté. Je renifle mon café et décide d'y plonger les lèvres. Il est indubitablement froid et dégueulasse ! Une autre épingle vient mourir entre mes seins, et je soupire de satisfaction. De toute façon, je n'en voulais pas de cet horrible chignon.
Foutue Belle-mère !
D'ailleurs, est-ce quelqu'un pourrait la faire taire ? Edouard ? Jacques ? Non vraiment, personne ? Bien évidemment, ils se sont fait la malle. Les enflures, maugréai-je dans mon for intérieur. Si fort qu'ils doivent se faire tous petits en cet instant précis.
Pitié qu'elle arrête de jacasser... Ah, une coupe de champagne ! Merci, mon Pierre, lui articulai-je en silence. Aller, Belle-maman, cul-sec... PARFAIT ! Une deuxième peut-être ? Non, ça ira. Dommage ! Maintenant, attendez quelques minutes que la migraine vous prenne ainsi, vous irez avaler une aspirine et me ficherez la paix.
Je reprends mon crayon à papier, ma feuille froissée et tente d'aligner quelques mots pour mes vœux. J'enlève une nouvelle épingle et gigote sur le fauteuil. J'ai terriblement faim et rêve d'un paquet de chips ou de n'importe quoi d'autre, qui serait à même de calmer mon stress. Fort heureusement, ma tension baisse lorsque je vois Belle-mère s'éventer le visage. L'alcool commence à faire son petit effet. Elle s'assoit dans un soupir de mal-être et je souris malicieusement.
Je regarde l'heure : une heure trente avant le moment crucial !
Je reviens à mes moutons, enfin mes vœux ! Quand... Quelqu'un toque à la porte : mes mains se crispent et mes poils se hérissent. Je manque de renverser cet infect café sur ma robe. Bon Dieu, vais-je pouvoir être tranquille et écrire ce foutu texte ? Apparemment non ! Chère Belle-mère s'occupe de faire rentrer la personne responsable de ma nervosité. Pivotant légèrement pour regarder cet intrus, je manque de m'étouffer avec ma propre langue.
Bordel de merde, je sus alors que j'aurai dû me débrouiller seule. Mes yeux s'écarquillent si violemment que j'en perds la tête. Pierre éclate de rire : je lui lance le regard le plus noir qu'il n'ait jamais reçu. Cette femme est maquilleuse, sérieusement ? J'attrape mon téléphone, folle de rage.
Viens chercher ta mère et sa couguar ! Tapé-je avec ardeur sur le clavier de mon téléphone.
Deux minutes plus tard - les plus longues de toute ma vie - Edouard passe discrètement la tête par la porte et demande à Belle-maman et sa dinde maquillée de lui rendre service. Et que ne ferait pas Belle-maman pour son fils adoré. À peine sont-elles parties, que je ferme la pièce à double tour.
Je m'affale devant le miroir et m'observe attentivement. Mon visage est crispé, mon ventre se tord de douleur et mes jambes semblent aussi frêles que du coton. J'ai faim, je suis énervée, stressée et incapable de savoir ce que je fiche ici !
Alors, comme si la réponse pouvait être écrite sur son front, je me tourme vers Pierre. Pierre, qui est en train de dégommer un paquet de cookies : mon paquet de cookies ! Pris sur le fait, il s'approche l'air de rien afin de m'en filer un. Je vois sur son visage un mélange de tendresse, mélancolie et surtout et avant tout, une bonne envie de rire. Et il ne se fit pas prier pour s'esclaffer, à gorge déployée. Ce mec est complètement barré. Tout comme cette situation incroyablement absurde. Pour le meilleur et pour le pire. Ou pas !
Tournée vers le miroir, avalant goulûment mon cookie, je défais mon chignon. Libéré, délivré... Je retrouve enfin les sensations dans chaque parcelle de mon crâne. Je brosse soigneusement mes cheveux et décide d'enlever ma robe de mariée. Je jette un coup d'œil à Pierre, lui intimant du regard de se tourner. Quelques minutes plus tard, je retrouve mes formes dans un jean large, un pull noué sur le bas et une paire de basket de sport. Je m'empare de l'un des rouges à lèvres de la maquilleuse et une fois ma note faite, je somme Pierre de me faire sortir d'ici !
Et c'est ainsi, que Belle-maman et Edouard, le jour de notre mariage, jour de Saint-Valentin, trouvèrent la pièce vide. Sur le miroir de la coiffeuse, trois petits mots, écrit en rouge.
Epouse ta mère !
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