Chapitre 4
Isabelle
« Dans coup de foudre il y a « coup » et « foudre ».
Le premier assassine, le second calcine ».
Pellegrino Soricelli.
Plongée dans ma thèse sur le thème « faut-il se plier au système actuel ? », un bruit sourd me parvient aux oreilles mais je décide d’y faire abstraction. Je sens la porte s’ouvrir. La proviseure se tient dans l’encadrement de la porte, quelqu’un sur ses talons. Elle parle activement avec Mr Harper mais je n’écoute pas, concentrée sur mon écriture.
Un vent frais m’effleure. Je relève la tête, intriguée, quand je LE vois. Un jeune homme d’âge visiblement plus mûr que les autres s’avance d’un pas nonchalant, une veste en cuir sur le dos. La noirceur de sa chevelure, rehausse parfaitement sa peau d’un blanc lactescent. Son regard d’ébène pénètre mon âme et je me noie dans les ténèbres. Des frissons me picotent les bras, mais je ne saurais dire si je trouve cette sensation agréable. Le temps se fige, et je pénètre dans une nouvelle dimension où tout me paraît désormais possible.
Il rompe subitement le contact pour s’asseoir derrière moi. Mes pensées se bousculent, jamais on ne m’a regardée comme il vient de le faire. C’est peut-être stupide mais j’ai senti un lien se tisser, si infime soit-il.
Notre prof se racle la gorge, passe une main dans ses cheveux dégarnis et prend la parole.
⸻ Nous accueillons un nouvel élève. Tu veux bien te présenter ?
Le nouveau pousse un long soupir, avant de reculer son siège dans un raclement strident.
⸻ Je m’appelle Ethan, j’ai vingt ans et je viens de m’installer dans la région.
⸻ Bienvenue dans notre établissement. Et comment se fait-il que vous reprenez les études aussi tardivement Mr Jensen ?
⸻ Pour des raisons personnelles qui ne regardent que moi, tranche-t-il d’un ton cassant.
Mr Harper bien que déconcerté, n’insiste pas. L’ambiance de la salle s’est gélifiée mais il continue comme si de rien n’était, tout en jetant par moment quelques regards suspicieux de son côté.
Je n’écoute plus le cours, la tentation de le regarder une dernière fois est trop grande. Il faut que je sache.
Je pivote légèrement sur mon siège risquant un œil dans sa direction. Sa réaction ne se fait pas attendre, ses yeux noirs me transpercent à nouveau mais il n’aborde pas l’ombre d’un sourire. Mes poils se hérissent sous ma chemise. Sa beauté glaciale me fait froid dans le dos, et en même temps un feu ardent embrase mes reins.
Qu’est-ce qui m’arrive ?
Mon cœur continue ses palpitations et refuse de se calmer. Je fini par me retourner, les yeux rivés sur le tableau. J’essaye de l’ignorer mais je sens sa présence pesante derrière moi et j’ai la désagréable impression qu’il me fixe. Je dois me faire violence pour me composer un visage lisse et maîtriser mes mains tremblantes.
Je le trouve mystérieux, il a un air sombre que je n’ai jamais vu à personne. Sa venue a dégagé quelque chose de nouveau, même si je ne saurais dire quoi. J’ai eu l’impression l’espace d’une seconde, qu’il a lui aussi ressenti ce courant magnétique. Si seulement je pouvais lui demander quelque chose, n’importe quoi, mais ma fichue timidité me cloue sur place et je ne suis clairement pas en état d’aligner un mot. J’écris des phrases qui ne veulent rien dire sur mon cahier, pendant que mon estomac joue de la salsa.
Aucun garçon n’a jamais produit cet effet sur moi. Mais là c’est différent, il ne me plaît pas il m’attire. Je sens qu’il y a quelque chose à creuser sous sa carapace, et je compte bien découvrir la raison de sa mystérieuse venue.
Annotations
Versions