For Forever _Dear Evan Hansen

     Nous avions quitté les filles depuis maintenant vingt minutes mais Liam et moi n'avions toujours pas échangé un mot. J'étais mal à l'aise avec lui sachant comment nous nous étions quittés. Liam avait décidé de s'inscrire a des cours de handball au collège et il avait vite fini par se faire d'autres amis. Je lui en avais voulu, jaloux qu'il puisse avoir des liens d'amitié avec d'autres, et j'avais été égoïste. Pourtant c'était moi qui l'avais poussé à s'inscrire aux cours de sport, à se fondre dans le groupe. Maintenant, je me rendais compte que tout ça avait été stupide et puéril. On s'était disputés, et après ça, plus rien n'avait été comme avant. Liam était parti, puis Elyne s'était renfermée sur elle même, Phoebe avait quitté l'école pour de bon et Sam avait un peu perdu de sa constante gaieté. Liam brisa la glace entre nous, me sortant de mes pensées :

     - On fais quoi maintenant ? .

     - On fait comme si on ne s'était jamais disputé...

     - Heu.... Je te parle de la direction. Où on va ?

     - Ah, oui pardon, répondais-je,   encore plus gêné.

Je regardais sur la carte que j'avais téléchargé à l'aéroport pendant que les filles étaient allées se changer. Nous avions quittés Times Square et arrivions sur la 8ème avenue.

    - On est pas très loin de Broadway, ça te dis de faire un tour dans le monde des comédies musicales ?

     - Pas besoin de demander, avait répondu Liam, un grand sourire sur les lèvres, tu sais très bien que j'adore les comédies musicales, au moins autant que toi.

Nous passions devant les théâtres,voyons les affiches des comédies et commençions à chantonner.

     Les chansons de Cats, les Misérables,West Side Story, Hamilton, Hairspray, Le roi Lion, Wicked, Chicago,the Phantom of the Opera et Dear Evan Hansen nous sortaient de la bouche et il semblait que nous ne soyons pas les seuls à être envoûtés par la magie de Broadway car on voyait certains passants danser, d'autres étaient déguisés en chat de Cats et d'autres, la peau verte, faisaient danser leurs balais dans les airs. A cette vue nous fûmes pris d'un rire délivrant et mes craintes et la gène qui m'emplissaient quelques minutes auparavant avait totalement disparus au profit de la bonne humeur.

     Quand soudain, une idée folle me vint à l'esprit. Je voulais à tout prix assister à une de ces merveilleuses comédies musicales. En passant devant le théâtre jouant Singing In The Rain, une pulsion de fan me poussa à agir.

     - Liam, on va entrer voir ce musical. Maintenant.

     - Evidemment, tu n'as qu'à faire apparaître des places comme par magie !

     - J'ai bien mieux mon cher. Tu vois cette porte ? demandais-je en pointant la porte réservée au personnel. C'est ici que notre aventure commence.

     - Donc tu comptes entrer dans ce théâtre de façon tout à fait illégale.

Je lui souris de toute mes dents sans même répondre, il savait que j'allais le faire,peu importe son avis. Un plan d'entrée se dégageait lentement dans ma tête.

     - Je sais ce qu'on va faire. On va attendre que quelqu'un sorte ou entre pour courir vers la porte et s'infiltrer dans le théâtre.

     - Tu penses vraiment que ça va fonctionner.

     - L'espoir fait vivre Liam.

     - Si tu le dis.

Alors, comme deux espions russes, nous nous étions cachés derrière un buisson en plastique à côté de la porte de notre paradis. Nous pouvions entendre les musiques du spectacle au loin. Les minutes s'écoulèrent au rythme de nos tournois de Pierre, Papier, Ciseaux. Quand, tout à coup, la musique la plus connu du spectacle se fit entendre. Don Lockwood chantait sous la pluie.

     - OH NON ! Liam il faut qu'on rentre c'est LE moment !

     - Eliott att...

Mais trop tard, j'avais déjà activé mon mode bélier et je tentais d'enfoncer la porte.J' appuyai sur la poignée de toute ma force en donnant des coups de pieds mais elle restait fermée. Très bien porte, à nous deux.Je me penchais, le crâne en avant, en poussant sur la porte. C'est le fou rire de Liam qui me fit arrêter de pousser et, le crâne toujours collé à la porte, je retournais mon regard vers lui.

     - Qu'est ce qui te fait rire ? Tu te moques de moi alors que j'essaie, toi tu ne fais que regarder je te signale.

     - Excuse moi tu as raison, lâcha-t-il des larmes de rire au coin des yeux. Je devrais aider.

     - Je suis bien d'accord, allez viens, pousser avec moi.

     - Quoi ?! Tu ne veux pas te relever plutôt ? On trouvera une autre solution.

     - Très bien, on voit les vrais amis, dis-je les bras croisés, la tête fixé à cette porte.

Liam regarda autour de lui, soupira et finit par venir coller son crâne à mes côté.Ensembles, nous poussions inutilement la porte, et ensemble nous marquions les murs de nos fous rires. Alors que nous partagions un réel moment de complicité la porte finit par s'ouvrir nous laissant béats, penchés sur une paire de baskets noires.

- What are you doing here ? I'm gonna call the security !

- C'est le moment où on court, dis-je doucement à Liam.

- Come back here drunked boys !

C'est ainsi que nous nous retrouvions essoufflés, les yeux embués de nos larmes.

Après cette expédition foireuse,nous nous étions rabattus dans une petite brasserie pas très loin de la.

Nous avions pris chacun une bière et nous étions assis à une table. Je voulais mettre au clair ce qui restait muet entre nous, je ne voulais pas me sentir coupable pendant tout le voyage et je savais que Liam ressentait la même chose sur cet événement qui avait tout chamboulé trois ans de cela.

     - Ecoute Liam, je sais que j'ai été un vrai connard avec toi en troisième et je voulais vraiment m'excuser, commençais je. J'ai vraiment été con de penser que tu nous oublierai en te mettant au sport et j'étais jaloux de tes nouveaux amis avec qui tu avais l'air de te sentir si bien. Je détestais te voir avec eux et me rendre compte que je ne pouvais pas te donner tout ce dont tu avais besoin en tant qu'amis. Moi je ne faisais pas de sport, je n'étais pas populaire, ne pouvais pas te faire entrer dans les soirées du groupe de Handball et te faire rencontrer de belles filles. Je n'ai pas envie de décevoir Sam qui a beaucoup travaillé a tous nous réunir alors je voulais te faire de réelles excuses avant que notre voyage commence vraiment et que je ne trouve plus de temps pour parler de ça seul a seul avec toi.

     - Eliott, me répondait-il, un sourire bienfaisant sur le visage, tu n'a pas a t'excuser. J'ai aussi ma part de responsabilité dans cette affaire et j'ai aussi été un vrai gredin...

     - Liam, personne n'utilise plus ce mot depuis le moyen age, le coupais je, non sans un un petit sourire moqueur.

     - Fripon ?

     - NON !!

     - Canaille alors ?

     - Encore moins !

     - Saltimbanque ?

     - Ok, je jette l'éponge, tu es irrécupérable, ironisais-je

     - Bref, revenons à nos moutons (je levais les yeux au ciel) Quoi ? Qu'est ce que j'ai dis encore ??

     - Rien du tout, continue

     - D'accord.... Ce que je voulais dire, c'est que je suis aussi désolé de m'être éloigné de vous. Je crois que la popularité m'était monté à la tête, je voulais être invité, devenir un intérêt pour les filles, et je vous oubliais de plus en plus. Et plus je m'éloignais, plus je me rendais compte que je n'avais aucun point commun avec mes nouveaux amis. Ils étaient tous intéressée par l'alcool, commençaient à fumer, changeaient de copine tous les deux semaines et vouaient un culte à leur corps sans rien de la cervelle. J'en avais marre de retrouver tous les clichés des lycéens sportifs qu'on retrouvait dans les films américains et je voulais revenir à la normal, avec mes vrais amis : vous. Mais je m'étais vite rendu compte que la honte qui m'envahissait m'empêchait de vous regarder dans les yeux et de revenir vers vous. Je crois que j'ai toujours été lâche quand il s'agit de faire des excuses, alors j'ai baissé les bras. Je me suis dégonflé comme un ballon.

     - Magnifique métaphore...

     - A vrai dire, c'est pas vraiment une métaphore mais plutôt une comparaison parce que conjonction de subordination "comme" est apparente. Dans une métaphore, il n'y en a pas. J'aurais du dire "j'étais un ballon qui se dégonflait".

     - Décidément, tu n'a vraiment rien voir avec les clichés des lycéens sportifs, ça c'est sûr !

     - C'est bien ce que je me suis rendu compte. Peut être un peu trop tard.

     Liam s'était arrêté de parler et semblait dans ses pensées, une certaine mélancolie dans les yeux.Nous restions tous les deux sur les banquettes du bar, à siroter nos boissons fraîches. Mais le silence n'était plus pesant, au contraire, il était frais et libéré. Nous restâmes là quelques minutes encore, en silence avant que je reprenne la parole.

     - Dis Liam, ça te dérangerait si cette conversation restait entre nous ? Lui demandais-je. Je ne veux pas que Sam s'affole, je sais qu'au fond d'elle, elle n'aime pas se remémorer ces trois dernières années.

     - Aucun problème, je comprends.

     - On devrait retourner au pont de rendez-vous, c'est bientôt l'heure.

     Il était bientôt 20h30 mais le soleil était encore haut dans le ciel quand nous sortîmes du bar. Nous repassions par un Broadway un peu plus encombré qu'une demi heure auparavant et retrouvions les filles devant un grand magasin à la devanture éclairée par des néons rouges. On aurait dit trois mannequins à un shooting photo pour une grande marque de couture, les cheveux dans le vent et le visage éclairé d'une lumière rosée. Elyne était magnifique, et je me sentais rougir a cette pensée.Elle était recroquevillée sur elle même, toute frêle et grelottante dans sa fine robe.

     - Elyne, tu tremble ! M'écriais-je. J'ai un gilet dans mon sac si tu veux.

Elle acquiesçait et me remercia quand je sortais de mon sac mon pull qui ressemblait surtout a une boule de laine froissée. Elle l'enfila et arrêta net de grelotter.

     - Bon ! C'est pas tout mais on a jusqu'à 22h pour récupérer notre luxueux bolide au port ! Avait déclaré Sam après avoir claqué des mains avec entrain

     - Au port ? Demandait Phoebe, un sourcil froncé et l'autre relevé, lui donnant un air de clown .

     - Oui, il a été transformé par conteneur il y a quinze jours. Il faut aller le chercher à cette adresse : 300 Western Avenue, Staten Island.

A ces mots, nous étions en route, à la recherche de notre merveilleuse embarcation.