Acte V, Scène IV, Dernière partie – S’abîmer dans les abysses

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Assis sur les Bords du Monde, quelqu’un pleure et déclame du ton le plus sombre.

Pourquoi rester ? Pourquoi continuer à marcher entre les ombres ? Pourquoi louvoyer entre les ténèbres ? Ô humains ! Pauvres humains ! Pauvres âmes qui errent ! Vous qui marchiez à mes côtés sans me voir, sans m’entendre. Vous avez réussi. Oui, vous avez réussi à me fatiguer, à me détruire, à me consumer comme les braises du déclin qui se confondent avec les brumes de sanglots zébrant mon ciel déchiré. (Il ferme les yeux.) Non ! Vous ne marchiez pas à mes côtés, vous étiez sur mon chemin, rien de plus. La seule qui suivait mes pas n’était autre que la solitude, cette marâtre nauséabonde qui vous donne des coups de fouet à chaque instant, cette amie fidèle qui vous enlace de ses bras mélancoliques. Eh bien, je suis fatigué. (Il rouvre les yeux et se met debout.) Je suis fatigué ! Usé ! Crevé ! Je n’en peux plus ! Pas un ami à qui parler, avec qui partager … que sais-je… même les plus futiles débilités. Oui, c’est ça, je suis juste à bout. Ressentir la peine et la souffrance des gens qui m’entourent, la fange sordide dans laquelle le monde s’enlise de jour en jour. (Il baisse la tête et murmure.) Il serait si facile de sauter et m’abîmer dans les abysses. Cela prendrait quelques secondes, quelques infimes secondes de liberté avant de m’écraser dans le néant. Ce rien libérateur. Entendez mon cri et si jamais quelqu’un connait les mystères de la vie et les vérités de la mort – par pitié – qu’il conjure le sort et brise mes chaînes. Allez, juste un pas… un putain de pas et c’est terminé. (Il sifflote d’un air macabre.)

A l’étroit sur cette Terre, il m’a fallu créer mes univers.

Mais les larmes s’échappent face au noir qui me happe.

Les drapeaux s’abaissent pleurant remords et regrets qui blessent.

Mes yeux se voilent et je me perds dans les étoiles.

En bas, je serais si bien, si loin de vous. Vous qui avancez, œillères au vent, sans faire attention à ce que je vis, à ce que j’endure. Un seul petit pas et je pourrais enfin me perdre dans la fumée, les cendres comme chemin. Vous autres n’avez jamais été là pour moi ! Alors que moi, pauvre idiot que je suis, n’avais de cesse de vous tenir la main et de vous guider. Je m’en vais. (Il fait un pas en avant.) Non ! Je ne vous ferais pas ce plaisir. Je suis las de vous, mais jamais je ne cesserai de chérir la flamme de la vie. Je continuerai de la protéger du souffle. De vos souffles. (Il fait un pas en arrière et gémit.)

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