Chapitre 1
Rose. Comme le ciel levant, ou comme la couleur des lèvres pulpeuses de la serveuse du café. Le rose est une couleur séductrice, romantique, et souvent associée à la douceur. La rose est la fleur déclarative des flammes amoureuses de notre temps et reste extrêmement symbolique.
Qui aurait cru qu’un jour, elle deviendrait un prétexte de vengeance d’un psychopathe en fuite ?
« Les épines de la rose rouge se sont avérées être vénéneuses, encore une fois. Le coupable, encore inconnu des forces de l’ordre, et surtout introuvable, a encore frappé. Julie Boyer, 33 ans, a été retrouvée ce lundi, sans vie, dans son domicile familial. Elle présenterait des caractéristiques similaires aux six autres victimes du livreur de rose : L’asphyxie. La victime aurait reçu un cadeau, quelques semaines plus tôt. Une rose, particulièrement rouge, accompagnée d’une lettre manuscrite, et poétique. […] »
Je me rends compte qu’un coin de mon journal trempe dans mon café, et par réflexe, je le replie pour qu’il soit moins encombrant, même si par mon geste, ma tasse est prête à se renverser sur ma chemise. Blanche, évidemment.
Avoir replié ce journal est peut-être une bonne initiative pour le déroulement de ma journée car je vais avoir des clients qui ont des traumatismes particulièrement complexes, aujourd’hui, et j’aimerais commencer ma journée avec les idées claires, positives, pour pouvoir travailler la thérapie de manière efficace. Et surtout, pour ne pas me faire submerger d’ondes négatives, pouvant me rendre un peu plus sensible aux récits que je vais entendre.
Voyant le temps qui défile, je me dépêche de boire mon café. Cela me vaut une belle grimace de dégoût. Le iquide brun me réveille, mais je n’aime pas le goût. Alors pourquoi continuer à en boire ? Très bonne question. C’est devenu comme une sorte de réflexe, le matin, où ma conscience me dit que je dois boire ce café corsé, avant d’aller au travail.
Je me dépêche de régler ma note auprès de la délicieuse dame aux lèvres roses, et m’empresse de sortir du café, et de passer la porte d’en face. Dans un bâtiment à deux étages, rénovés, blanc et modernement vitré, là où le mot « Psychal » orne la marge blanche séparant le rez de chaussé du premier étage. On dirait une sorte de mini-clinique, ce qui pour moi reste repoussant pour les personnes en besoin de thérapie. Cela pourrait leur faire penser qu’ils sont fous ! Même si certains le sont peut-être réellement...
Je suis en retard.
La dame, à l’accueil, me lance un regard avertisseur. Vêtue de sa chemise blanche parfaitement repassée, sont décoletté lui descend jusqu’en bas de la poitrine. Je ris d’épuisement en essayant d’imaginer l’épaisseur exacte du maquillage qu’elle possède sur le visage.
Elle me signale de mon retard et que ma première cliente est déjà à attendre dans mon bureau. Je ne comprends toujours pas pourquoi ils n’ont pas eu l’idée de mettre une salle d’attente dans ce foutu bâtiment.
Je passe enfin la porte de mon lieu de travail, et découvre une jeune femme, assise sur la chaise qui lui est destinée. La mèche de son carré plongeant est accentuée par sa tête qui regarde le sol. De loin, on dirait une petite fille, attendant sa maman sur un banc de l’école, mais ensuite, on se rend compte de la maturité de cette jeune femme. Ce qui me choque, d’ailleurs, c’est l’absence de maquillage sur son visage triste et surtout, ses cernes grandissantes, lui créant des poches sous les yeux.
Je n’ai aucun problème contre les personnes qui ne porte pas de maquillage, mais d’apparence, cette jeune femme à l’air assez apprêtée, pour au moins avoir l’habitude de maquiller légèrement ses lèvres.
Premier symptôme qui me démontre qu’il y a un problème.
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