Où est l'enfant ?
Quelques jours plus tard, Hitch revient. Nous nous réunissons aussitôt dans le bureau de mon caporal.
Hitch prend la parole :
- Bon, ça nous aura demandé beaucoup de temps et d'efforts, mais nous avons les résultats de l'enquête sur Lord Edel.
- On t'écoute, dit Livaï.
Hitch se racle la gorge :
- Lord Edel est un noble de province. Il s'est marié mais sa femme est décédée depuis de nombreuses années en mettant au monde leur fils. Notre homme s'est, semble-t-il, toujours intéressé à la politique. Il souhaitait acquérir une place importante auprès du roi. Il a même fait l'acquisition d'un luxueux appartement au sein de la capitale pour se rapprocher du monarque. Il a réclamé de nombreuses audiences auprès du roi et l'une d'elles a été acceptée. Mais ses demandes de faveurs royales n'ont pas été acceptées. Lord Edel a eu beaucoup de mal à le digérer et, ne pouvant obtenir ce qu'il voulait par un comportement docile, il décida de changer de méthode. Il écrivit aux hauts placés du gouvernement qu'il savait parfaitement que ce n'était pas le roi qui régnait sur l'humanité, mais les hautes figures de l'État et que, si ses demandes n'étaient pas gentiment acceptées, il ferait éclater cette information au grand jour ! Il est mort quelques jours après l'envoi de cette lettre, sans recevoir aucune réponse.
- Il a reçu sa réponse, déclare Livaï, le gouvernement a envoyé ses hommes pour le faire taire à tout jamais.
- Il voulait faire du chantage en déclarant au peuple que le roi n'était qu'une marionnette manipulée par les hauts dignitaires du gouvernement. Il n'était pas très loin de la vérité. Pensez-vous qu'il savait vraiment que le roi n'était qu'un pantin ou n'était-ce que du bluff ?
- Il le pensait vraiment, affirme Hitch. En fouillant au peigne fin l'appartement où Lord Edel vivait, nous avons mis la main sur son journal intime. Il y a raconté en détails son entrevue avec le roi. Il a écrit avoir remarqué que le monarque ne plaçait pas un mot de tout leur entretien, seuls les hauts fonctionnaires discutent et débattent pendant que le souverain observe la scène, assis sur son trône. Il était donc convaincu que le roi n'était que manipulé par ses ministres et ne servait que de représentant devant le peuple.
-Il n'était pas du tout loin de la vérité, déclaré-je, voilà pourquoi les brigades spéciales l'ont assassiné.
- C'est exact, confirme Hitch.
- Cela explique tout, dit Livaï, ce Lord Edel en savait trop, il représentait une menace pour l'Ancien Régime, alors il a été éliminé.
- Non, cela n'explique pas tout, rétorqué-je. Vous semblez oublier que la famille de fermiers à son service a été tuée, elle aussi, mais pourquoi ? Quel intérêt y a-t-il à assassiner de simples fermiers et serviteurs ?
- Ils en savaient peut-être trop, eux aussi, propose Hitch, alors, ne voulant pas prendre de risques, les divisions centrales des brigades spéciales les ont éliminés.
- Je ne pense pas. Il est très rare qu'un noble parle de politique ou de ses problèmes personnels à de simples fermiers.
- Ces fermiers étaient à son service, ils ont peut-être entendu des choses qu'ils n'étaient pas censés entendre alors ils ont été éliminés.
- Dis moi, Hitch, Lord Edel se rendait-il souvent dans cette ferme ?
- Non, d'après nos recherches, depuis l'acquisition de son appartement en ville il y a bientôt deux ans, il ne se rendait plus du tout dans cette ferme.
- Alors il n'y a pas de raison pour que ces fermiers aient entendu quelque chose au sujet du chantage de leur patron ou pour que les brigades spéciales le pensent.
- Certes, mais les divisions centrales des brigades spéciales sont très précautionneuses. Vous qui les avez affrontées, vous devriez le savoir mieux que quiconque !
Un silence s'installe. Chacun réfléchit. La solution semble si proche, mais il y a quelque chose qui nous échappe. Je tente de remettre mes pensées en ordre en récapitulant tout ce que nous savons, quand soudain :
- Hitch, tu nous a bien dit que Lord Edel est un noble de province marié mais que sa femme est morte il y a plusieurs années en mettant au monde leur enfant.
- Oui, c'est exact.
- Voilà ce qui ne va pas !
- Quoi donc ? demande Livaï.
- Où est l'enfant ?
Annotations
Versions