Envie de grandeurs
« Mets-toi à la file indienne avec le reste du groupe ! » qu’ils disent. Mais moi je ne veux pas rentrer dans la file ! Moi je veux partir loin, je veux voyager. Je veux atteindre l’horizon et continuer plus loin encore. Le monde est vaste, immense, infini ! Je veux le parcourir du haut de mes petites jambes. « Rentre dans le rang, fais comme tout le monde » qu’ils disent. Mais je ne veux pas être comme tout le monde ! Je veux être unique. Je veux être un individu à part entière. Je ne veux pas n’être qu’une poussière parmi tant d’autres. Un simple rouage du bien commun.
Un matin, je me suis enfuie. Je suis partie sans prévenir. J’ai attrapé mon sac à dos et j’ai filé. Je trouverai à manger sur la route. Cette fois ils ne m’attraperont pas. Quand ils me chercheront, je serai déjà loin. Pas question d’y retourner. Pas question de me tuer à la tâche avant de n’avoir rien vu du monde.
Le vent frais fouette mon visage. Il sent bon l’humidité. J’adore l’automne, c’est le meilleur moment pour partir, je peux me cacher un peu partout. La joie me transporte. Je ne sais plus où regarder. Les chants des oiseaux retentissent au-dessus de ma tête comme une pluie faite de millier de notes. Je vais bon train, ma maison loin derrière moi, face à face avec l’inconnu.
En milieu d’après-midi il commence à faire lourd et la soif se fait sentir. Je m’arrête et écoute attentivement. À quelques mètres sur ma gauche, j’entends le flip-flop d’un filet d’eau tombant dans une flaque. Une fontaine. Je grimpe sur le petit muret pour atteindre l’eau et tombe nez à nez avec une étrange créature en bois. Elle est toute rouge, immobile. Elle me sourit bizarrement.
-- Maman ! Maman !
-- Qu’est-ce qu’il y a mon garçon ?
-- Il y a une fourmi avec un sac à dos près de ma tortue !
--Mais non les fourmis ne portent pas de sac à dos Arthur.
-- Mais si je te dis ! Peut-être qu’elle voyage maman, tu ne sais pas.
-- Mais les fourmis ne voyagent pas, elles vivent en colonies mon lapin. Elles travaillent dur toute leur vie pour leur Reine. Allez viens Arthur, on rentre. N’oublie pas ton jouet !
Le garçon fit la moue. Il jeta un dernier coup d’œil à la petite fourmi qui se désaltérait. Il crut la voir lui faire un signe d’une de ses pattes. Il le lui rendit timidement, attrapa sa tortue en bois et courut derrière sa mère.
« Quel drôle de créature… » pensa la fourmi.
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