Note de service

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Un lundi matin, Laure de Vries, sa supérieure hiérarchique, avait laissé sur le bureau de Cécile Pataquès un post-it sur lequel était écrit :

“Tu n’oublieras pas de traiter le dossier Thielemans avant lundi 9 novembre ;-)”

Ce message avait aussitôt plongé Cécile Pataquès dans la plus profonde perplexité, et ce pour quatre raisons :

Tout d’abord, personne dans l’équipe n’avait besoin qu’on lui rappelle les deadlines, tous et toutes se montrant très professionnels et travailleurs. En outre, il n’était pas du tout dans l’habitude de leur cheffe de le faire. Quels que fussent par ailleurs ses défauts, elle avait toujours montré une relative confiance en les capacités de ses subordonnés, leur laissant une certaine latitude dans le traitement de leurs tâches respectives.

Ensuite, le dossier Thielemans était bouclé et rendu depuis près de dix jours.

Plus étonnant : Cécile n’était pas responsable du rendu du dossier Thielemans ; elle n’en connaissait même pas la teneur. L’affaire avait été confiée à Rémi Picaud et celui-ci, comme il a été précisé plus haut, s’en était acquittée avec le sérieux et le talent dont il était coutumier.

Enfin, nous étions alors le 16 novembre, soit une semaine jour pour jour après la date butoir fixée par la N+1.

Passé quelques secondes de stupeur, Cécile avait tenté de rationnaliser. Il y avait après tout un certain nombre d'explications plausibles à ce mystère. Ce mot avait en effet tout à fait pu être rédigé à un moment de la semaine précédant le lundi 9. Adressé à un Rémi alors absent, on l’avait sans doute mal collé et un coup de vent l'avait chassé à travers la pièce. Finalement trouvé par la femme de ménage, ou un collaborateur peu attentif, par terre ou dans un recoin du bureau, près de dix jours apres sa chute, il avait alors été reposé sur le bureau le plus proche du point de chute, en l’occurence celui de Cécile. Voilà qui semblait tout à fait satisfaisant.

A moins qu’il ne se fût agi d’une plaisanterie de ses collègues recyclant un ancien post-it. Un canular comme cela n'était certes pas dans l'esprit de la boite mais dans l’ordre des possibles, à condition de faire l'impasse sur un nombre conséquent d’éléments contradictoire, la plus probante étant l’absence totale de rire ou de sourire chez ses coreligionnaires, tous plongés dans leurs tâches en cours.

La seule certitude de Cécile concernait l’origine du Post-it. La graphie de Laure avait valeur de signature tant chacune des lettres affichaient par son tracé, clair et sans chichi, l’assurance de leur autrice. Bien droites malgré l’absence de lignes, les phrases délivraient chaque fois une information dégraissée, efficace mais toujours polie, et des ordres dont la sécheresse était tempérée par des smileys ou des points d’exclamation.

Laure avait-elle souhaité lui faire une blague ? Là encore, c'était peu probable. Sans se montrer autoritaire, leur cheffe de service maintenait entre son équipe et elle un éloignement peu propice à l’humour. Parangon du cloisonnement sanitaire entre travail et vie personnelle, elle ne laissait pas grand-chose filtrer de sa vie personnelle, pas plus qu’elle ne se montrait curieuse de celle de ses subordonnées. Pour ces raisons, on l’imaginait mal se lancer dans l’absurde.

L’affaire n’avait pas occupé longtemps l’esprit de Laure, pris dans le stress de ses propres échéances – personnelles comme professionnelles, tout le monde n’avait pas le même talent pour le compartimentage. Une fois le papier jeté, l’affaire aurait même été rapidement oubliée si un phénomène similaire ne s’était pas reproduit le lundi suivant.

Cette fois-ci, le post-it rose avait été apposé sur le cadre supérieur de son écran, occultant la webcam. Comme pour être bien certain qu’il ne se décollerait pas sous l'effet d'un nouveau coup de vent, la personne qui l’avait laissé là avait doublé la petite couche de colle d’un gros morceau de scotch, conférant au tout un aspect assez agressif, comme s’il portait l’écho de la brutalité avec laquelle on devinait qu’il avait été assemblé.

Là encore, aucun doute sur l’autrice ; le post-it rose et carré, le plus petit modèle qui soit, provenait du stock personnel de Laure, et était couvert de la fine écriture, serrée et penchée sur la droite, de sa cheffe.

Cette fois-ci, l'affaire était plus sérieuse. Absente du bureau pour une réunion plénière a l’autre bout de la ville, Laure n'avait pu, à moins de se rendre de très bon matin dans les locaux, le coller sur l'ordinateur, pas plus qu'elle ne l’aurait pu faire le vendredi soir précédent, pour la bonne raison qu'elle était déjà partie au moment du départ de Cécile, aux alentours de 19h. Comme il était très peu crédible d'imaginer Laure interrompre son week-end à Strasbourg pour faire passer ce message, on pouvait facilement l'innocenter.

Cécile s’était alors tournée vers son collège Rémi, seule personne déjà présente dans l’open-space aussi tôt dans la matinée. Absorbé par la lecture de ses mails, le reflet de son écran se devinait dans le verre de ses lunettes carrées. Ses sourcils étaient froncés ; il ne prêtait pas attention à elle. Difficile de voir en lui, père de famille sérieux et réservé, l'auteur du canular.

  • C’est quoi ce post-it ? Lui avait-elle demandé sans pouvoir contrôler le chevrotement de sa voix.
  • Hum ? avait répondu Rémi sans lever les yeux de son écran.
  • Ce post-it sur mon écran ?
  • Aucune idée. Ça dit quoi ?
  • C’est de la part de Laure, il est écrit : “Attention, la deadline de la campagne est le 22 octobre !!! :-@”.
  • Hum, avait répété Rémi en cliquant sur la molette de la souris. Et ?
  • Rémi. On est le 23 novembre ! Et puis, de quelle campagne parle-t-elle ?
  • C’est un vieux truc, c’est tout. Fais-moi voir.

Levant enfin les yeux, il avait roulé jusqu’à elle sur son siège à roulette.

  • C’est quoi ce smiley ? Avait-il demandé, l’air mi-intrigué, mi-amusé.
  • Je sais pas, c’est vieux, plus personne utilise ça. Regarde sur Google.

Il avait fallu retrouver un très vieux site de définition d'émoticônes pour découvrir que le symbole signifiait “Au secours !”.

  • Rémi, c’est la deuxième fois en deux semaines que je reçois ce genre de post-it. Le premier concernait le dossier Thielemans, dont tu étais responsable. Il te rappelait la date de rendu. Est-ce que tu l’as reçu ?
  • Non, ça ne me dit rien.
  • Et celui-ci, c'est toi qui l’a collé sur mon écran ?

Rémi avait planté dans les siens ses yeux bleus et honnêtes. La correction de sa myopie les rendait un tout petit peu trop grands ; cette disproportion minime suffisait à le rendre inquiétant.

  • Absolument pas. Pourquoi j’aurais fait ça ?

Cécile avait décidé de le croire et ce second post-it avait rejoint le premier dans la corbeille à papier, non sans qu’elle l’ait, cette fois, pris en photo, à titre de preuve. Mais une preuve de quoi, et dans quel type de procès ?

Au retour de Laure, Cécile avait d'abord pensé aller la voir pour tirer l'épisode au clair. Sur le pas de la porte, devant le visage fermé de sa N+1 en train de poser son sac et de retirer son cache-nez, elle avait changé d'avis. Les réunions plénières mettaient rarement Laure dans de bonnes dispositions d'écoute, et cette histoire risquait d’attiser son agacement, voire carrément l'énerver. Aussi, au “que me voulez-vous, Cécile ?” lancé par sa cheffe, elle n'avait pu que bredouiller une demande d'éclaircissement au sujet de son dossier en cours, récoltant de la part de Laure un haussement de sourcil plein de mépris policé.

La semaine avait suivi son cours habituel, du moins en apparence. Une effervescence de fin d’année régnait dans l’open-space, où chacun s'efforçait de boucler ses tâches en cours avant la clôture. Les discussions, menées avec plus d’entrain qu’à l’ordinaire, tournaient autour des entretiens annuels, des primes qu'on allait percevoir, et des diverses manières de passer les fêtes ; en famille pour Noël, avec des amis pour le nouvel an, seul chez soi pour les plus grincheux. A la cantine, on annonçait déjà le fameux menu de Noël et des décorations criardes avaient été suspendues. L'esprit des festivités avait donc envahi l’entreprise, et seule Cécile semblait épargnée par cette espèce d'euphorie.

Depuis la double-affaire du post-it, celle-ci traversait une période de doute telle qu'elle n'en avait plus vécu depuis son entrée dans le monde du travail, près de dix ans auparavant. Les deux messages avaient suffi à saper une confiance patiemment construite et dont elle n’aurait jamais soupçonné la fragilité et l’artificialité. Sur les nerfs et moralement épuisée, elle se sentait sans cesse mise en accusation par ses interlocuteurs, comme s’ils la rendaient muettement coupable de retards fantasmagoriques et de manquements imaginaires.

Cette anxiété l'empêchait de travailler correctement sur le dossier Tribord, une grosse affaire dont la restitution était attendue par Laure à la mi-décembre. Quoi qu’elle lui consacrât des heures et des heures, celui-ci ne progressait quasiment pas, comme si l’énergie déployée à travailler mieux produisait l’effet tout à fait contraire. Aussitôt une phrase écrite, elle l'effaçait rageusement, semblable dans son imaginaire à un auteur romantique du 19ème siècle biffant ses écrits. Pour un peu, elle se serait même mise à hurler tout le contenu de son œuvre dans l’open-space.

Comme son travail n'avançait pas, elle s'était mise à traîner de plus en plus longtemps au bureau pour y travailler jusqu’à des heures très tardives. Alors que tout le monde pliait bagage, elle restait à son bureau, la tête entre les mains, à se dévorer des mèches de cheveux. La femme de ménage faisait son apparition vers 22h avec tout son barda. Un sourire mauvais aux lèvres, celle-ci prenait un malin plaisir à passer avec énergie ses instruments sous le bureau de Cécile, prétendant que celle-ci en était absente et l'obligeant à lever les pieds pour éviter ses coups de balais. Cécile aurait même pu jurer voir à plusieurs reprises les yeux de l'employée briller d'une sorte de joie mauvaise alors qu'elle lui heurtait le pantalon avec sa serpillière trempée. En panique devant son clavier, en lutte avec la sensation physique de sa perte progressive de contrôle sur l'univers, Cécile avait subi tous les outrages de la femme de ménage sans oser répliquer ou se plaindre.

L'arrivée du week-end ne l'avait pas soulagée de son angoisse, bien au contraire. Le vendredi, vers 23h, au moment de devoir quitter l’open-space, elle n’avait pu résister à la tentation de fourrer dans sa sacoche l’ordinateur portable destiné au télétravail, non sans toutefois s’interdire de l’utiliser. Ce qu’elle avait réussi à faire une grande partie du samedi. Après avoir annulé sa journée shopping avec Elsa, puis sa raclette avec sa sœur, elle avait passé sa journée prostrée sur son canapé devant une rediffusion de Friends. Incapable de se concentrer sur l'histoire d'amour tumultueuse entre Rachel et Ross, son esprit ne cessait de dériver vers son dossier, jusqu'à ce que, le soir enfin venu, elle ne finisse par céder au désir qui la rongeait depuis l’épisode 2 de la saison 2 (The one with the cat”), et qu'elle n’ouvre son ordinateur pour travailler.

Ce qu'elle avait fait jusqu’à tomber d’épuisement sur son clavier.

C'est le reflet de la lumière du soleil de midi qui, se reflétant sur l'écran, l'avait réveillée. Alors qu’elle s’endormait, sa tête s’était posée sur les touches et avait rédigé quelque 741 pages Word d’un charabia principalement composé des lettres J, U, I, Y, H, G, K et des chiffres 6, 7, 8 ; cette bouillie presque mathématique, quasiment mystique, avait remplacé intégralement tout son travail.

D’abord submergée par la panique, Cécile s’était vite reprise. Elle n’avait après tout effacé qu’une copie de son dossier. L’original l’attendait bien sagement au bureau. Il y manquerait tout ce qu’elle avait écrit fiévreusement une bonne partie de la nuit mais au moins tout n’était pas perdu. Il lui suffisait d’attendre que lundi arrive.

Elle s’était mise à accomplir des tours dans son appartement, en proie à la plus profonde détresse. Son ventre gargouillait de faim ; elle ne parvenait pas à se souvenir de quand datait son dernier repas, peut-être au midi du vendredi précédent. Une migraine tapait dans son crâne. Elle avait décidé de sortir, de quitter l’atmosphère viciée de son appartement pour retrouver l’air libre. A force de se balader, elle s’était retrouvée sans trop savoir comment au beau milieu du parc à jeux. Posée sur un banc elle avait, des heures durant, regardé le manège imbécile des enfants courant entre le bateau pirate et les balançoires, environnée des cris perçants et des remises à l’ordre maternelles. Les poussettes se succédaient à côté d’elle, déchargeant aussitôt leurs cargaisons de bébés ; on ne lui prêtait pas attention, si ce n’est par de légers regards interrogateurs quand on finissait par comprendre qu’elle était là seule, sans progéniture, sans mari, sans rien à accomplir que regarder la descendance d’autrui s’egayer sur les toboggans. Au bout d’un moment, toutefois, les coups d'œil de la part des mères les plus méfiantes s’étaient faits plus insistants, jusqu’à devenir suffisamment inquisiteurs pour la pousser hors du parc à jeu.

Elle ne se souvenait pas d’être entrée dans le métro, c’était un peu comme si son corps n’avait pas eu besoin de directives pour s’y rendre. Dans sa poche de manteau, sa main serrait la clé du bureau. Si elle désactivait correctement l’alarme et ne déplaçait rien, personne ne saurait jamais quoi que ce soit de son intrusion dominicale. Il y avait bien des caméras de sécurité mais rien ne justifiait qu’on les consulte un jour. Elle allait simplement s’introduire dans l’open-space, allumer son ordinateur, travailler jusqu’au soir. Le lendemain, elle reviendrait ni vue ni connue reprendre son poste.

Les bureaux déserts semblaient encore plus menaçants le dimanche qu’en pleine nuit. Alors que ses pas, pourtant étouffés au maximum, résonnaient dans le couloir, Cécile s’était demandée comment elle pouvait se sentir aussi étrangère, aussi indésirée, dans un lieu où elle passait tant de temps. C’était un peu comme si, hors des heures et jours ouvrés, son entreprise se muait en un endroit hostile, un no man’s land rempli d’une magie malveillante.

Alors que la lumière s’allumait en crépitant un peu, Cécile, le cœur battant, s’était approchée de son poste de travail. Elle ne resterait pas longtemps, juste le temps d’avancer un peu, écrire quelques paragraphes, rattraper son retard, voilà, trois fois rien, ni vue ni connue.

Le post-it rose l’attendait au beau milieu de son écran. L’écriture de sa cheffe disait cette fois :

“ATTENTION lunch avec RA vendredi 12/10, bien penser à prévenir la DDA et fournir des slides récapitulatives de l’action à mener.

Cécile avait quitté les lieux sans éteindre la lumière ni remettre l’alarme.

Dans le métro, au milieu de sa panique, dans le bouleversement des ses pensées, elle avait résolu d’appeler Laure pour lui demander des explications. Il fallait mettre fin à ce harcèlement, sans quoi elle se plaindrait aux syndicats, plaiderait sa cause, obtiendrait le renvoi de sa N+1 ou au moins sa mutation. Elle ne se laisserait pas faire. Elle avait toujours été une employée fidèle, suffisamment zélée pour compenser son absence de don, toujours volontaire pour en faire plus. Elle ne méritait certainement pas d’être traitée ainsi. En tremblant, elle avait composé le numéro du portable de sa boss. L’icône verte n’attendait que son doigt pour lancer l’appel ; elle n’avait pu passer le pas.

Cécile pleurait encore à son retour chez elle. La nuit tombait déjà, le silence le plus total régnait dans le deux-pièces. Epuisée, affamée, elle s’était précipitée dans la cuisine où seul l’attendait le ronronnement du réfrigérateur vide. Sur la portière de celui-ci, au milieu des vignettes de département français issus de paquets de cordon-bleus et de deux ou trois faire-parts de naissance, était collé un post-it rose couverts de l’écriture de Laure.

“Ne pas oublier d’acheter des yaourts 0%, du café, des fruits et du beurre doux !!!”

***

Au bureau, il se racontait pas mal d’histoires sur Cécile Pataquès depuis le début de son congé maladie longue durée. Certains disaient qu’elle était devenue complètement folle et, qu’après s’être introduite par effraction chez sa supérieure hiérarchique, moisissait dans une institution pour grands paranoïaques. Quelle tristesse, ajoutaient-ils avec cette pointe de schadenfreude qui rend à certain la vie plus digne d’être vécue. D’autres murmuraient que Cécile avait attaqué Laure de Vries à l’arme blanche, l’accusant d’une persécution à coup de post-its roses. Restait une seule certitude : Cécile était bien restée très tardivement dans l’open-space à plusieurs reprises la semaine précédant le drame, la femme de ménage pouvait en attester, ainsi que les caméras de sécurité qui l'avaient formellement identifiée sur les lieux, en toute illégalité, le 30 novembre en journée. L’image de la télésurveillance, un peu pixellisée, la montrait se pencher sur son ordinateur, y prendre quelque chose avant de, tout à coup saisie d'une sorte de rage, fracasser l’intégralité de son bureau avec tout ce qui pouvait tomber entre les mains : clavier, pot à crayons, classeurs etc.

Chez les collègues les plus proches de Cécile, on décrivait la rapide descente aux Enfers de la jeune femme avec beaucoup d'étonnement et de tristesse. Rémi, en particulier, racontait comment un simple post-it rose laissé par erreur avait provoqué l'effondrement psychique de sa voisine de bureau :

  • Elle me l'a montré, répétait-il à qui voulait encore l'écouter. Elle m'a montré le post-it et je n'ai pas voulu prendre au sérieux son trouble.
  • Que disait le post-it ? lui demandait-on alors.
  • Rien d'important, un truc outdaté, une erreur de Laure certainement.
  • Ce n'est pas du harcèlement, alors ?

Rémi haussait chaque fois les épaules.

  • La frontière est parfois floue, vous ne pensez pas ? Demandait-il mystérieusement.

La vie avait vite repris son cours. Noël était passé, une nouvelle année avait commencé, chacun avait reçu son bonus et passé son entretien avec une Laure au visage fermé. Pas un mot à propos de Cécile n'était sorti de sa bouche depuis son retour de maladie.

Signe d'un nouveau départ, les post-its laissés de sa part sur les ordinateurs étaient désormais jaunes.

***

La maison de repos où vivait Cécile donnait sur la mer. Quand on tendait l'oreille, on pouvait percevoir la rumeur des vagues creusant la falaise. Avec l'érosion costale, cette institution de la côte bretonne vivait ses dernières années ; il faudrait bientôt songer à aller reprendre des forces ailleurs.

Cécile pensait parfois, avec une nostalgie anticipée, au jour où elle devrait quitter sa chambre si calme pour réintégrer le grand monde. Les forces qu'elle avait récupérée suffiraient-elles pour trouver un travail, prendre les transports, vivre seule de nouveau ?

Non, pas seule. Plus jamais seule.

Au loin, les cloches du village sonnaient.

Une voix résonna depuis le rez-de-chaussée, on l'appelait.

  • Cécile ! A table s'il te plaît !

Elle se leva à contrecoeur de son lit, passa un pantalon et une chemise. Au moment où elle allait sortir de sa chambre, un détail attira son attention vers le mur.

Un post-it rose y était collé. La main de Laure, toujours aussi assurée, y avait écrit :

  • Rendre dissertation narration dans Pierre et Jean à Mme Frelon le 19.

Cécile sourit. Sa composition était terminée depuis bien longtemps. Sa cheffe s'inquiétait pour rien. Toutes les deadlines de sa vie seraient tenues.

Elle ferma la porte doucement et descendit prendre son dîner.

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