Chapitre Premier, Partie V

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 Leudel avait rejoint Ragne dans sa chambre, c’était l’un des seuls moments où elle se sentait en paix. A ses côtés, elle ne comptait plus les choses, peu lui importait le nombre de pas, de respirations. Peu lui importait son nombre de cillement et son nombre de lames sur le corps. Ragne était pour Leudel une source de calme. Elle ne désirait nulle autre place que ses bras.

 Ragne l’observait avec une tendresse réelle dans le regard, il voyait Leudel comme on découvrait une merveille pour la millionième fois. C’était entré sur une terre connu avec un émerveillement à chaque fois renouveler. Il adorait voir ces cheveux noirs en batailles réfléchir, ce front haut se plisser, ses yeux vert sonder le fond des âmes. Le corps de Leudel était menu, ses mains entières disparaissait dans n’importe quelle autre paume, ses bras étaient fins, même s’ils suintaient d’une puissance certaines. Elle portait toujours une robe sobre, cintré pour ne pas l’encombrer dans ses mouvements. De son hybridation, on ne pouvait rien deviner si une queue touffu et féline d’un roux joyeux ne poignais pas derrière.

 Elle et lui s’était aimé à une autre époque. Sans sentiment initialement, c’était une étreinte pour combler les besoins du corps. De son expérience, Ragne avait compris une chose. Le coup de foudre n'existait pas. Il n'y avait que l'ego qui faisait face à un autre ego. Rencontrer quelqu'un, c'était arborer le masque de ce qu'on souhaitait être face à un autre qui n'existait qu'en surface. Le coup de foudre, ce n'était qu'un futur coup de foutre, un besoin de remplir notre égo avec un rêve. Parfois le rêve prenait parce que le masque se brisait trop tôt, comme un aveu involontaire de l’autre qui se dévoilait par erreur. Pour le reste, il fallait au temps le temps d'éroder les masques, de supprimer le « je » social, pour ne laisser que le moi sensible. Et c'est ce « moi » sensible qui était poreux à l'amour et à la tendresse. Parce que lorsqu'il parlait le « moi » ne disait pas « je », il disait « nous ».

 Puis, ils avaient appris à se connaitre et à s’aimer sur le temps. Il s’était étreint sur les années, sans se promettre une exclusivité illusoire. D’autres avait connu leur couche avant, d’autres la connaitrait après, il leur semblait illogique de se la réserver pendant.

 Il l’écouta lui raconter sa veille. Le combat n’était qu’une formalité, ils savaient l’un comme l’autre qu’elle craignait peu d’humains. Il allait l’interroger sur les conséquences de Varzek lorsque la porte s’ouvrit.

 Karoozis entra, accompagné d’Elwant. Faisant peu de cas des civilités, le géant noir salua l’assemblée.

— Bonsoir, c’est bon, j’ai risqué ma vie avec les mous du bulbe et j’ai ramené la cible numéro un de la Secte. Au fait, il a un but où c’était simplement un trophée pour toi ?

— Il va changer le monde longue-vie. Si nous devions retenir qu’un seul nom pour notre éternité, ce sera la sien, répondit doctement Ragne.

— Je ne suis pas sûr de comprendre, intervint Elwant.

— Si ça peut te rassurer, on s’y habitue, s’amusa Karoozis.

— Il y a beaucoup en jeu ambassadeur, nous avons besoin que vous retourniez dans votre domaine.

— Il y avait plus simple que de brûler une ville pour me le faire comprendre, grogna l’intéressé.

— Mais quel égoïsme, rit Karoozis, dans une période de crise économique, on offre du travail aux fossoyeurs et au maçons qui ont enfin de quoi reconstruire, et monsieur ne pense qu’à sa petite personne.

— J’ai toujours apprécié ton humour longue-vie, Mais ce n’est pas le moment.

— Dans ce cas, viens-en au but. Il sert à quoi ce truc ? Parce qu’à part trébucher, je ne lui ai pas vraiment trouvé d’utilité. Mais il fait vraiment un bon trébucheur lorsqu’il marche.

 Leudel, mutique depuis le début de la rencontre choisit ce moment pour intervenir.

— Elwant Penmar’ch a permis à l’Archipel de constituer l’Université, point névralgique pour les savants de ce monde. Il a remonté les traces des civilisations perdues et est en train d’appréhender l’histoire du jour de la colère, ce grâce à une de ces inventions dite « la mémoire de la terre ». Par un étrange jeu d’instruments de musique et de l’énergie résiduel du départ de Silenuse le Divin, il interroge les étoiles. Si le son est harmonieux, la réponse est oui, s’il ne l’est pas, c’est un non.

— Comment êtes-vous au courant ? S’étrangla l’intéressé.

 Karoozis éclata d’un long rire sonore devant les yeux écarquillés de l’ambassadeur. Ce dernier ne semblait pas s’attendre à voir ses travaux connus. Pris de pitié pour la déconfiture du musicien, il lui expliqua.

— Je te présente Leudel. C’est probablement une des pires raclures qui existe dans ce monde. Elle connait les secrets d’absolument tout le monde et a la possibilité de fonder un empire sur l’intégralité du continent en deux jours. Et c’est un excellent coup au lit. Dommage qu’elle ait de petits seins.

 Les yeux de la jeune femme jetèrent des éclairs envers le colosse qui continua de rire.

— Elle a donc un réseau d’espion qu’elle tient par les couilles à cause de leurs petits secrets. Elle connait à n’en pas douter les amants de ta mère et je la soupçonne même de connaitre les pensées des dieux.

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