50. Envies et frustration
Mathias
Bordel de Dieu… Je suis au bout de ma vie. Mon cerveau est totalement embrumé et mon corps anesthésié par l’orgasme. Je m’appuie davantage contre l’arbre en maintenant Ysée contre moi de mon bras libre et tente de retrouver une respiration plus calme, mon nez niché dans son cou. Ni elle, ni moi ne parlons ou ne bougeons, comme si le moindre bruit, le moindre mouvement, pouvait faire éclater cette bulle dans laquelle nous nous sommes plongés.
Comment en sommes-nous arrivés là ? Comment a-t-on pu passer d’être à deux doigts de s’entretuer à ce moment charnel hors du temps ? Merde… Je sais que je n’ai pas géré, que je n’aurais pas dû craquer, mais après des jours de tentation et d’abstinence, la voir se jeter sur moi m’a fait vriller. Si elle en avait envie, je n’étais pas mieux, loin de là. Cette nana m’exaspère autant qu’elle m’excite, et je crois que ça a rendu cette partie de jambes en l’air particulièrement torride. Faut dire qu’avec ce corps… Et puis, au moins, j’ai trouvé un moyen de la faire taire, non ? La prochaine fois, je la colle contre un mur et je la prends, j’éviterai sa crise de nerfs et la mienne au passage.
La prochaine fois ? N’importe quoi, Mat… Quelle idée ! Il ne faut pas que ça se reproduise. Impossible. La dernière fois que j’ai mêlé le cul et une mission… Je ne veux même pas y penser, parce qu’il suffit d’un rien pour que je revoie son corps étendu sur un brancard, le sang et la terreur que j’ai ressenti à l’idée de la perdre, d’être la cause de sa mort. Tout ça pour rien, en plus, au final…
Je repousse Justine de mon esprit et libère délicatement Ysée en la remettant sur ses pieds, non sans m’assurer qu’elle soit stable sur ses appuis. Sans oser croiser son regard, je me débarrasse du préservatif que je glisse dans un mouchoir puis dans l’une de mes poches en me promettant de m’en débarrasser au plus vite. Je remonte mon pantalon avant d’aller récupérer ses affaires sur le sable pour m’éloigner d’elle et tenter de reprendre contenance. J’ai merdé, en long, en large et en travers, je le sais. Et Ysée ne m’a pas aidé à garder le contrôle. Je suis d’ailleurs certain que ça l’a fait kiffer de me voir craquer.
— Il ne faut pas qu’on traîne à repartir, Ysée, soupiré-je en lui tendant finalement ses vêtements.
— C’est tout ce que tu trouves à dire après ça ? me demande-t-elle sans s’en saisir. Tu n’as déjà plus de munitions ?
— Déjà plus de… Quoi ? Je… Qu’est-ce que tu veux que je te dise, au juste ? Il te faut une demande en mariage, peut-être ?
— Putain, on est juste en train de baiser, on n’en est pas à se passer la corde au cou. Regarde, j’ai encore envie, moi ! ajoute-t-elle en attrapant une de mes mains pour la coller contre son intimité.
Self-control, Snow, self-control ! Envie ou pas, on ne peut pas recommencer, on a déjà suffisamment merdé…
— Eh bien, il va falloir apprendre la frustration, marmonné-je en récupérant ma main, on a de la route à faire et des gosses à protéger, Madame la Ministre.
— On n’est pas à quelques minutes près, Mathias, susurre-t-elle à mon oreille en agitant ses seins devant mes yeux.
— Ysée, ça suffit, la sommé-je. Ne complique pas les choses ! Ce qui s’est passé… n’aurait jamais dû arriver. On n’est pas en vacances, mais en mission, et ça, aussi agréable que ça ait pu être, ça n’a pas sa place dans une mission. Habille-toi, les filles doivent nous attendre pour le petit déjeuner.
— Monsieur a tiré son coup et c’est bon pour lui ? se moque-t-elle alors que sa main se pose sur mon sexe qui frémit sous ses doigts. On dirait pourtant que certaines parties de ton corps aimeraient remettre le couvert, non ? Tu n’as pas autant résisté, tout à l’heure.
Bon sang, elle va m’achever. Comme si l’idée de remettre le couvert n’était pas déjà assez présente dans ma tête, merde ! Je ne sais pas où je trouve la force de résister, honnêtement, parce qu’elle est là, à quelques centimètres de moi, encore nue, ses tétons fièrement dressés dans ma direction et cette marque de morsure dans son cou qui me donne envie d’y replonger ma bouche dans la seconde qui me nargue… Fait chier, j’aurais dû la garder dans mon pantalon jusqu’au bout, maintenant que j’y ai goûté…
— Arrête, Ysée, c’est bon. On s’est amusés, maintenant il faut se reconcentrer, assuré-je en reculant de deux pas. La mission, c’est la priorité.
— Ah oui, j’ai oublié ce qui t’excitait. Il est où, ton flingue ? demande-t-elle en me tournant le dos, m’offrant la vue de ses fesses magnifiques.
Je ferme les yeux et lui tourne même le dos, histoire de ne pas lui flanquer une fessée et la coller à quatre pattes. Je confirme et entérine l’idée qu’elle est aussi bandante qu’insupportable. Définitivement.
— Est-ce que tu pourrais retrouver ton sérieux, maintenant, s’il te plaît ? Et tes fringues ? La pause est finie, Ysée, je te rappelle qu’on a la Mafia ou des rebelles au cul qui pourraient être gentiment en train d’encercler la grange pendant que tu nous tapes une nouvelle crise d’ado, m‘agacé-je.
— Tu crois qu’une ado t’aurait fait jouir comme ça, Beau Blond ? Mais tu rêves, là.
Elle se saisit enfin des vêtements dans ma main mais au lieu de les enfiler immédiatement, elle se retourne et se baisse pour m'offrir une vision de son cul qui me donne envie de me damner.
— Faut croire que tu as le corps d’une adulte et la maturité d’une ado, alors, marmonné-je en récupérant mon arme au sol.
Bon, ok, je suis un enfoiré. Mais elle cherche, là. Est-ce qu’un orgasme lui fait tout oublier ? On n’est quand même pas sur une plage en Corse à se dorer la pilule, là.
— Enfoiré. Tu es juste là pour profiter, hein ? Putain, moi qui croyais que tu avais aimé ça… Va te faire foutre, et n’espère pas remettre ta queue en moi, j’ai ma fierté, quand même.
Oh que oui, j’ai aimé ça, mais cette furie risquerait de m’attacher à un arbre pour remettre le couvert si je le lui disais… Ou alors, elle le ferait pour me couper les couilles, parce que je pense qu’elle est vraiment vexée, là. Mais c’est mieux comme ça. Mieux vaut, pour la mission, qu’elle me fasse la gueule plutôt qu’elle roucoule. Oui, bonne solution.
— Je te laisse te rhabiller, je rentre voir où en sont les filles, lui indiqué-je après avoir observé les alentours. Ne traîne pas trop, elles vont s’inquiéter de ne pas te voir avec elles.
— Oui, Papa, répond-elle en prenant une toute petite voix. Promis, je ne le ferai plus !
— Fallait le dire si ton fantasme c’était de te taper un Sugar daddy, j’aurais peut-être pu jouer le jeu.
Je grimace à cette idée et la plante sur place, déjà épuisé par cette journée. Franchement, elle a vraiment un côté insupportable, quand elle s’y met. Je veux bien être chiant de mon côté, mais elle tape le record. La Ysée de ce matin n’a rien à voir avec celle de cette nuit et je crois que ce qui m’agace le plus, c’est de ne pas parvenir à comprendre laquelle est la plus franche. Est-ce qu’être insolente comme ça lui permet de se protéger ? En tous cas, elle me rend dingue, et ça m’agace de me poser toutes ces questions sur elle. Je devrais m’en foutre royalement, au lieu de quoi je rumine en regagnant la grange. Et le pire, c’est que si je n’écoutais pas mon cerveau militaire, je ferais demi-tour pour me perdre à nouveau en elle. Et ça, ça me fout en rogne.
Focus sur la mission. Julia va me buter si je merde. Après m’avoir fait souffrir longuement, jusqu’à ce que je la supplie de m’achever, au minimum. Déjà que j’ai foutu en l’air le “no zob in job” une fois, si je replonge, je suis un homme mort.
Quand j’entre dans la grange, les filles ont fini de manger et Lila est occupée à faire une natte à sa petite sœur tandis que Flo m’observe en silence. Je me rends compte qu’il m’a agacé comme rarement, ce matin, à profiter de la situation, planqué dans son coin. Ok, j’ai sans doute fait pire… Du moins, je suis allé plus loin que lui, mais au moins, Ysée savait que j’étais là, et c’est elle qui m’a sauté dessus. J’avoue que je n’ai pas demandé mon reste, mais on se tourne autour depuis tellement longtemps qu’il était évident qu’à un moment donné, on allait craquer… Déjà, quand elle s’est déshabillée devant moi, dans la maison, et s’est fait un petit plaisir solitaire sous la douche, porte ouverte, ça aurait pu partir en vrille. Il faut croire que je n’étais pas assez en manque à ce moment-là pour la rejoindre et la faire gémir moi-même.
Annotations