Prologue : Aux Baumettes
Les Baumettes, Marseille, le vendredi 8 mars 1974
Le chemin de ronde des matons. J’entends les bruits de leurs bottes résonner sur le sol, le cache des judas métalliques qui pivotent. Et même dans l’obscurité nauséabonde de ma cellule qui suinte l’humidité et la crasse, même si je ne le vois pas, je sens le regard de l’un de ces connards de gardiens se poser sur moi lorsqu’il vient s’assurer que je suis toujours sagement allongé sur ma couche, enroulé dans mon drap trop crade.
Pour eux, pour ne pas qu’ils m’emmerdent, je fais semblant. Semblant de dormir. Ils ne savent pas que mes nuits sont sans sommeil depuis toi. C’était il y a presque deux ans, sur la route des crêtes. Pas un jour ne se passe sans que je revive la scène, pas un jour sans que je te demande à nouveau pardon. Mais il est trop tard, je le sais. Pourtant, je n’ai jamais voulu te faire de mal, à toi qui as si souvent pansé mes plaies ; non, je voulais juste t’aimer. Seulement, ils ne l’ont pas compris, personne ne l’a compris…
***
— A la question « L’accusé a-t-il violé puis tué Salomé Dellière ? », il a été répondu oui…
***
L’abattement et la colère de ton père à mon encontre m’ont sans doute desservi aux assises, mais je ne peux pas lui en vouloir ; il a perdu sa fille unique, la chair de sa chair, assassinée par celui qu’il considérait comme un fils. Son fils.
Tu vois, Salomé, je donnerais n’importe quoi, n’importe quoi pour revenir en arrière. N’importe quoi pour tout recommencer. Avec toi…
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