Chapitre 7 - Une invitation

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Jaelith poussa la porte de la grande maison et se retrouva dans l'immense hall remplie de caisses de marchandises prêtes à être livrées.

— Grand-père ?

Sa voix raisonna dans la pièce, mais elle n'eut pas de réponse. La jeune femme soupira. Elle aurait tellement voulu avoir cette discussion avec son grand-père au sujet de sa relation avec Freyki. Elle avait besoin de ses lumières et lui seul pouvait l'éclairer sur ses choix. Le seigneur Cederman apparut en haut du grand escalier. De sa voix fatiguée, il interpella sa petite fille.

— Enfin de retour Jaelith. Je pensais que tu m'avais oublié.

Le vieil homme était très heureux de la retrouver. C'était son unique petite fille, la fille de Charis (qui était le véritable nom de Palia), et il l'adorait plus que tout.

— Cela fait combien de temps que tu es arrivée à Goldrynn ?

Jaelith grimpa les marches quatre par quatre pour rejoindre son grand père le plus rapidement possible et le prendre dans ses bras.

— Je suis revenue aujourd'hui, le bateau est arrivé il y a tout juste une heure au port.

— Et ce n'est pas l'homme de ton cœur que tu vas voir en arrivant ?

— Freyki m'attendait. J'ai eu le temps de le voir rapidement.

La jeune femme recula et baissa la tête avant de continuer :

— En fait, je voulais absolument discuter avec toi avant de retourner le voir.

Le seigneur Cederman était surpris par ces paroles.

— Je me demande de quoi tu peux vouloir discuter, et qui soit plus important que celui que tu aimes ?

— C'est de lui que j'ai besoin de discuter.

Il y eu un silence, et le vieil homme l’invita à s'assoir sur un fauteuil dans le salon.

— Avant que je ne parte pour Silverlake, Freyki... Le roi m'a fait sa demande.

Le vieil homme eut un large sourire à cette évocation.

— N'est-ce pas une excellente nouvelle ?

Jaelith secoua la tête.

— Pas vraiment non.

— Qu'est-ce qui te tracasse à ce sujet ?

La jeune femme respira profondément avant de répondre.

— Et bien... Je t'avais déjà dit que je ne me sentais pas prête à devenir reine.

— Oui, je me rappelle que nous avons eu cette discussion bien avant ton départ.

— En fait... C'est encore pire que ce que je pensais. J'ai peur. J'ai peur que toute ma vie ne bascule si je lui dis oui.

Le vieux marchand comprenait la détresse de sa petite fille. Ses paroles se voulurent rassurantes :

— Jaelith... Tu n’es pas obligée d'accepter dans l'immédiat. Il ne va pas t'en vouloir parce que tu remets à plus tard ce mariage. Il comprendra, j'en suis sûr.

La jeune femme était un peu rassurée. Pourtant, il lui faudrait affronter le regard de Freyki et sa tristesse lorsqu'elle lui annoncerait qu'elle n'était pas prête. C'était pire que toutes les batailles qu’elle avait endurées. Elle se sentit à cet instant très fatiguée.

— Je vais me reposer dans ma chambre. Je n'en ai pas encore eu l'occasion depuis que je suis revenue à Goldrynn.

— Fais donc mon enfant.

Jaelith allait sortir du salon, mais le vieil homme l'interpela.

— Attends…

Il se leva avec difficulté et s'approcha de sa petite fille. Il posa ses mains sur les épaules frêles de cette dernière.

— Je vais envoyer une invitation au roi pour ce soir. Nous parlerons de tout ça ensemble, tu es d'accord ?

Le regard triste de la jeune femme ne pouvait se détacher du sien. Le marchand attendait une réponse. Qu'elle soit positive ou négative, peut lui importait, mais il voulait une réponse quand même. Cela lui permettrait de comprendre un peu plus l'état dans lequel se trouvait la jeune femme.

— Oui... Pourquoi pas ?

Les mots étaient sortis tout seul de sa bouche, de manière instinctive. Tout au fond d'elle, elle désirait passer du temps avec Freyki. Mais savoir qu'il allait sûrement réitérer sa demande la mettait mal à l'aise. Elle sortit du salon et se dirigea vers sa chambre qui se trouvait à l'étage. La porte grinça lorsque Jaelith y entra et elle fut heureuse de retrouver cet endroit familier. Elle retira ses affaires de voyage et s'allongea sur le lit avant de s'endormir.

— Une invitation du Seigneur Cederman ? Pour ce soir ?

Freyki relisait la lettre que lui avait apportée le serviteur de la maison du noble marchand. Ce dernier se retira rapidement, laissant le souverain perplexe.

— Peut-être dois-je prendre cela pour une occasion de faire ma demande de manière officielle.

L'homme à la cicatrice s’était mis à sourire malgré lui. Il allait réitérer sa demande en mariage. Le seigneur marchand n'y verrait pas d'inconvénients. Ce dernier connaissait la relation qu'il entretenait avec sa petite fille et ne s'y était jamais opposé. Il n'y avait aucune raison pour que la demande en mariage soit refusée.

L'après-midi touchait à sa fin, et il courut à sa chambre pour se changer. Il enfila une tunique propre et blanche, une ceinture en cuir de dragon (le genre d'objet que Feiyl détestait mais qui était très résistant) et prit une épée courte qu'il y accrocha. Freyki ajusta sa tenue face au miroir et prit la route de la demeure du seigneur Cederman, le cœur léger.

Jaelith s'étira doucement lorsque son grand père ouvrit la porte de la chambre. Il demanda d'une voix douce :

— Tu es prête ?

La jeune femme secoua la tête.

— Je viens tout juste de me réveiller. Il est si tard que ça ?

— Tu devrais faire rapidement un brin de toilette et t'habiller. Ton prince charmant ne devrait pas tarder à venir.

Tandis que le marchand refermait doucement la porte, Jaelith fouilla dans le coffre de vêtements qui se trouvait au pied de son lit. Elle cherchait une robe en particulier. Au bout de quelques minutes, elle la trouva enfin.

Ce fut l'un des domestiques du seigneur Cederman qui vint ouvrir et qui accueillit le roi. L'homme s'inclina devant lui.

— Si vous voulez bien me suivre, votre majesté.

Freyki hocha la tête et le suivit. Il retrouva le vieil homme dans le grand salon. Ce dernier était assis sur un fauteuil et se releva avec difficulté pour le saluer.

— Mon roi, cela me fait vraiment plaisir de vous recevoir ce soir.

— C'est un honneur pour moi d'avoir été invité en votre demeure.

Le roi loup n'osa pas poser la question qui lui brûlait les lèvres : où était-elle ? Le marchand l'invita à prendre place sur le fauteuil à côté du sien. Se doutant fortement de ce que voulait lui demander Freyki, il le prit de court.

— Jaelith se prépare. Elle était très fatiguée de son voyage. Elle n'apprécie pas plus que ça les voyages en mer.

— J'imagine. De plus, le chemin est long entre Silverlake et la capitale.

Le seigneur Cederman voulait profiter du fait que sa petite fille n'ait pas encore fait son apparition pour avoir une discussion avec le souverain. Il se racla la gorge et prit la parole.

— Jaelith m'a dit que vous lui avez fait votre demande.

L'homme à la cicatrice fut surpris. Les yeux écarquillés et remplis d’espoir, il demanda :

— Elle vous l'a dit ?

— Oui, elle m'en a vaguement parlé...

— Et elle vous a aussi donné sa réponse ?

Freyki était pendu aux lèvres du vieil homme. Son cœur bondissait de joie dans sa poitrine. Mais ses espoirs allaient vite être anéantis.

— D'une certaine manière, je serais très heureux de vous accorder la main de ma précieuse petite fille. Mais vous devez comprendre qu'elle ne se sent pas prête pour cela.

Le roi loup se releva, visiblement énervé.

— Pas prête ? Quand le sera-t-elle ?

— Calmez-vous et essayez de vous mettre à sa place mon roi. Imaginez-vous menant une vie normale, lorsqu'un jour la personne la plus puissante du pays vous demande de gouverner tout un peuple à ses côtés. Quelle serait votre réaction ?

Il n'avait pas pensé à cela. Freyki n'avait vu que son bonheur personnel. Avoir Jaelith à ses côté en tant que femme et mère de leurs futurs enfants. Il n'avait rien vu d'autre pour elle. L'homme à la cicatrice se rassit et se prit la tête entre ses mains.

— Je ne veux pas qu'elle soit malheureuse... Je veux juste concrétiser notre union.

— Laissez-lui le temps. Elle ne s'envolera pas et restera à vos côtés, n'en doutez pas un seul instant.

Le souverain entendit alors la porte du salon s'ouvrir lentement. Jaelith entra. L'homme à la cicatrice la fixa, ébahit. La jeune femme avait enfilé une robe simple d'un bleu profond aux longues manches. Son seul bijou était le pendentif de Fereyan qu'elle portait au cou. Elle avait remonté ses cheveux en un gros chignon. Elle était superbe. Elle s'inclina devant son roi en une gracieuse révérence. Freyki se leva de son fauteuil et s'approcha d'elle pour lui prendre la main et y déposer un baiser. Il plongea son regard dans celui de la jeune femme qui lui demanda de sa voix douce :

— Est ce que tu penses que ça me va bien Freyki ?

— Tu es magnifique.

La réponse était sortie naturellement. Elle avait rougit sous le compliment.

— Tu le penses vraiment ?

— Je tuerai tous ceux qui diraient le contraire.

Jaelith su à ses yeux qu'il était vraiment capable d'une chose pareille. D'un côté, elle était charmée, mais de l'autre... L'affection que Freyki lui portait, à la limite de la folie, l'effrayait un peu.

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