Chapitre 34 - Soulagement
Il ne fallu que quelques heures de marche pour atteindre le village d'Ergon. Elrynd avait très rapidement eut vent du retour de son roi, ainsi que de l'arrivée de celle que tous appelait "la dame au dragon". Il avait vu Freyki discuter avec elle, au milieu du camp. Après s'être brièvement figé en le voyant, le général courra vers elle et la prit dans ses bras.
— Jaelith ! Je te croyais morte ! J'ai cru que je ne te reverrais plus ! J'ai...
La jeune femme le repoussa violemment, les yeux remplis d'incompréhension et de terreur. Elle recula. Le roi loup posa sa main sur l'épaule d'Elrynd en secouant la tête.
— Ça ne sert à rien... Elle a perdu la mémoire...
Jaelith regarda le paladin de ses grands yeux bleus. A cet instant, Elrynd se sentit véritablement triste. Tout ce qu'ils avaient vécus ensemble avait disparu ?
— Je suis désolée...
La jeune femme s'inclina respectueusement. Quelque chose lui disait qu'elle avait connu cet homme, mais rien de plus. Pas un seul souvenir n'avait refait surface.
— Ce n'est pas grave.
Le général n'en pensait pas un seul mot. Le visage décomposé, il se tourna vers son souverain.
— Maintenant que vous êtes revenu, quel sont vos ordres ? Doit-on attaquer ?
— Non.
Freyki se gratta le menton.
— Non... Je pense que les Drinvels viendront d'eux même. Avec leur chef. Si nous nous débarrassons d'eux, nous n'aurons aucun problème pour parlementer avec l'Impératrice. Nous avons quelqu'un avec nous qui pourrait faire pencher les choses en notre faveur.
Son regard se porta sur la semi elfe. Elle parut surprise.
— Moi ? Vous pensez vraiment qu'elle accepterait de parlementer avec vous grâce à moi ?
— Si vous êtes notre otage, elle n'a aucune raison de nous attaquer.
— Votre otage ? Mais je croyais que...
— Façon de parler bien entendu. Depuis le temps que vous me côtoyer, vous pensez sincèrement que je vous garderais ici contre votre volonté ?
La jeune femme lui fit un léger sourire. A cet instant, elle eut un vertige et manqua de tomber sur le sol. Heureusement pour elle, Freyki s'était précipité vers elle. Inquiet, il appela :
— Un prêtre ! J'ai besoin d'un prêtre ! Vite !
Sidan Lokliar tournait en rond dans la grande salle vide. Elle était inquiète. Même si elle n'appréciait pas vraiment sa nièce, elle était la seule chose qui lui restait de son frère. L'elfe s'arrêta devant la grande fenêtre. La grande forêt s'étendait à perte de vue. Pourquoi Jaelith avait-elle décidé de partir ? Pourquoi avait-elle emmené avec elle cet humain dont elle ne devait plus rien savoir ?
— Sa mémoire devait être complétement effacée. C'est étrange... J'en parlerais à Enki. C'est lui qui s'en est chargé après tout...
L'Impératrice se tourna vers la grande porte. Quelqu'un venait de frapper.
— Entrez !
Un soldat s'approcha et s'inclina respectueusement avant de prendre la parole.
— Nous avons de mauvaise nouvelles votre altesse.
— Des mauvaises nouvelles ?
Est-ce que Jaelith avait été tué ? Sidan sentit les larmes monter à cette pensé, mais se retint. D'une voix froide, elle demanda :
— Quelles nouvelles ?
— Il s'agit de votre nièce...
L'Impératrice retint un sanglot et détourna la tête.
— Elle est l'otage des humains.
Intérieurement, elle poussa un soupir. Si elle était otage, il y avait alors un moyen de la récupérer. Le prix en serait peut être élevé, mais elle était prête à tout pour garder la jeune fille à ses côtés.
— Que demandent-ils en échange de sa vie ?
— Nous n'avons reçu aucune demande pour le moment.
Sidan pesta. Elle se demandait bien si les humains allaient lui réclamer de l'or. Leurs avarices étaient sans limites.
— C'est tout ce que vous avez à me dire soldat ?
L'elfe acquiesça d'un hochement de tête. L'Impératrice lui fit signe qu'il pouvait partir. Quelque chose n'allait pas. Un étrange sentiment lui enserrait le cœur. Il fallait qu'elle ait une discussion avec le chef des Drinvels.
Allongée sur un lit de fortune, la jeune femme se sentit mieux. Son visage se tourna vers Freyki.
— Merci pour tout… Je ne serais pas ici sans vous.
La douce voix de Jaelith avait résonnée dans la salle. Le balafré lui fit un léger sourire.
— Je n'allais quand même pas vous laisser souffrir à terre.
Le prêtre qui avait été appelé auscultait la semi-elfe.
— Je ne vois là aucune maladie... Cela vous arrive souvent ce genre de vertiges ?
— Depuis quelques temps, oui. J'ai souvent la tête qui tourne, des nausées, ce genre de désagréments. Ca ne dure jamais très longtemps.
— Vous avez besoin de repos. Beaucoup de repos. Et si votre état le permet, n'hésitez pas à prendre l'air pendant quelques minutes.
Jaelith remercia le prêtre qui fit signe aux personnes présentes de le suivre hors de la petite salle. L'homme à la cicatrice était inquiet. À peine la porte s'était-elle refermée qu'il demanda :
— Est-ce que c'est grave ?
— Ce n'est pas une maladie.
— Alors qu'est-ce que c'est ?
Freyki était au bord de la crise de nerf. Le prêtre plongea ses yeux dans les siens avec un large sourire.
— La dame paladin attend un heureux évènement.
Tous s'étaient retournés vers le souverain. Ce dernier n'avait rien dit sur le coup. Il avait doucement secoué la tête, comme pour se réveiller d'un rêve.
— Jaelith... Jaelith est enceinte ?
Le prêtre confirma.
— Oui. Voilà la raison de ses vertiges et nausées.
Le roi loup n'en croyait pas ses oreilles. Il allait être père. Ce n'était pas un rêve. C'était la réalité. Une main se posa sur son épaule. C'était celle d'Elrynd.
— Toutes mes félicitations.
La voix du paladin tremblait légèrement d'émotion. Son cœur souffrait, mais il s'y attendait. Le prêtre prit congé.
— Si vous avez besoin de moi, n’hésitez pas à m'appeler…
Freyki le remercia en lui serrant joyeusement la main. Puis il s'était tourné vers ses compagnons.
— Je vais rester avec elle.
— Très bien… Nous vous tiendrons au courant s’il se passe quoi que ce soit. Acquiesça Elrynd avant de partir.
Le balafré entra dans la petite salle où se trouvait la jeune femme et referma doucement la porte derrière lui avant de s’assoir sur une chaise à côté du lit. Les yeux de Jaelith s’étaient tournés vers lui. D'une voix douce, il lui avait dit :
— Vous devriez dormir un peu… La route a été longue depuis la cité d'Argent.
— Je le sais bien. Mais, et vous, Freyki ? Vous n'allez pas vous reposer ?
La voix de Freyki s’était adoucie.
— Je vais bien, ne vous inquiétez pas pour moi.
Le silence s'installa entre eux. Freyki aurait voulu partager sa joie avec celle qu'il aimait, mais il ne pouvait pas. Comment le prendrait-elle ? Il était perdu dans ses pensées quand la voix de Jaelith résonna.
— Freyki... Pourquoi m'avoir aidé à fuir la cité d'Argent ?
— J’ai mes raisons…
— Lesquelles ?
Tous deux se regardaient droit dans les yeux à présent. Le roi loup avait relevé la tête, doucement.
— Tu es la femme que j’aime depuis toujours…
Il avait dit cela sur un ton grave, ses yeux étaient fixés sur ceux de la jeune femme. Jaelith n’avait jamais pensé que sa vie avait un sens pour cet homme. Ce dernier avait rapproché son visage du sien, et avait doucement posé une main sur la joue de la jeune femme.
— Tu es la seule qui habite mon cœur. C'est toujours à toi que je pense lorsque je ferme les yeux.
Sa voix n’était qu’un murmure.
— Mais tu as tout oublié.
Jaelith avait à présent le visage empourpré. Il avait lui avait ouvert son cœur, et elle repensa à tout ce qui s’était passé jusque-là.
— Y a-t-il un moyen de récupérer tous mes souvenirs ?
— Je ne sais pas.
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