L’apprenti écrivain
Après ma déconvenue avec mon danseur, je me tins éloignée un temps de toute interaction avec mes followers. Mais, l’été venu, alors que je publiais une adaptation d’une saga vampirique gay pleine de sang et stupre, j’eus un nouveau contact. C’était un étudiant en psycho australien, bisexuel et apprenti écrivain. Et, joli comme un coeur.
J'hésitai avant de reprendre le jeu. Je me sentais malsaine, limite prédatrice. Par ailleurs, je pensais que j’étais la seule fille sur terre à être intéressée par ce qui peut se passer entre deux hommes. Je sus bien après, en réalisant quelques recherches, que c’était loin d’être le cas. Oui, grâce à Tumblr et Twitter, j’ai compris que je n’étais pas la seule « déviante » sur terre. Nous sommes nombreuses. Nous cachant seulement plus que ces hommes qui sont attirés par les lesbiennes. Le milieu du porno gay l’a bien compris puisqu’il fait l’essentiel de sa croissance avec les femmes. Il les cajole. C’est un public fidèle et qui paie.
Après ce bref moment d'hésitation, la curiosité redevint la plus forte. J'entamai alors les travaux d'approche. Ce que je nomme « ma méthode ». C’était un mélange d'humour, de mots gentils et de sous-entendus sexy. Rapidement, il voulut en savoir plus à mon sujet. Mais, je lui dis tout de go, comme je l’avais décidé, que je ne répondrai rien de vrai sur mon genre, mon âge et mon nom. Je pense que ce mystère, pour un jeune écrivain comme lui, avait un puissant pouvoir d’attraction. Pour les autres questions, j’étais moi : geek, aimant écrire pendant mes loisirs, cinéphile et frenchy. Je me doute que, de l’autre côté de la terre, je devais présenter un profil attractif.
Quant à Peter, mon petit australien, il était certes bi, mais vierge… Passé la vingtaine, il en ressentait comme une sorte de honte. Mais, grâce à internet, il avait capté toute la théorie à grand coup de téléchargements.
Dans mes rares moments de lucidité, je voulais me convaincre de renoncer à cette nouvelle aventure virtuelle. Mais, après quelques jours, je reçus de lui la plus belle des déclarations d’amour. Incroyablement bien écrite et touchante. C’était trop tard.
Pour tempérer sa flamme, je lui promis qu’il n’y aurait pas de happy end mais, seulement un océan de larmes. Je lui rédigeai un poème en réponse autour de ce thème. Je voulais qu’il soit prévenu avant de se lancer. Cela ne sembla pas le perturber. Peut-être ne voulut-il pas y croire ? Nos âmes étaient si parfaitement assorties. Comme connectées.
Débuta alors, une expérience gay virtuelle et littéraire qui dura plus d’une semaine. Un jeu de rôles sur Internet. Mon jeune compagnon de jeu était prêt à tout. Et, j’envie le mec qui profite de ça aujourd’hui dans la réalité. J’espère qu’il est aussi exceptionnel qu’il l’a écrit sur son blog.
Au fur et à mesure que nos échanges se libéraient, je prenais de l’assurance dans ma rédaction de textes érotiques. Jusque là, dans mes romans, les scènes de sexe étaient remplacées par des "..." embarrassés. Maintenant, je pourrais rédiger des scénarios complets pour des films pornos gay (si, si).
Un jour, il m'écrivit : "You are my porn". Il ne faut pas être voyante pour imaginer ce à quoi il s’occupait en lisant mes textes. Curieusement, je me sentis d’un coup sale. Comme si j’avais prostitué mon « art » au bénéfice de l'éjaculation facile (oui je sais...).
Je décidai d’en finir au plus vite, car je me sentais de plus en plus mal. Et les nuits écourtées me pourrissaient la vie réelle. Dire que j’eus assez de courage et d'inspiration pour encore lui écrire de jolis poèmes. Tout comme ce sonnet d'adieu si beau, si triste.
Mais, PATATRAS ! Passé le choc de la vérité, voilà qu'il me demanda de continuer comme avant. De faire « comme si ». J'étais devenue une A.D.D.I.C.T.I.O.N. Une drogue qui le rendait « dur » (NDLR : je n’ai pas pu résister). Une fois encore, j'aurais dû tout arrêter. Mais, j'avais perdu tout sens de la réalité.
Ici, sur le net, J’ETAIS Julien. La petite trentaine sexy. Artiste torturé et gay dominant. Julia avait disparu corps et âme. En effet, si j’avais pu changer mon nom ici, pourquoi pas mon genre et mon âge ? Dans cet autre monde, je pouvais être QUI je voulais. Si je n’en sortais pas.
Le problème était que dans la vie réelle, j’avais AUSSI changé. Physiquement. J’arborais un total look black, des bijoux masculins et une attitude très sûre de moi, très virile. Je ne jouais plus. J’étais.
De son côté, Peter avait lui aussi changé. Il était moins angoissé, plus confiant en lui même. Cela se voyait sur son blog. Tellement confiant, qu’un jour je reçus une série de photos de lui, nu. Je ne lui avais rien demandé. Je constatai qu’il avait un beau petit cul poilu et ferme ainsi qu’une jolie queue de taille standard. J’ouvris un dossier sur mon ordinateur pour stocker ses clichés. Bientôt, j’en aurais toute une collection.
Mais, dans mes - rares - moments de lucidité, je savais que cette histoire ne pouvait pas durer. Même si vivre cela était inespéré. C'était l'accomplissement de toute une quête débutée à l'adolescence. Livres, articles, films, séries. J’avais tout lu et vu. Comme si tout ce temps passé à essayer de savoir et de comprendre n'avait qu'une finalité : cette rencontre exceptionnelle.
Passée la période estivale, j’eus moins de temps libre et je lui proposai une solution alternative pour poursuivre nos échanges. Il s’agissait d’écrire à deux un roman M/M avec comme héros nos personnages de jeu. Je lui envoyai un premier chapitre titré « L’étudiant » et il devait poursuivre. Cette solution avait pour intérêt d’utiliser notre passion pour l’écriture afin d’entretenir la flamme du désir qui continuer de brûler en nous.
Mais, à la fin du roman, je savais que chacun devait suivre son propre chemin. Il devait avancer. Tracer sa route loin de moi. Alors, je cherchai parmi mes followers gays australiens celui qui pourrait bien l'intéresser. Et je tombai sur un certain JD. Il était jeune et joli, vivait à proximité et semblait peu farouche voire expérimenté. Je mis les deux garçons en contact via un stratagème de marieuse.
Mon côté Emma l’entremetteuse fit des merveilles. Cela colla tellement bien entre eux que, quelques semaines plus tard, je fus congédiée via un simple message. En fait, l’histoire ne dura que six mois entre eux. Un dépucelage et une rupture sentimentale plus tard, il revint vers moi un jour de Saint Valentin. Nous étions simplement devenus de bons amis. Deux apprentis écrivains. Avec juste un passé d’intimité maintenant révolu.
A ce jour, nous sommes toujours en contact. Ce fut le seul dans la communauté qui comprit ma quête d'identité et m'encouragea. Toujours.
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