Chapitre 5 : Le grand saut dans le vide (fin)
Après le vol d’un baiser, que l’on soit un homme, une femme, que l’on embrasse l’un ou l’autre, normalement la réaction naturelle serait à minima la surprise ou à l’extrême un retour assez sévère. Dans mon cas, rien de tout cela. Mais à ma plus grande surprise, Alice me rendit timidement mon baiser. De ce fait, ce fut moi qui fut assez surprise et je manquai de tomber quand je retirai mes lèvres avec rapidité.
À présent, le silence remplissait la pièce et aucune d’entre nous n’osait décrocher un mot. Étrange, alors que c’était moi qui avait initié le baiser. Je ressentais un certain malaise suite à son acte et je n’arrivais pas à me réjouir. Mais puisque le silence me pesait énormément, je décidai alors de me jeter dans le vide:
« Pourquoi m’as-tu embrassée en retour ?
Elle m’observa longuement avant de répondre.
— N’est-ce pas ce que tu désirais ? me demanda-t-elle surprise.
Je me mordis la lèvre inférieure. Evidemment, pour elle, embrasser ne signifiait pas grand chose. J’avais honte au plus profond de moi. J’étais comme un petit enfant.
— Tu m’aimes, n’est-ce pas ? me demanda Alice, le visage inquiet. C’est pour ça que tu m’as embrassée ?
Je rougis et répondit affirmativement avec un petit signe de la tête. Alice baissa les yeux comme si elle réfléchissait à toute vitesse puis elle les planta dans les miens.
— Je suis désolée, se confia-t-elle, je ne peux pas tomber amoureuse de toi.
Je sentis un court moment les battements de mon coeur s’arrêter. Bien que je m’y étais préparée, je n’arrivais pas à accepter ses mots.
— Tu n’as pas à t’excuser, répondis-je gênée par mon propre égoïsme, mais comme on dit l’amour est profondément égoïste.
J’allais récupérer mes affaires pour partir, honteuse, quand elle me serra dans ses bras par derrière.
— Je suis désolée de ne pas pouvoir tomber amoureuse de toi, mais si tu le désires, je peux coucher avec toi.
Je me figeai sur place, incapable de bouger devant une telle révélation. Mes pensées se bousculaient et je n’arrivais pas à sortir un seul mot. Je sentis la rage monter en moi. Coucher ensemble alors qu’elle ne m’aimait pas? Quelle blague! Je me retournai et la repoussai.
— Désolé, je ne pense pas que ta proposition soit appropriée ! » répondis-je avec de la tristesse dans la voix.
Sans un regard en arrière, je quittai la pièce et partis sans demander mon reste.
***
J’avais passé la semaine à recommencer de nouveau mon projet d’art. J’étais énervée contre moi-même, contre elle-même pour m’avoir fait une telle proposition, mais je n’arrivais pas à décharger toute la colère que je contenais et ni mes amis ni la peinture que j’adorais ne m’avaient apaisée.
C’est un mois après l’évènement que je reçus un message de sa part, me demandant de lui parler et de l’écouter afin qu’elle puisse m’expliquer son geste et sa drôle de proposition. Je dois bien avouer que j’ai mis au bien 24h pour lui répondre. Au fond de moi, j’avais cette envie de la comprendre mais en même temps, j’avais ce drôle de sentiment qui me disait de ne pas y aller.
Malgré ma réticence à m’y rendre, je lui envoyai une courte réponse et retournai à mes occupations jusqu’au rendez-vous.
***
Bien que je n’étais pas enclin à me rendre à ce rendez-vous, je m’étais tout de même dépêchée et avais pressé le pas sans aucune raison. C’est donc essoufflée que j’arrivais, en avance, au café. Le dernier client de la journée sortit quand j’entrai et fut même surpris de voir une personne entrer aux heures de fermeture. Une fois à l’intérieur, je cherchais des yeux Alice et la vis occupée à débarrasser la table que le dernier client venait de quitter. Quand elle me remarqua debout devant la porte d’entrée, elle me désigna d’un signe de la tête une table que je rejoignis sans tarder. Elle me rejoignit quelques minutes après et s’assit en face de moi en déposant ma commande habituelle devant moi. Je portai alors la tasse à mes lèvres pour ne pas devoir débuter la conversation et me laissa bercer par la douce saveur du cappuccino.
« Je ne sais pas par où commencer, me confia-t-elle peu rassurée, et pourtant j’y ai réfléchis depuis un mois.
Sa voix tremblait et je reposai alors la tasse pour soutenir son regard.
— Je suis désolée d’avoir réagi ainsi, mais je pensais que ça allait te faire plaisir bien que je ne puisse pas t’aimer comme tu le veuille. En fait, je ne peux pas tomber amoureuse de toi…
— Ça j’avais bien compris, tu m’as fait venir ici juste pour me dire ce que je savais déjà ? lui demandai-je, une pointe d’agacement dans la voix.
— Bien sûr que non ! s’écria-t-elle.
Je fus surprise par son ton et l’interrogeais alors du regard.
— Ce n’est pas que je suis pas amoureuse de toi, mais que je ne peux pas tomber amoureuse…
Devant mon air incrédule, elle se mit à paniquer mais se reprit rapidement.
— Tu as déjà entendue le mot « aromantisme » ? me demanda-t-elle timidement.
— Non, désolé!
— C’est quand tu ne peux pas ressentir de sentiments amoureux, m’avoua-t-elle d’une petite voix.
Pourquoi me racontait-elle tout ça ? Attends, elle a bien dit sentiments amoureux ? Jouait-elle avec moi ? Je ne savais plus si je devais la croire.
— Imaginons que tout ce que tu me dises soit vrai, ne pas ressentir de sentiments amoureux, est-ce seulement possible ? Alors pourquoi m’as-tu demandée de coucher avec toi ?
— Être romantisme ne signifie pas que tu doives vivre seule ou bien que tu ne puisses pas avoir de relation sexuelle. Je ne sais pas si tu vas réussir à comprendre, mais je t’aime bien, suffisamment pour pouvoir coucher avec toi.
— Tu m’aimes et tu peux coucher avec moi, mais pourtant tu n’es pas amoureuse de moi ? Je n’y comprends rien ! m’écriai-je agacée.
Décidément, je n‘arrivais pas à la comprendre. Et cela me rendait folle.
— Tu as pourtant Martin et l’autre gars qui était avec toi au bar !
Elle soupira et baissa les yeux.
— Disons qu’on entretient des relations assez particulières si tu veux savoir, me répondit-elle sans lever les yeux.
— Tu couches aussi avec eux ?
— Parfois oui… mais ne te trompe pas, ils sont parfaitement au courant de ce que je ressens pour eux. C’est comme un accord entre nous si tu veux.
— Tu es en train de me dire que même si je passe le pas avec toi, rien n’en sortira? demandai-je d’une voix tremblante.
— Si, une relation vraiment particulière, répondit-elle d’un petit sourire charmant à vous faire fondre.
Ah c’était vraiment de la triche! Elle me prenait de court et malgré les derniers évènements je n’arrivais pas à la détester ni à couper les ponts. Elle était tout ce que je désirais être. Au fond de moi, je l’aimais comme une folle, je voulais qu’elle soit mienne, mais ces révélations affirmaient ce que je savais déjà, elle ne m’appartiendrait jamais. Je savais très bien que si je me lançais dans cette nouvelle folle aventure, j’allais en souffrir un jour, mais sur le moment, j’étais totalement perdue.
Qu’est-ce que l’avenir allait me réserver? Ça je ne le savais pas, mais ce qui est sûr c’est que si je n’essayais pas, je ne le saurais jamais. C’est donc sans sécurité pour me retenir que je me jetai alors dans le vide à ses côtés.
Et vous, qu’auriez vous fait? …
Merci de m’avoir lue jusqu’au bout, j’espère que cette histoire vous aura plu jusqu’au bout et on se retrouve pour une nouvelle histoire peut-être :)
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