Je l’ai trouvé collée contre les marrons glacés. Elle n’arrivait pas à monter dans le panier à crabes. Elle tremblait façon piaf sur bloc de marbre. Alors j’ai pris sa main. Dehors les tours redressaient leur aplomb, dedans mes poumons se gonflaient d'impudence. Elle a étiré un sourire sur une corde à piano et nous nous sommes tirés. Je l’ai traînée comme un cerf-volant sur la plage d’Ouistreham. Ses larmes fuyaient le long de ses joues rousses et elle a rit à couleurs déployés lorsque je me suis effondré en quintes tuberculeuses. Je m’écornais façon plastique médusé sur le sable délavé lorsqu’elle s’est emparée de ma main guenille et m’a entraîné dans une cavalcade de damnés. Nous renversâmes tout sur notre passage. Les vieux, les tables, les marmots, les journaux, les fruits mais pas les légumes… Un flic nous a coursé un bout de chemin mais nous l’avons dégommé à coups de canettes de coca.

Puis mes vieux démons m'ont rattrapé. Il fallait que je cause car la vieille édentée me susurrait des impressions de trahisons, des promesses de violents poisons.

"Je n'ai rien à te donner lui ai-je murmuré entre deux crachats romantiques.

- Je ne veux rien te prendre. Ni semence, ni amour, ni secours

- Je ne peux même pas te promettre...

- C'est surtout moi qui n’ai rien à te promettre. Ni affection, ni considération.

- Alors que veux-tu ?

- Un instant. Peut-être un autre...Je veux une suite de moments qui ne forment pas une histoire. Je veux un bout de ton quotidien pour oublier le mien."

Alors j'ai plongé. J'ai botté le cul à l'arlequin funeste, j'ai rayé l'antique salope aux gencives rayonnantes et j'ai profité du corps d'Anna sous le soleil. Elle ne me demandait ni lapin, ni tulipes et elle m'offrait les paysages de sa silhouette. Je me suis vautré sur sa peau, j'ai bu jusqu'à plus soif à la source de son désir. Ma voisine a tambouriné, les touristes ont détourné les yeux, arraché leurs chérubins à notre spectacle.