chapitre 61 : Tic... Tac...
Elle prit appuie sur le sol et se hissa sur le seul pied qui lui restait. Elle se dirigea ensuite vers la porte sans que personne ne lui prête attention, si bien que quand elle sortit, nul ne remarqua son absence. Une fois la porte refermée, la jeune fille s’écroula sur le sol. La douleur lui irradiait le corps et le cloche-pied lui demandait bien plus d’effort qu’elle ne pouvait en fournir. Sa chambre était beaucoup trop loin pour qu’elle puisse la regagner toute seule, mais rester ici n’était pas non plus une option envisageable. Elle prit alors son courage à deux mains, se releva, posa sa main sur le mur, fit deux pas vers l’avant, puis s’écroula de nouveau. Mauvaise idée, de toute évidence.
Epuisée par cette tentative inutile, elle décida de s’allonger sur le carrelage blanc du couloir. La fraicheur lui déchira la peau, mais cette sensation la soulagea. Les rayons du soleil qui pénétraient le plafond cristallin lui brûlait les yeux, mais le spectacle était si majestueux qu’elle ne voulait se résoudre à les fermer. Le temps passait, elle entendait les cliquetis de l’horloge du théâtre résonner dans sa tête. Tic… Tac… Tic… Tac… Tic… Tac… Tic…
- Qu’est-ce que tu fais ici ?
La voix de Marco la fit se relever de surprise, si vite qu’elle fut prise d’un vertige.
- Et toi, lui demanda-t-elle, je croyais que tu avais des affaires importantes à régler ?
Marco prit une seconde de réflexion.
- Ces affaires se sont réglées plus vite que prévu. J’espérais vous voir danser par la fenêtre, mademoiselle Falcon, je ne m’attendais pas à vous trouver assise parterre.
Il était venu ici pour la voir ? Sincèrement ? Qu’importe, elle ne devait pas s’en soucier.
Rubie lui tendit sa cheville boursouflée pour seule réponse à ses paroles. Marco sourit, mais son visage ne s’égailla pas. Il semblait réellement compatir à sa souffrance. Il s’assit à ses côtés, rapprochant ses mains de la blessure, mais Rubie eut un mouvement de recul.
- Tu es médecin ?
- Pas vraiment, déclara-t-il, mais des entorses comme celle-ci, j’en ai eu plus que n’importe qui. Je suis un peu expert en la matière. Au fait, ravi de voir que l’on se tutoie à nouveau.
Rubie laissa échapper un soufflement, auquel Marco ne répondit pas, si ce n’est par un léger rire étouffé.
A peine convaincue, la jeune fille le laissa tout de même approcher. Le contact de ses doigts sur sa chaire endolorie la fit tressaillir. Marco inspecta son pied un instant, puis plongea son regard dans le sien. Soudain, elle se sentit légère, comme s’il n’y avait plus dans son corps la moindre once de douleur. Elle ne pouvait plus bouger, plus parler, mais elle n’avait définitivement plus mal. Quand le garçon détourna les yeux, ses mains s’était crispé et son sourire habituel l’avait quitté.
- Tu te sens mieux ? lui demanda-t-il, les dents presque aussi serrées que Rubie les avait quelques minutes auparavant.
- Beaucoup mieux.
Etrangement.
- Comment tu as fait ça ?
- Ça, c’est mon petit secret. Mais content que ça ait marché.
Puis il se leva, non sans peine, et s’en alla. Rubie ne rêvait pas, il boîtait.
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