Quand la raison aide
« C’est comme un voleur d’espoir, la tristesse est un brigand. »
- Dooz Kawa
Hilona courait à en perdre haleine.
« Je vais me réveiller. »
« Je vais me réveiller. »
« Je vais me réveiller. »
Elle essayait de se persuader qu’il ne s’agissait que d’un simple cauchemar. Qu’elle n’allait pas mourir aujourd’hui. Mais non. La jeune femme ne se réveillait pas. La mort derrière elle , elle zigzaguait entre les arbres et les ronces, cherchant à fuir.
« Cours. »
« Cours. »
« Cours. »
« Plus vite. »
Hilona avait cette voix dans sa tête qui lui disait d’aller toujours plus vite, toujours plus loin. Ses jambes avançaient sans qu’elle ne les commande, c’était devenu un automatisme. La jeune femme courait si vite qu’on aurait pu presque penser qu’elle volait. Elle s’abîmait les mains et les jambes dans les ronces. Époumonée, chaque bruit aux alentours la faisait trembler. Hilona essayait tant bien que mal de se frayer un chemin entre les buissons épineux et les arbres.
« Dépêche toi. »
Si seulement cette voix intérieure la laissait tranquille ne serait-ce qu’un petit instant se disait elle.
La jeune femme aperçut enfin un sentier. Sans réfléchir, elle s’y engagea. Le son sec de ses pas résonnait dans la forêt. Elle courait de plus en plus vite sans savoir d’où elle puisait ses forces. Le chemin se sépara en deux; celui de droite débouchait sur la rive. L’adrénaline et l’instinct de survit la faisaient avancer.
Hilona longeait dorénavant un fleuve. Un rapide coup d’œil derrière elle et elle aperçut ses poursuivants à une dizaine de mètres, peut-être un peu moins. La rivière semblait si froide, mais même si cela risquait de la tuer c’était sa dernière chance. Sa seule chance.
Elle plongea et ferma les yeux…
Le choc violent la déchira et le froid lui mordit les joues comme le renard ronge son os suite à une longue famine. Retenant son souffle, elle nageait dans cette eau sombre. En manque d’air Hilona sortit rapidement la tête de l’eau. Sa tête tournait, elle ne sentait plus aucun de mes membres et sa vision commençait à se brouiller.
« Courage Hilona tu y es presque. »
« N’abandonne pas, pas maintenant. »
« Pas après tous ces efforts. »
Cette fois sa conscience lui donna un peu de force. Elle puisait dans ses réserves… L’eau fouettait son visage et le vent hurlait comme un fou. Sa respiration se faisait de moins en moins régulière et sa vision se troublait. Ses mains finirent par s’agripper à la berge et la hissèrent dessus. Et dans un ultime effort, Hilona recommença à courir à travers la forêt. De l’autre côté de la berge ses poursuivants semblaient avoir laissé tomber la chasse pour cette fois mais il fallait qu’elle s’éloigne le plus possible de la forêt. La vision brouillée, la jeune femme distinguait tout juste les arbres ; ils n’étaient plus que des taches de couleur qui se mouvaient étrangement. Et le voile qu’elle avait devant les yeux n’avait de cesse de s’épaissir.
Ces pieds se prirent dans une racine et la jeune femme s’étala de tout son long. Les larmes coulaient en abondance sur ses joues creusées. La douleur la broyait… Pourtant, elle se releva et repris la course en titubant. Enfin sortie de cette forêt Hilona tomba sur ce qu’elle pensait être un village. Personnes n’arpentaient les rues en cette soirée d’hiver mordant. Elle titubait jusqu’à une place où trônait en son centre une sorte de fontaine. Entre la vision trouble et la neige qui tombait en abondance, il était difficile de distinguer les objets et les formes. La jeune femme glissa et tomba sur le sol blanc.
Le rouge de son sang qui recouvrait ses mains, ses jambes et son visage venait faire contraste avec la neige immaculée. Plus aucune force ne subsistait en elle, plus rien qui lui permettrai de se relever et de continuer. Hilona luttait pour ne pas fermer les yeux et pour ne pas mourir de froid.
« Garde les yeux ouverts. »
« Garde les yeux ouverts. »
« Garde les yeux ouverts. »
« Bouge toi. »
Les yeux tournés vers le ciel gris clair, sa respiration était saccadée, son corps… gelé…
Ses forces l’avaient abandonné.
Malgré le sifflement continu dans ses oreille elle cru entendre le bruit d’une porte qui grinçait. Elle voulait hurler, bouger, faire un signe, n’importe quoi pour vue que quelqu’un ne la remarque mais impossible.
Des cris…
Des pas se rapprochant…
L’espoir se réveillant à peine, son souffle se régula une seconde et elle réussit à sortir une sorte de râle bestiale du fond de sa gorge. Rauque et inhumain mais audible. Les yeux à demi clos Hilona aperçu des formes se mouvant autour d’elle, se pencher, la soulever. Ses yeux se fermèrent quand une lumière aveuglante lui perça les pupilles. Le dernier son qu’elle pu entendre fut l’aboiement d’un chien puis plus rien.
Le trou noir.
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