Bon. Soit j’ai basculé dans la folie, soit je suis en train de vivre une expérience encore inconnue du genre humain. Je crois bien que la théorie de l’IA sur les autres dimensions est… correcte. Je n’arrive pas à croire ce que je viens d’écrire. Et pourtant… Pourtant…

Revenons au commencement. Donc, je suis sorti de la salle de sport… Il faisait nuit. Une lueur verte, dans une ruelle, a attiré mon attention. Je me suis approché, et sur le sol, une ouverture dont une lueur vive de couleur verte s’échappait… avec des sortes de caractères de codage informatique qui voletaient… L’ouverture s’est soudain agrandie, et elle m’a… elle m’a avalé. Je suis tombé dedans… pour arriver dans un endroit sombre. Je me suis blessé au genou et à l’épaule en tombant, comme si j’avais fait une chute de deux ou trois mètres. Là, dans le « trou », un mec arrive et me demande si je vais bien. Je me relève, je reprends mes esprits… et là, devant moi,… c’était le mec qui était dans mon rêve… celui qui me regardait à travers le trou bizarre dans le sol… Je l’ai reconnu instantanément. Lui a fait une drôle de tête en voyant mon visage, on aurait dit qu’il avait vu un fantôme…

Une fois cette idée assimilée (et acceptée, tant bien que mal), puisque je suis à Londres, je voulais aller voir ma sœur… Mais évidemment, pas moyen d’y aller de suite, car d’après le gars qui m’a trouvé, c’était à l’autre bout de la ville, et je n’avais pas de monnaie locale sur moi pour prendre le train ou quoi que ce soit d’autre. Et mon téléphone portable s’était brisé lors de ma chute… Sur ce, Max (c’est le prénom de ce mec, il me l’a dit plus tard…) me propose de m’emmener chez lui, que je pourrai téléphoner à Liv (il avait oublié son portable chez lui…) et qu’on pourrait aviser par la suite. J’étais désespéré et complètement perdu. Sa proposition m’a donc fait un bien fou. Je ne le connaissais pas, mais il voulait m’aider, juste comme ça. Il aurait pu me laisser dans mon coin à délirer sur ma… téléportation… J’aurais compris s’il m’avait pris pour un fou. Mais non. Il m’a même dit qu’il me croyait et qu’il avait aussi vu la lueur verte. Je ne sais pas s’il était sincère, mais ses mots m’ont rassuré. Je ne le connaissais pas, mais j’avais déjà l’impression d'avoir trouvé un allié dans cette histoire, quelqu’un qui allait m’aider…

Je l’ai donc suivi, il n’habitait pas loin. Je regardais partout autour de moi. Je reconnaissais l’endroit. On était à la gare de Stratford. J’y étais déjà passé avec ma sœur, plusieurs fois, car il y a un grand centre commercial tout près, Westfield Stratford City. Incroyable… je suis vraiment à Londres…

Nous sommes arrivés chez Max, un minuscule appartement. Il n’avait pas dit un mot de tout le trajet. Il semblait très nerveux. Peut-être était-il en train de se rendre compte qu’il avait invité chez lui un inconnu. J’aurais très bien pu être complètement fou à lier, et il pensait que j’allais peut-être m’en prendre à lui.

J’ai donc essayé d’être sympa, et de lui montrer qu’après tout, je suis un mec normal, pétri de bonnes intentions. Je l’ai remercié encore et encore de bien vouloir m’aider. Je lui ai assuré que je ne comprenais pas ce qui était en train d’arriver… Il m’a souri et m’a dit que c’était normal. Mais je voyais bien qu’il était mal à l’aise.

Son appartement était… plutôt bordélique. Mais vivable. Il y avait des feuilles manuscrites un peu partout. Il m’a dit qu’il s’était mis à l’écriture, mais rien de vraiment sérieux. Il a trouvé son téléphone portable et me l’a passé, avant de disparaître dans la cuisine. J’ai donc fait le numéro de Liv, soulagé et impatient d’entendre sa voix, et de tout lui raconter. Il y a eu une sonnerie, puis deux. Puis on a décroché et j’ai entendu « Chic boutique, Jane à l’appareil. ». J’ai raccroché. J’ai certainement mal tapé le numéro. Normal, je tremblais d’émotion et je pense que j’étais en état de choc… Je me suis concentré et j’ai fait le bon numéro, j’en suis sûr et certain. Et là : « Chic boutique, j’écoute ? Jane à l’appareil. Allô ? ». Je raccrochais, ne comprenant plus rien, alors que Max m’apportait un sandwich et un verre d’eau. J’ai regardé le verre et je lui ai dit : » Il va me falloir quelque chose de plus costaud, petit… ». Il m’a regardé avec des yeux ronds, a disparu dans la cuisine et est revenu avec une bière, une Samuel Smith’s Impérial Stout. Ça ferait l’affaire. Je l’ai bue d’une traite. Le breuvage frais coulait dans ma gorge pendant que les pensées s’entrechoquaient dans ma tête… Pourquoi Liv ne répondait pas à ce numéro ? Chic Boutique ? Mais c’est quoi ça ??

Le pauvre Max me regardait toujours, un peu inquiet face à mon attitude un peu moins polie que précédemment.

« Merci… Ça m'a fait un bien fou. Et désolé si j’ai été un peu bizarre… mais plus la journée avance, moins je comprends ce qui se passe…

– Vous avez pu joindre votre sœur ?

– Non… je… apparemment elle n’est plus sur ce numéro… Je vais devoir aller jusque là… »

J’étais soudain vraiment épuisé. Un rapide calcul m’a rappelé qu’à Los Angeles il devait être minuit passé. Et puis avec toutes ces émotions, ajoutées à cette délicieuse bière triple que je venais d’ingurgiter comme si c’était du soda, je commençais à sentir une fatigue irrésistible s’emparer de moi… Max l’a remarqué. Il m’a dit que si je voulais, je pouvais me reposer sur son lit. Je ne me suis pas fait prier… On verra plus tard. Là, je veux juste fermer les yeux. Qui sait, je vais peut-être me réveiller chez moi et me rendre compte que tout ça n’était qu’ un cauchemar… Oui c’est ça… Un cauchemar…