Chère Lara,

J’espère que ce courrier est bien arrivé le vendredi comme je l’avais prévu. Au dos de l’enveloppe, tu trouveras l’adresse où me retrouver demain à 12h. Pas avant. Il me tarde de te revoir. Je sais que ce n’est pas correct mais je t’ai observée de loin durant toutes ces années. Que tu es belle ! La dernière photographie que j’ai jointe à ce courrier doit t’intriguer. Je sais que l’homme doit te sembler familier. Paul. Je l’ai aimé il y a fort longtemps. C’est lui qui m’a introduite dans le monde de la nuit… malgré moi. Je l’ai rencontré peu de temps après avoir quitté le domicile familial. Un soir alors que je volais des barres de céréales dans un magasin, je me suis fait surprendre par l’agent de sécurité des lieux la main dans le sac. Je n’avais pas pris de douche depuis 3 jours. Répugnante, j’errais dans un quartier à 25km de mon domicile.

La nuit je pillais quelque magasin pour me nourrir et le jour je grattais des sous chez les badauds de la ville. Je n’étais pas en mesure de me défendre face à l’agent. J’étais dégoûtante et n’attirais aucune sympathie au premier abord. C’est là que Paul est intervenu. Il a fait passer ce que je devinais être des billets dans la main de l’agent de sécurité et je repartais libre avec mes barres de céréales.

A partir de ce jour nous ne nous sommes plus quittés. J’ai emménagé dans sa maison close. J’avais enfin un toit sur la tête. Il me disait que j’étais spéciale et qu’il voyait ma souffrance. Il m’avait persuadée que s’il me confiait ses clients les plus précieux c’était parce qu’il avait confiance en moi. J’étais la seule capable de leur apporter le soutien dont ils avaient besoin.

C’était des hommes politiques bien souvent qui avaient besoin d’échapper à leurs pulsions destructrices. La prostitution était devenue source de catharsis. J’ai rapidement vu les limites de ma médecine. Certains clients m’imposaient toutes sortes de pratiques sans consentement. Paul ne m’a jamais défendue.

Un jour nous nous sommes disputés très violemment. Il m’a poussée contre l’une des tables sur lesquelles quelques heures plus tôt une danseuse pulpeuse se déshabillait lentement, acclamée par une foule d’hommes insatiables. J’ai simplement vu du sang couler de ma tête puis de mon entre-jambe. Suite à cela, je découvrais que mon bourreau y avait déjà planté sa graine…