La gifle me ramena à la réalité. Je ne l’avais pas prévenu. D’habitude, il rentrait de son club à une heure tardive et me trouvait endormi. Ses câlins me réveillaient et j’aimais le sentir se détendre en moi. Me savoir à sa disposition me comblait, d’autant qu’il me remerciait toujours. Sa force, à laquelle j’adorais me soumettre, était toujours empreinte de douceurs, de prévenances. Être sa chose était mon plaisir et ma récompense.

Jamais il ne m’avait frappé. La tête me tournait un peu et la joue me cuisait. Je voulus ouvrir la bouche, mais une symétrique clôtura notre échange. Je filais dans la salle de bain me laver les dents et me préparer, sachant qu’une fois au lit, dans mon offrande, je retrouverai mon protecteur aimant.

J’attendis, avant de m’effondrer dans un mauvais sommeil dans lequel Arthur était torturé. Le lendemain, l’appartement était vide à mon réveil. Il avait laissé le canapé en plan et un désordre dans toute la cuisine. Je remis tout en ordre, reportant ses vêtements de nuit dans la chambre, le nez dedans pour m’enivrer de son odeur. L’appartement devait être impeccable. Il rentrait souvent plus tôt que moi et ne supportait ni le désordre ni la saleté. Je passais souvent une heure à tout remettre en place, surtout quand Stéphane avait partagé notre couche. Ils s’étaient connus au club, avaient sympathisé. William l’avait invité et, de fil en aiguille, ils avaient eu envie d’une partie à trois. Stéphane avait un corps maigre et musclé, des jambes parfaites. Je ressentis quelque chose de vicieux dans ce garçon, ce qui suscitait mon intérêt.

Cela avait été une découverte, d’autant que William avait accepté mes assauts durant cette soirée. J’avais déjà tenté de renverser les rôles, voulant profiter de toutes les facettes de mon héros. Il se laissait faire, pour mon plaisir, mais interrompait toujours l’action au moment crucial. Il profitait de ma frustration pour mettre plus de rage dans son retour. Cet écrasement était divin.

Avec Stéphane, nous tournions et, je pense, il n’osait pas trop montrer sa domination. De plus, Stéphane apportait toujours de nouveaux sex-toys : c’était sa passion. Nous passions du temps à nous les essayer, à les commenter, avant de les jeter dans un tiroir en attendant les suivants. Aucun autre garçon ne partageait notre lit. Parfois, il disparaissait pendant un mois, d’autres fois, il passait une semaine avec nous, dans une excitation stimulante.

Une fois l’appartement parfait, je le quittai. J’aimais préparer notre petit nid. Au boulot, j'eus du mal à expliquer mes deux joues rouges, inventant une nuit un peu chaude, ce qui attira des petits sourires. Pris par les urgences, ce n’est qu’en milieu de matinée que je remarquai l’absence d'Arthur. Je n’avais pas son téléphone. Je joignis les RH : il avait prévenu qu’il était souffrant. Je poussai un soupir de soulagement, car mon esprit avait envisagé le pire. À midi, je l’appelai. Il décrocha, ignorant mon numéro.

— Arthur, je suis désolé. Profondément. Je n’aurais pas dû te forcer…

— Non, Jérôme, c’est moi qui me suis mal comporté. Tu m’as consacré beaucoup de temps, de bienveillance, et je t’ai insulté, juste sur ce que tu es. Je ne peux pas revenir. J’ai trop honte de ce que je suis et de ce que je fais.

— Arthur, je m’en fous ! On passe là-dessus. Le vrai problème est qu’on a besoin de toi ! Tu es devenu indispensable ici ! Alors, aujourd’hui, tu reprends des forces et demain matin, au boulot !

J’entendis un petit oui murmuré, avant de lui lancer : « Je suis là pour toi. Je t’aime. Je t’embrasse », avant de raccrocher, ému de ma déclaration.

Le soir, malgré le taf, je rentrai plus tôt, voulant être présent avant William. Je m’étais préparé et j’avais enfilé un débardeur qu’il adorait. Sans rien d'autre, comme d’habitude ! Je savais qu’il m’adorait ainsi. Je me forçais à ne pas bouger en entendant sa clé. Je n’avais pas à m’excuser et j’ignorais ce qu’il voulait faire de moi.

Son bonsoir chaleureux était celui des bons jours. Je levai les yeux. Son sourire me ravagea. Qu’il était beau ! Quelle chance de l’avoir dans ma vie ! Je me précipitai dans ses bras, heureux de le sentir m’écraser. Déjà ses mains s’activaient. Il avait envie de moi et je m’offrais à lui. Il fut plus violent que d’habitude, plus fougueux, mais j’en avais besoin. Le diner fut détendu. Normalement, c’était notre soirée cinéma et je filais enfiler une tenue plus décente.

— Pas ce soir ! Je préfère une soirée tranquille.

Pendant que je desservais, il partit dans la chambre, puis il m’appela. Je le rejoignis.

— Tout nu ! me demanda-t-il.

J’aimais ses ordres abrupts. Ce n’est qu’une fois nu que je remarquai qu’il avait sorti du tiroir quelques objets. Un frisson me parcourut, sans que je sache sa raison. Il s’approcha de moi, caressa mes joues encore marquées.

— Tu as eu mal, mon pauvre chéri ? Je suis désolé de m’être laissé emporter.

— Ce n’est pas grave. Tu étais inquiet.

— Même pas ! J’étais en colère.

— Je m’excuse, j’aurais dû te prévenir.

— Tu n’as pas à t’excuser ! C’est à moi de le faire.

— Excuse-moi.

Il m’avait déjà repris sur cette tournure.

— Jérôme, en ce moment, ça ne va plus. Tu fais trop souvent n’importe quoi.

Je fronçais les sourcils, me demandant à quoi il faisait allusion

— Ne fais pas l’innocent ! Tu sais bien de quoi je parle.

Ce devait être un jeu. Autant y participer et le laisser poursuivre.

— Je n’aime pas ça, mais je dois te punir. Tu comprends ? Tu es d’accord ?

Pas trop, même pas du tout, mais curieux des suites, je hochais la tête. Il me désigna le lit. En un clin d’œil, je me retrouvai ligoté en X, les lanières et les menottes m’écartelant durement.

— Tu es prêt ?

Prêt à quoi ? Il m’inquiétait. Un coup de cravache sur les jambes me fit sursauter, tirant douloureusement sur mes articulations.

— Réponds !

— William…

— Réponds !

Le second coup m’arracha un oui.

Les coups commencèrent à pleuvoir, insistants, même s’ils étaient moins forts que les deux premiers. Lors de nos jeux, la cravache stimulait. Ce soir, elle brulait.

Après une quinzaine de coups, il arrêta et entreprit de masser et de soigner mes brulures. Je retrouvais mon William protecteur et prévenant. Il m’embrassa longuement, me fit doucement et pleinement l’amour, avant de filer regarder une série, oubliant volontairement de me détacher, à sa disposition, à son bon vouloir. J’appréciai ce renforcement de ma soumission, me permettant d’abandonner la lutte.

Une question me lancinait : j’avais aimé souffrir pour lui, par lui. L’impression ressentie par la claque n’était donc pas unique.