14 - la rencontre

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Plus l’instant se rapprochait, plus j’avais peur ! Les deux êtres auxquels je tenais le plus allaient s’affronter ! Si cela ne fonctionnait pas entre eux, je serai obligé de choisir. Et donc de m’arracher la moitié du cœur. Comment avais-je pu chercher et créer cette situation ?

William pouvait tomber jaloux et devenir odieux. Arthur pouvait se bloquer et devenir hargneux. J’avais raconté à William le viol d'Arthur, son traumatisme, sa fragilité. Quand j’avais couché avec lui, cela avait été sa première fois ! La première fois qu’il acceptait un homme, qu’il avait désiré.

La sonnette retentit. Mon cœur s’emballa tellement que je ne pus bouger. C’était à moi de l’accueillir. Le bruit de la porte qui s’ouvrit puis… plus rien.

Je me levai en urgence absolue. Ils étaient figés, l’un devant l’autre, sans prononcer un mot. Qu’est-ce qui se passait ?

— Entre !

J’agrippais Arthur par la manche pour le tirer. Il avança sans décoller les yeux de William. La réalité s’imposa à moi ! Celle imprévisible et catastrophique : ils étaient en train de tomber amoureux l’un de l’autre ! Et c’était moi qui allais être jeté, perdant les deux.

Je claquai la porte avec force, tentant de rompre le charme. J’avais vécu la même tétanisation face à William. J’avais vécu le même élan irrésistible face à Arthur.

Je les abandonnai, préférant m’effondrer sur le canapé, démoli.

— On se fait la bise ?

— Oh oui !

— Dis donc , tu mets le même parfum que moi !

— Euh… Quand je suis venu, j’ai beaucoup aimé ce qui restait de toi dans le lit. Puis, j’ai vu le flacon dans la salle de bain. Pas facile à trouver et horriblement cher. Mais quelle élégance !

— Il fallait me le dire ! J’ai toujours des flacons d’avance ! Je t’en aurais donné un ! Tu m’as bien volé mon string préféré !

— Je l’ai sur moi. Je te le rends !

— Oui, je veux bien. Donne !

— Mais…

— Non, je rigole ! Je veux juste te voir avec, puis le retirer !

— …

— Tu es vraiment trop mignon quand tu rougis !

Je levai les yeux vers ce spectacle étonnant. William était radieux, comme il l’avait été en me donnant ma carte du club. Arthur était éblouissant de fraicheur.

— Eh, Jérôme, tu te bouges ! Comme accueil, on fait mieux !

— Désolé ! J’ai été…

— On s’en fout !

William tirait gentiment Arthur par la main. Il le fit asseoir sur le canapé, entre nous. Arthur n’avait rien perdu de son fard, mais je voyais ses yeux heureux.

— On boit un coup ?

— Merde ! Je n’ai pas pris de grenadine !

— À vingt-trois ans ! Trop chou !

Je veux bien quelque chose de plus fort !

— Tu as déjà bu ?

— Oui ! J’ai même souvent abusé aux soirées de l’école, un peu trop !

Une conversation amicale s’établit. Je voyais William excité, mais respectant infiniment mon petit frère. Du grand William ! N’y tenant plus, il passa amicalement son bras sur l’épaule d’Arthur, qui accepta en s’y lovant. Les choses démarrèrent lentement, avec des caresses, des baisers tout en douceur. Les vêtements s’éparpillèrent sur le sol. Nous n’étions plus qu’avec la dernière pièce. William fit lever Arthur, tournoyer du bout des doigts, le gratifiant de compliments. Le jeune se prêtait au jeu, fier de notre admiration, me lançant des œillades de plaisir.

— Je te le laisse ! Tu le portes beaucoup plus joliment que moi ! Sauf si je te le déchire !

— Pas question ! dit-il en riant et en le faisant glisser à ses pieds.

William suffoqua. À son tour, il fut dans sa nudité totale. Arthur contemplait ce sexe et ce corps intégralement glabre. L’effet était identique pour tous ceux qui le découvraient.

— William, tu ne veux pas libérer Jérôme ? Regarde, il est le seul à ne pas exprimer son envie par sa vigueur !

— Que tu crois ! Il est tendu ! Je le connais !

— Mais, tout à l’heure, je veux qu’il puisse…

— C’est non !

Arthur prit sa tête malheureuse, si attendrissante.

— Mais, pour toi, je veux bien faire une exception… Jérôme, tu veux que je te libère ?

— Non ! criai-je avant d’avoir réfléchi.

Arthur reprit sa mine défaite.

— Arthur, je te donnerai le même plaisir. Tu vas voir, il y a d’autres moyens !

Il ne paraissait pas en être certain, mais accepta ma promesse. Nous nous sommes retrouvés dans la chambre, emmêlés sur le lit. Il serait difficile de dire qui faisait quoi à qui, tellement cela tournait, chacun sensible au plaisir des deux autres. Une fois apaisés, nous nous sommes assoupis, toujours mélangés. La faim nous réveilla. Heureusement que j’avais tout prévu ! Puis nous nous sommes raconté, chacun rapportant des anecdotes drôles ou dramatiques, mais qui celait le fond de notre être. Nous en avions dit plus lors de notre tête-à-tête. Une belle chose était pourtant en train de naitre. Avec Stéphane, c’était de la baise, du sexe, intense et agréable. Maintenant, c’était de la fraternité, de l’amour. Le seul incident fut quand Arthur alla ouvrir au livreur de pizza, oubliant sa tenue et ce qu’il était en train de faire. Le livreur, un jeune noir, en laissa tomber les boites.

Le temps passait trop vite.

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