Chapitre 21
Suzie
Lundi matin je me présente au bureau, salue mes collègues et vais me chercher une tasse de café dans la foulée dans la petite cuisine. J’ouvre la porte du placard du haut, tend le bras pour attraper une tasse quand je sens une tension soudaine dans la pièce. Je tourne le dos à la porte et je ne vois pas qui en pénétrant dans la cuisine à créer une vague de froid. Je n’ai pas le temps de réagir que je sens la présence d’un corps et une main effleurer la mienne. Je me tends et me retourne aussitôt prête à râler sur la personne et son manque de respect des limites entre deux personnes.
Je retiens mon éructation. Je jette un coup d'œil au reste de la pièce qui semble s’être vidé à la vitesse de la lumière nous laissant seul.
Aédan.
D'habitude, c'est Maddie qui lui apporte son café. Elle est officiellement en congés maternité, il n’y a donc plus personne pour lui amener sa tasse du matin. Après m'être servi une tasse de café la main tremblante, je m’apprête à fuir, il n’y a pas d’autres mots, je fuis pour espérer atténuer ma gêne.
- Suzie, s'il te plait !
Eh zut !
- Oui M. SCOTT ? Avez-vous besoin de quelque chose ? répondé-je en ayant beaucoup de mal à garder un ton professionnel.
Je sens les yeux de mes collaborateurs me scrutaient à travers les parois de verre qui sépare la salle de repos du couloir menant à différents bureaux. La hantise de me faire prendre en flagrant délit de flirt me gagne. Pourvu qu’il n’aborde pas cette soirée devant eux. Mes jambes tremblent, mes mains sont moites. Ma gaucherie arrive au galop. Au secours !
- Nous n’avons pas pu débriefer sur cette soirée. Je souhaiterais vous voir dans mon bureau, une mise au point est nécessaire, dit-il sur un ton impérieux.
- Oui Monsieur, je vous rejoins dans votre bureau dans 5 minutes.
Les collègues nous regardent toujours. Le rapprochement d’Aédan, nos mains qui se sont effleurer ne sont pas passer inaperçu. Il n’est pas question de laisser voir à quiconque que cet homme me trouble. Mon patron me demande de venir dans son bureau, j’y vais.
Aédan est assis derrière son bureau imposant, il a l’air résolu à obtenir ce qu’il veut comme à son habitude. J’ai les mains moites, je suis perturbée par son assurance et son charisme. L’entrevue débute sur des sujets professionnels dans un premier temps ce qui me surprend mais finit par me rassurer. Puis une fois que je me suis détendu, il finit par oser me poser la question.
- A-t-il essayé de reprendre contact depuis l’autre soir ? me demande-t-il. J’entends comme de l’inquiétude dans le ton de sa voix.
- Non, je n’ai aucune nouvelle et cela me va très bien comme ça, répondé-je sur la défensive. Si on a terminé, je vais vous laisser. Je dois terminer la préparation du dossier VINOT avant votre réunion de fin de matinée.
Je coupe court à ce débrief. Je ne souhaite nullement étaler ma vie privée devant mon patron. Le dossier VINOT est terminé depuis vendredi soir mais je n’ai trouvé que cette excuse pour écourter notre entrevue qui devenait un peu trop personnelle.
La main sur la poignée de la porte de son bureau, je détourne la tête pour lui adresser des remerciements pour son attitude chevaleresque. Mes joues s’empourprent à mesure que les mots sortent de ma bouche. Heureusement, son téléphone sonne et écourte mes bafouillements. Merci au téléphone ! Je ne savais plus comment sortir de ce bureau avec ces yeux qui me transperçaient. Il n’a rien fait ou dit pour m’aider. Ma bouche ne distille que de la marmelade. Dès que je suis en mauvaise posture, ce sourire de voyou apparaît et ne le quitte plus. Ce sourire qui se mélange à ses yeux me troublent à un point que je ne pensais pas possible.
Lorsque je retourne à mon bureau, la tête dans les étoiles, je me fige devant un magnifique bouquet de roses rouges. Qui m’envoie des fleurs ? J’espère que ce n'est pas M. ROSSI. Il n’oserait pas me relancer jusqu’ici tout de même. Je m’approche en douceur comme si le bouquet cachait une bombe. Une carte accompagne le bouquet, je la saisis et y lis ce message :
Excuse-moi.
Mon comportement a été exacerbé par l’alcool.
Je suis désolé, poussin !
Je t’aime toujours, plus fort chaque jour !
Rappelle-moi.
Jean
Je suis horrifiée, il m’a laissé son numéro de téléphone sur la carte. Comment m'a-t-il retrouvé ? Je ne lui ai pas dit où je travaillais et Annie encore moins. Comment l’a-t-il appris ? Je comprends mieux le terme ascenseur émotionnel. Je suis sortie du bureau de mon boss toute chamboulée et en deux secondes je suis comme une bête blessée, à l'affût d’un trou pour me cacher de mon assaillant. Il n’a pas l’intention dans rester là apparemment.
Aédan franchit la porte de son bureau et il me trouve pétrifié devant ces roses rouges. Je ne sais pas depuis combien de temps je suis là à les regarder sans bouger. Mon cerveau a buggé comme il lui arrivait de le faire quand Jean partait dans des colères monumentales. Il regarde furieux ce bouquet. Je reste coi n’arrivant plus à articuler un seul mot. Il a sans doute compris que Jean ne lâchera pas aussi facilement qu’il avait tenté de lui faire croire lors de ce gala. Ma stupeur traduit ma peur que je n’arrive pas à cacher.
- C’est lui ? Il te relance ? dit-il inquiet. Suzie, ça va ?
- Euh … oui, je ... vais aller mieux ... dans quelques secondes … quand je me serais débarrasser de ce bouquet ! dis-je la gorge serrée.
Aédan, tout en reprenant son calme, me demande de réserver le jet pour mercredi matin. Il me demande de préparer mes valises car nous allons partir pour affaires en Irlande.
- Vous voulez que je vous accompagne en Irlande ? Pourquoi ? Il me semblait que vous vous y rendiez pour des raisons personnelles, répondé-je stupéfaite par ce changement soudain. A quoi joue t-il ?
- Parce que j’aurais besoin de mon assistante, me dit-il sèchement. Nous partirons pour affaires mais également pour le plaisir, dit-il se ravisant sur un ton plus doux. Une fois les affaires terminées, vous serez libre de rentrer ou de profiter de ce voyage pour faire du tourisme. L’Irlande est un merveilleux pays, vous vous y plairez j’en suis sûr.
- Où dois-je réserver l'hôtel ?
- Il y a un gîte au village mais nous nous rendrons en premier au domaine. Nous ne serons absents que quelques jours. Tenue décontractée exigée pas la peine d’emmener vos tailleurs tous tristes et trop grands, conclut-il en sortant de mon bureau.
J’ai beau avoir fait un effort sur mon look, il ne cesse de me parler de mes vieilles tenues comme s' il n’avait pas remarqué le changement. Pourtant je sais tout comme Greg qu’il apprécie mon nouveau look. Il ne peut pas s’empêcher de me taquiner surtout quand les situations doivent rester professionnelles.
Maddie m’avait prévenu, les déplacements pourraient faire partie de mes tâches. J’ai l’étrange sensation que la demande d’Aédan pour que je m’envole avec lui en Irlande est lié à Jean. Est-ce sa manière à lui de me protéger ? Voilà que je me mets à rêver du preu chevalier alors que je sais bien que les princes charmants n’existent pas. Par contre, m’éloigner le plus possible de Jean me fera le plus grand bien. J’entends déjà Annie me seriner qu’un homme qui veut protéger une femme désire plus qu’être ami avec elle. Rien que cette pensée me fait rosir les joues.
Je dois avertir Annie et préparer ma valise pour 8 jours de déplacements.
Comme me disait ma grand-mère maternelle : qui vivra verra ! Elle a eu une vie rocambolesque mais c’est un autre sujet.
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