Chapitre 25
Suzie
Ce matin, le soleil transperce de ses rai de lumière le rideau de ma grande fenêtre et illumine ma chambre. L’espace d’un instant, je ne reconnais pas l’endroit où j'ai dormi. Je suis un peu désorienté après cette nuit agitée. Je me remémore les instants partagés avec Aédan et mes joues rosissent. Ai-je dormi seule ? Aédan m’a t-il rejoint pour un câlin un peu coquin ? Mes deux yeux grands ouverts, je me retourne dans ce grand lit froid où je suis seule. Il ne m’a pas rejoint cette nuit comme ma culotte l’avait tant espéré.
La nuit dernière a débuté avec beaucoup d’ardeur et j’aurais aimé qu’elle poursuive toute la nuit. Un réveil à deux et un petit câlin matinal ne m’aurait pas déplu. Dommage. Je suis déçu car pour la première fois de ma vie, j’ai eu un orgasme volcanique. Le plaisir qu’il m’a donné a été une grande première pour moi et je dois avouer que j’aurais voulu prolonger notre étreinte toute la nuit.
Après son départ, je l’ai longtemps attendu avant de finir par m’endormir. Malgré l’excitation qu’il a éveillé en moi et la frustration qui a suivi son départ, j'ai tout de même passé une fin de nuit paisible. Je suis impatiente de le voir. Je saute du lit pour m’habiller.
Sera-t-il d’aussi bonne humeur qu’hier soir ou est-ce que son visage sera de nouveau habillé de son air renfrogné ? L’angoisse me serre la poitrine tout autant que la nervosité me gagne. Mon poul s’accélère, mon cœur s’emballe et mes mains sont moites. Je n’y tiens plus. Des voix se font entendre dans la cuisine. Je sors de cette chambre et dévale l’escalier pour retrouver Aédan.
Malheureusement pour moi, je n’y croise pas Aédan mais trois jeunes hommes une tasse à la main. Je les dévisage et ils en font autant. Oh là là ! Comment Aédan va réagir quand il apprendra pour cette situation. Il a cherché à me cacher hier soir et ce matin je me suis jeté dans la gueule du loup. Un visage familier me regarde, je perçois des milliers de questions dans ces yeux.
Cette fois ci je suis plus que ravi d’avoir pris le temps de m’habiller correctement. Je sens monter en moi ma gaucherie à grande vitesse. Je suis resté coi devant ces hommes lorsque l’un d’eux me salue.
- Bonjour Suzie. Tu es arrivé quand ?
- Greg ?
- Hum … tu connais cette magnifique jeune fille ? Pourrais-tu nous présenter Greg ?
- Les gars, on se calme ! Suzie est …
- La nièce de Louise ! dis-je en lui coupant la parole.
- Oh … Pourtant tu as un accent s’étonne l’un d’eux. Français si j’ai une bonne ouïe ? Mais comment vous vous connaissez tous les 2 ?
- J’ai déjà fait la connaissance de Suzie, il y a quelques mois en France. Louise nous en a déjà parlé de sa nièce vous vous en souvenez ?!
- Ouah ! Je comprends pourquoi Louise n’a jamais voulu nous la présenter. Elle avait peur que nous succombions à son charme. Enchanté Suzie. Je suis Charles et voici Jules.
- Mademoiselle, me salue Jules d’un signe de la main. Je parle pour moi mais je dois dire que je préfère la vue de cette jeune et jolie apparition que la vue d’un ours mal léché aux traits tirés.
- Alors vous êtes en Irlande pour combien de temps ?
Il y a comme un malaise dans la pièce. En tout cas, je sens ma gaucherie m’envahir et me pétrifier. J'aimerais pouvoir disparaître en un coup de baguette magique mais à mon grand désarroi je n’ai aucun pouvoir. Je suis donc coincée dans cette cuisine à devoir répondre à toutes leurs questions sans échappatoire.
Qu’est-ce que je donnerai pour qu’Aédan même de mauvaise humeur entre dans cette pièce pour me sauver de tous ces yeux scrutateurs et interrogateurs. Qu’ai-je le droit de dire ? Personne ne sait que je suis ici et je ne sais pas si cela doit rester un secret. Mais voilà, j’ai en horreur les mensonges et je ne n'excelle pas dans l’art de celui-ci. J’opte donc pour une vérité sans donner trop de détails.
- Je repars bientôt en France, dis-je timidement.
Des regards sont échangés entre les garçons. J’ai l’étrange sensation d’être entouré de télépathe. Ils se regardent, hochent leurs têtes et se mettent à sourire sauf Greg qui a gardé son sérieux. Les garçons n'insistent pas, sujet clos ! Ouf !
Ils sortent de la cuisine, l’antre de Louise dès qu’ils entendent la porte s’ouvrir. Auraient-ils peur d’affronter Louise en ma présence ? Connaissant Louise, je suis certaine qu’elle a dû les menacer s' ils devaient s’approcher de sa nièce. Cette réflexion a au moins l’effet de me faire retrouver mon sourire. Alors que je m’apprête à me cacher dans ma chambre en attendant le départ des garçons, Greg m’interpelle :
- Suzie, il faut qu’on parle. Viens avec moi dans la bibliothèque.
Oh, c’est pas possible ! Ils le savent ! J’essaie de garder le contrôle de mon corps mais c’est peine perdu. Celui-ci n’en fait qu’à sa tête. Mes joues rosissent et mes jambes tremblent.
- Les gars soupçonnent que toi et moi on est ensemble.
- Oh … c’était ça les regards soupçonneux dans la cuisine.
Je souffle un peu. Ils n’ont pas de doutes sur Aédan et moi. Je préférerais en discuter en premier avec lui plutôt qu’avec eux.
- Avec Maddie, on avait des doutes sur vous mais après t’avoir vu ce matin, je n’en ai plus. ’est avec Aédan qu’il se passe quelque chose pas avec moi. Nous avons un peu forcé sur l’alcool hier soir. Aédan en particulier. En fait on l’a fait boire pour en savoir un peu plus sur sa vie amoureuse. Lui qui n’est pas très avare de détails d’habitude, là, il ne voulait rien nous dire. L’alcool le rend plus loquace que d’ordinaire et nous avions un contrat à fêter. On a passé la nuit au château, on était incapble de conduire. On allait partir quand nous avons cru que c’était Aédan qui descendait l’escalier. Tu es descendu 5 minutes trop tôt. J’ai failli passer à côté de votre histoire. Tu te rends compte que j’aurais pu me ridiculiser en t'invitant à mon retour de France ?! ironise-t-il.
- Je suis désolé, Greg, lui répondé en lui souriant.
Mais Greg n’a pas envie d’en rester là. Il veut des réponses. Sa curiosité l’emporte sur la décence.
- Aédan t’a invité ? Tu es là depuis quand exactement ?
- Oui ... 1 semaine.
- Donc hier soir, tu étais là, se dit-il plus pour lui comme s' il pensait à voix haute. Je comprends mieux son malaise lorsque nous avons évoqué sa longue absence. Nous l’avons taquiné sur le fait qu’elle était due à une jolie brune. En fait, elle était surtout dû à une jolie blonde. Vous êtes ensemble depuis quand exactement ?
- Oh … Euh … Non …
- Mais encore …
Il se moque de moi. Il n’a pas l’intention de partir en ignorant ce qu’il a vu et encore moins de me faciliter la situation. Tout comme Aédan, il prend un malin plaisir avec ma gaucherie. Il se ressemble beaucoup ce qui explique leur grande complicité.
- On n’est pas vraiment ensemble. En fait, je ne sais même pas ce que nous sommes l’un pour l’autre. C’est un peu compliqué.
- Rien n’est jamais simple avec Aédan. Il est mon meilleur ami, je le considère comme un frère mais il ne se laisse pas approcher si facilement. Il ne fait entrer personne dans son intimité et pourtant tu es là.
- Il ne m’a pas laissé le choix. Je devais être logé au village et à mon arrivée au château j’ai été obligé de me loger au château. Il avait annulé ma réservation et plus aucune chambre de libre.
- Comme par hasard ! me taquine Greg.
- C’est la vérité !
- Je ne remets pas en question tes dires. Je me demande juste si l'hôtel était vraiment complet. La famille SCOTT est connue dans le coin. Il a peut-être juste fait marcher ses relations.
- Quoi ? Tu penses qu’il aurait pu faire ça ?
Je ne me suis pas posé de questions. Devrais-je douter de lui et de ses intentions. Ces mots ne font qu’augmenter mes doutes sur notre potentielle relation. Je vais devoir éclaircir ce point mais plus tard avec Aédan quand il se sera réveillé et qu’il sera de bonne humeur.
- Je suis pas convaincu qu’il apprécierait de savoir que nous nous sommes rencontrés ce matin.
- Je ne crois pas non plus, vu qu'il a essayé de te cacher à nous hier soir. Je garderai ton secret auprès de mes camarades mais Aédan me devra une explication. Tu es une femme qui ne doit pas être considéré comme acquise mais pour qui on doit se battre. Il ne peut pas te cacher et te sortir à sa guise. Ne te laisse pas faire Suzie, bouscule le un peu il en a besoin.
Greg me salue avec un air malicieux, je lui souris, un peu gêné de sa remarque. Il n’a pas caché son attirance pour moi depuis le premier jour mais il n’a fait aucune tentative de séduction. Son amitié avec Aédan doit être très forte et je respecte beaucoup cette fraternité. Greg mérite également de trouver une femme qui lui convienne. Même si avec Aédan il n’y aura peut être pas davantage que notre interlude d’hier soir je ne pourrais pas être avec lui. Il n’est pas question que je m'immisce entre eux.
Après le départ des garçons, Louise me prépare un bon thé et quelques toasts que j’avale rapidement. Elle me conseille de profiter de ce temps ensoleillé avant que les nuages ne fassent leurs apparitions. Voyant mon hésitation à quitter le château sans avoir encore pu voir Aédan, elle me confie que la soirée a été plutôt arrosée et qu’Aédan dort encore profondément.
- Vous êtes rentré dans sa chambre ? dis-je sur le ton de la surprise.
- Non Suzie, éclate-t-elle de rire malgré la gêne que la situation lui procure en s’imaginant rentrant dans sa chambre sans sa permission. Je respecte l’intimité de Monsieur. Il n’est plus un enfant Mademoiselle, c’est un homme aujourd’hui. Puis je n’ai pas eu besoin de rentrer dans sa chambre pour savoir qu’il dormait encore. Il m'a simplement suffit de passer devant sa chambre. Il y a encore 5 minutes j’ai entendu de gros ronflements sur le pas de sa porte et la terre trembler sous mes pieds.
Un regard de connivence et quelques éclats de rires plus tard. Alors que Louise retourne à ses occupations, je décide de suivre son conseil et de profiter du parc pour une petite balade. Un bol d’air frais me fera le plus grand bien pour mettre en place mes idées.
Des hennissements me sortent de ma rêverie et attirent mon oreille. Je me laisse porter par les sons et cherche les écuries. Après près d’une semaine je n’ai pas encore remarqué qu’il y avait d’autres êtres vivants au sein du domaine. Je dois absolument travailler sur cette bulle qui m’enveloppe et qui m'empêche de m’ouvrir au monde. Cette bulle que Jean a construite autour de moi pendant toutes ces années. Cette bulle me bride, me bâillonne, m’entrave. Depuis ma première rencontre avec Aédan, je tente vainement de la repousser mais cela ne suffit pas. Je dois la faire éclater.
J’adore les chevaux, ils ont une prestance que je trouve impressionnante. Je ne peux pas repartir d’ici sans m'être rendu aux écuries et admirer ces animaux majestueux. Devant eux, je suis comme cette petite fille, en admiration.
Pour sortir de ma zone de confort, je tente de m’approcher d’un cheval dans son box. Il a un regard qui ne m’effraie pas. Ma main s’approche tout doucement de lui et de son museau et celui-ci ne bouge pas. Au contraire, il se laisse approcher et il me laisse le toucher, le caresser. Forte de mon expérience, je continue de me promener dans les écuries. Celle-ci me semble immense, je tourne une fois à droite, je sors et rentre par une autre porte dans un nouveau bâtiment ou il y a encore d’autres box. Sans m’en rendre compte, je me suis perdu dans ce labyrinthe mais pour une fois, je m’en fous. Je suis calme, détendu et je continue ma visite. Ma bulle commence à céder.
Certains acceptent le contact alors que d’autres le refusent. Les animaux ne sont pas si différents de nous, êtres humains. La confiance est un sentiment qui se travaille avec certains tandis que pour les autres elle est instinctive.
C’est exactement ce que j’ai ressenti avec Aédan. Ma confiance envers lui a été instinctive. Par contre mon cerveau, lui, met une barrière entre nous pour protéger mon cœur meurtri alors que mon cœur, lui, s’abandonne totalement à Aédan. Mais à qui dois-je faire confiance ? Ma tête ? Mon coeur ?
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