Les plus beaux mots du monde
Le parfum de la nuit, une lueur vacillante,
Sa fraîcheur est exaltante.
Humide, sombre, imaginaire,
Son doux silence glisse dans l'air.
Sur ma peau tremblante,
L'odeur salée de menthe
Fait ressurgir
Mes innocents et lointains souvenirs.
Je marche alors.
Je n'existe plus
Dans les ténèbres de la rue.
Je marche encore.
Les feuilles sont immobiles sur les arbres
Cachés dans le noir.
Je l'aime tellement.
Je ferme les yeux et je vois une silhouette de marbre.
Je l'aime tellement.
Serait-ce la nuit de l'espoir ?
Quand les papillons brûlent leurs ailes
Sur les ampoules crasseuses des lampadaires
Transpirant des émois du crépuscule, elle
Me souffle, ses lèvres mordues : "Tu n'manques pas d'air !"
Je lui rétorque, les pieds ballants, la tête soumise,
Mon cœur affreusement épris de ses bêtises,
Que ma ponctualité n'est que l'égale de son caractère,
Que notre amour ressemble à tous ces bateaux,
Ces bateaux prisonniers de la marée capricieuse et
ses bas d'eau,
Que la nuit est tombée, que je n'ai plus les pieds sur Terre,
Que j'ai oublié comment compter le temps
Depuis que je l'ai croisée,
Les bras croisés,
Au détour d'un tournant,
Dans cette petite venelle fleurie,
Un beau jour de vendredi.
Et je lui proclame tant d'autres choses,
Des paroles insensées enrobées de roses,
Que dans le caveau des mules
La population ingrate pullule.
Que nous sommes confrontés,
Moi et mes semblables,
À la réalité,
Des funèbres et hypocrites conclaves.
"Pour s'en sortir enfin sans perdre ses sens,
Mon amie, donne-moi ta main
Et écrasons ces misérables,
Marchons sur leur piédestal bleu,
Pour fuir et voir le lendemain,
Notre maison fauve et de l'amour l'essence."
Elle regarde le cliquetis des mats,
Elle entend les vagues et les remords
Elle souffle encore une fois,
Puis répond bientôt, son regard vers le port,
Son cœur affolé en quelques secondes,
Par les plus beaux mots du monde.
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