Chapitre 27
Pendant les dix minutes que dura le trajet entre le lycée et le refuge, Lisa s’efforça de monopoliser la parole pour ne pas prendre le risque de laisser Joey amener la conversation sur le seul sujet qui devait le tourmenter à l’heure actuelle : sortir avec elle. Elle s’empêtra dans des propos sans queue ni tête, parlant des différents bouquins qu’elle devait lire pour son cours de littérature américaine, de la température idéale de cuisson des muffins aux myrtilles, de la meilleure façon de brosser un chat angora, sans oublier bien sûr d’ajouter quelques mots sur le temps qu’il faisait.
- Je trouve qu’il y a de plus en plus de vent, en ce moment, pas toi ?
- Oui, c’est vrai…, répondit machinalement Joey, qui paraissait plutôt préoccupé par autre chose.
- L’autre jour, le cactus que j’avais posé sur le rebord de la fenêtre de ma chambre a failli s’envoler ! C’est dingue ! Tu te rends compte, s’il était tombé sur quelqu’un ? Il aurait pu y avoir des blessés... C’est super dangereux, un cactus !
Le pauvre Joey semblait complètement noyé sous ce flot de paroles. Jamais il n’avait entendu Lisa parler aussi longtemps ni aussi vite, et il n’arrivait pas à saisir pourquoi elle se montrait aussi volubile. Toutes les trente secondes, il tournait la tête vers elle et entrouvrait la bouche comme pour lui dire quelque chose, mais il lui était à chaque fois impossible d’en placer une, et il gardait ainsi la bouche entrouverte, tel un poisson rouge hors de l’eau, avant de reporter son attention sur la route.
Lorsqu’ils arrivèrent devant le portail du refuge, Joey coupa le moteur de sa voiture et se tourna une dernière fois vers Lisa, qui détachait sa ceinture et s’apprêtait à partir. La jeune fille percevait clairement la frustration de son ami, et se doutait qu’il avait une question à lui poser et qui lui brûlait les lèvres… Il fallait qu’elle se sauve sans plus tarder.
- Merci de m’avoir déposée ! A demain ! dit-elle en posant sa main sur la poignée de la portière.
- Attends ! s’écria alors Joey. J’ai quelque chose à te demander...
« Oh Seigneur… »
- Euh… Ça ne peut pas attendre demain ? fit Lisa. Je suis assez pressée…
- En fait… Non… Ça ne peut plus attendre… Je dois vraiment te le demander maintenant…
- Ah ? Bon, OK, vas-y…, se résigna Lisa, qui se sentait désormais prise au piège.
- Euh… Voilà… Est-ce que tu crois… Est-ce que tu crois que… que..., bégaya le garçon.
- Que ? s’impatienta la jeune fille, bien décidée à ne pas lui rendre les choses faciles.
- Est-ce que tu crois que…, répéta Joey, de plus en plus mal à l’aise.
Son visage avait tourné au rouge pivoine, et des gouttes de sueur commençaient à perler sur son front. Il s’essuya d’un revers de la main, avant de se lancer enfin :
- Est-ce que tu crois que tu pourrais me faire visiter le refuge ?
Stupéfaite, Lisa mit un certain temps avant de réagir.
- Quoi ? s’exclama-t-elle.
- Oui, euh… Est-ce que tu crois que ce serait possible ? Ma mère va fêter ses cinquante ans le mois prochain, et j’aurais aimé lui offrir un chien comme cadeau d’anniversaire… Je pense que ce serait mieux si j’en adoptais un, pas vrai ?
La jeune fille n’en croyait pas ses oreilles. Où donc Joey était-il allé chercher une excuse aussi bidon ? Elle devinait qu’il ne s’agissait pas de la question qu’il avait voulu lui poser à la base, et qu’il s’était finalement dégonflé au dernier moment. Malheureusement pour elle, ce n’était que partie remise…
- Oui, bien sûr, c’est toujours préférable d’adopter un animal plutôt que d’en acheter un…, approuva-t-elle. Mais je croyais que ta mère ne voulait pas reprendre de chien, après la mort de Praline ?
Praline, c’était l’ancienne bergère allemande des parents de Joey. Elle était décédée l’année passée à l’âge respectable de quinze ans, et sa disparition avait causé beaucoup de chagrin à la famille Barker. En particulier à Joey, qui avait grandi avec elle, mais aussi à sa mère, qui s’était profondément attachée à cette bête.
- C’est vrai, admit Joey. Praline lui manque encore beaucoup… Mais je pense justement qu’un nouveau chien lui permettra de retrouver un peu le moral…
- Très bien. Dans ce cas, suis-moi…, dit Lisa à contre-cœur, avant de descendre de voiture.
Joey n’allait donc pas la lâcher de la journée ? C’était un véritable pot de colle ! Et dire qu’il la poursuivait même jusqu’au refuge pour animaux !
L’entrée de Joey et Lisa dans la cour principale du refuge fut accueillie par un concert d’aboiements et de glapissements. Surexcités, les chiens se jetaient contre les grilles de leur enclos, et c’était à celui qui s’égosillerait le plus fort pour réussir à attirer l’attention du nouveau visiteur et à se faire adopter.
- Tu as le choix, dit Lisa en montrant à Joey toutes les cages qui les entouraient. Il y en a plus d’une vingtaine…
- Effectivement, constata le garçon. Lequel tu me conseillerais ?
- Bah, je ne sais pas trop… J’ai toujours préféré les chats aux chiens… Tu n’as qu’à aller les voir et te faire une idée par toi-même…
Joey, cependant, n’avait pas l’air de vouloir s’approcher des enclos. Il restait planté au milieu de la cour, pivotant sur lui-même et regardant autour de lui d’un air perdu. Il n’avait probablement aucune idée de ce qu’il faisait là, et devait certainement commencer à regretter de ne pas avoir osé poser la bonne question à Lisa. Celle-ci était curieuse de savoir jusqu’à quel point son ami pouvait s’enfoncer dans son mensonge pour continuer à faire semblant de vouloir adopter un animal… Etait-il prêt à repartir avec un chien dans les bras, rien que pour faire croire à Lisa que son intention première avait réellement été de visiter le refuge, et non pas de lui demander si elle était d’accord pour sortir avec lui ? Elle imaginait déjà la tête des parents de Joey en voyant leur fils ramener à la maison un chien qu’il n’avait jamais prévu d’adopter. A cette pensée des plus cocasses, Lisa décida de s’amuser un peu et de prendre Joey à son propre jeu.
- Si tu veux, tu peux reprendre un berger allemand… Il y en a un, ici…, lui dit-elle en le conduisant vers l’une des cages. Il s’appelle Django. Il a quatre ans.
A l’approche de Lisa et Joey, le dénommé Django redoubla ses aboiements, dressé sur ses pattes arrière et appuyé avec ses pattes avant contre la porte grillagée de son enclos.
- Hmmm… Je ne sais pas…, fit Joey. J’ai peur qu’un berger allemand ne rappelle trop Praline à ma mère...
- Dans ce cas… Pourquoi pas un bouledogue français ? Ils sont très à la mode, en ce moment. Ici, nous avons Capucine, dit Lisa en présentant le petit bouledogue noir et blanc de l’enclos voisin. Nous l’avons recueillie il y a une semaine, mais il y a de fortes chances qu’elle soit rapidement adoptée…
La langue pendante et les oreilles dressées, Capucine dévisagea Joey de ses gros yeux globuleux.
- Désolé, mais non. Pas question d’adopter un chien aussi moche.
- Quoi ? s’offusqua Lisa.
Capucine, qui semblait elle aussi avoir compris cette remarque désobligeante, se mit à aboyer avec virulence.
- Ne l’écoute pas, Capucine, lui dit Lisa pour essayer de la calmer. Tout le monde sait que c’est toi la plus belle !
- Tu n’as pas quelque chose qui ressemble plus à un chien ?
- Il nous reste Princesse… C’est une golden retriever de onze ans… Ça fait un moment qu’elle est là… Ce serait vraiment formidable si elle pouvait trouver un maître, expliqua Lisa en menant Joey jusqu’à l’enclos de Princesse.
Celle-ci somnolait au fond de sa cage, à côté de sa gamelle encore pleine de pâtée. Lorsqu’elle entendit arriver les deux jeunes, elle ouvrit péniblement les paupières, et se mit à les regarder avec de vrais yeux de chien battu. Vu l’air misérable de l’animal, Lisa se dit que Joey allait finir par craquer. Et pourtant...
- Onze ans, ça fait déjà vieux, pour un chien…, commenta-t-il. Je ne voudrais pas qu’il nous quitte au bout de quelques années seulement et qu’il fasse de nouveau de la peine à ma mère…
Lisa montra finalement à Joey tous les chiens du refuge, s’arrêtant avec lui devant chacune des cages et vantant les mérites de son occupant, mais hélas, son ami ne paraissait jamais à court d’excuses pour ne pas céder à la tentation de l’adoption.
- Hmmm… Trop petit… Trop gros… Trop jeune… Trop vieux…
Au bout d’une heure et demi passée à tourner en rond, Joey n’avait toujours pas réussi à faire un choix, et Lisa finit par s’impatienter :
- Rhaaaa, ce que tu peux être difficile ! Pourtant, ce ne sont pas les chiens qui manquent, ici !
- J’ai besoin de temps pour réfléchir… Tu sais, adopter un animal, ce n’est pas une décision à prendre à la légère…
Sur ce point, Lisa dut avouer que Joey n’avait pas tort. Aussi décida-t-elle de mettre fin à son petit jeu et de laisser son ami repartir sans s’engager à faire une adoption qu’il regretterait par la suite.
- Presque cinq heures, déjà ! constata Joey en jetant un coup d’œil à son téléphone portable.
- Mince, et moi qui étais venue pour faire un peu de bénévolat…
- Désolé, c’est moi qui t’ai empêchée de travailler…, s’excusa Joey d’un air penaud.
- Pas grave. Je me rattraperai la semaine prochaine.
- Tu ne restes pas encore un peu ?
- Non, d’habitude je quitte le refuge à cinq heures, pour ne pas arriver trop tard chez moi et avoir assez de temps pour faire mes devoirs…
Lisa ne comprit que trop tard l’erreur qu’elle venait de faire en confiant à Joey qu’elle n’allait pas tarder à rentrer chez elle.
- Dans ce cas, on peut rentrer ensemble en voiture ! s’empressa de proposer le garçon.
Décidément, il ne perdait pas une occasion de coller Lisa comme une sangsue ! La jeune fille n’eut pas d’autre choix que d’accepter.
Lisa avait l’impression de passer sa vie dans la voiture de Joey... Elle finissait par connaître les morceaux de Within Temptation par cœur – cela faisait déjà plus d’une semaine qu’ils tournaient en boucle dans l’autoradio. Alors que le refrain de Our Solemn Hour battait son plein et que Lisa observait le paysage qui défilait à travers la vitre en pensant comme toujours à M. Bates, Joey s’exclama soudain :
- Tiens, on va passer à côté de la colline Buena Vista… Ça te dirait d’aller jusqu’au point de vue en voiture ? Il paraît que de là-haut on a un panorama magnifique sur le détroit de Greentown !
- Euuuh…
- Tu as bien le temps de faire un petit détour, non ?
- C’est-à-dire que j’ai encore une tonne d’exercices de maths à faire pour demain matin…, expliqua Lisa, qui sentait le traquenard à plein nez.
- Je te promets qu’on ne s’y arrêtera pas longtemps ! C’est juste pour prendre quelques photos... En plus, il fait beau, alors autant en profiter !
- Bon… D’accord…, se résigna Lisa.
Arrivés en haut de la colline, les deux amis descendirent de voiture et marchèrent jusqu’à un petit banc en bois, qui offrait aux promeneurs venus à pieds le moyen de se reposer de leur ascension tout en admirant le point de vue. Certes, le ciel était bleu et le soleil brillait encore assez haut en ce début de soirée de mars, mais il soufflait un vent glacial, qui décoiffa Lisa en un rien de temps. Essayant tant bien que mal de retenir ses cheveux avec ses mains, la jeune fille suivit Joey jusqu’au banc. Il n’y avait personne d’autre qu’eux aux alentours.
- Dommage qu’il soit encore un peu tôt pour le coucher du soleil…, dit le garçon en s’asseyant. Ça aurait été encore plus beau !
Lisa prit place à côté de son ami et dégagea les mèches de cheveux qui s’agitaient devant ses yeux pour pouvoir admirer la vue. La colline sur laquelle tous les deux se trouvaient surplombait le chenal, dont les eaux bleues limpides scintillaient à la lumière du soleil. Au loin, deux ponts parallèles traversaient le détroit, ajoutant une touche spéciale à ce paysage de carte postale. Lisa regrettait de ne pas avoir découvert ce panorama plus tôt. Elle se demandait comment elle avait fait pour vivre à côté durant toutes ces années, sans jamais y avoir mis les pieds… Cet endroit était absolument superbe, et elle aurait même pu le trouver calme et reposant, si seulement il n’y avait pas eu ce satané vent...
Une nouvelle bourrasque ébouriffa la jeune fille. Pestant violemment, elle s’efforça de rassembler les mèches qu’elle sentait tourbillonner autour de sa tête comme les tentacules d’une pieuvre enragée. Elle n’osait imaginer à quoi ressemblait sa coiffure… A rien, très certainement ! Et dire que Joey ne semblait même pas en faire cas… Lisa lui enviait ses cheveux courts... Il ne se doutait pas de la chance qu’il avait.
- Tu ne prends pas de photo ? demanda le garçon en sortant son smartphone pour prendre quelques clichés.
- J’aimerais bien, mais j’arrive à peine à voir le paysage en face de moi ! rouspéta Lisa.
- Attends, je vais t’aider, dit alors Joey en se penchant vers la jeune fille et en rassemblant délicatement ses cheveux châtains avec ses mains, pour lui faire une queue de cheval derrière la nuque. Vas-y, maintenant, tu peux sortir ton téléphone et prendre des photos !
Mais Lisa resta pétrifiée. Malgré la fraîcheur du vent, elle sentit ses joues s’enflammer. Depuis quand Joey était-il devenu aussi entreprenant ? Il paraissait bel et bien décidé à passer à l’attaque, et Lisa comprit avec effroi qu’elle devait s’attendre au pire… Extrêmement mal à l’aise – elle avait horreur qu’on la touche –, elle décida d’abréger ce supplice le plus vite possible, et sortit son portable de sa poche pour photographier le paysage.
- Voilà, c’est bon ! s’exclama-t-elle. Tu peux relâcher mes cheveux, maintenant !
Joey s’exécuta à contre-cœur, et les cheveux de Lisa se remirent à voler dans tous les sens.
- Rhaaa ! ronchonna-t-elle à nouveau en tentant de les retenir elle-même avec ses mains. Si j’avais su, j’aurais pris un élastique…
Le vent était tellement fort et tellement froid qu’il faisait pleurer Lisa et l’obligeait à s’essuyer les yeux toutes les trente secondes. Son nez coulait également, et l’air glacé qu’elle sentait sur sa gorge lui faisait regretter de ne pas avoir mis une écharpe. Elle n’osait avouer à Joey qu’elle était gelée, de peur qu’il ne profite de cette occasion pour la prendre dans ses bras et essayer de la réchauffer. Pas question qu’il la touche encore une fois ! Il n’y avait qu’un homme sur terre qu’elle aurait laissé faire, et cet homme s’appelait Harold Bates.
De plus en plus agacée par le vent, Lisa se tourna vers Joey, s’apprêtant à lui rappeler qu’il lui avait promis qu’ils ne resteraient pas très longtemps en haut de la colline, mais hélas, le garçon prit la parole en premier :
- Lisa, il y a quelque chose que j’aimerais te dire depuis un petit moment…
« C’est pas vrai, il ne va pas remettre ça… » fulmina Lisa intérieurement.
- Quoi ? Tu voudrais plutôt offrir un chat à ta mère ? s’exclama-t-elle sur le ton de la plaisanterie.
- Non, ce n’est pas ça…, dit Joey en se tournant à son tour vers Lisa pour la regarder dans les yeux. En fait, je… je crois que je suis amoureux de toi…
« Oh non… »
Voilà. Il l’avait dit. Que faire, maintenant ?
- Ah, tu… tu crois ? répéta Lisa d’un air incrédule.
Comment pouvait-on croire que l’on était amoureux ? Pour Lisa, c’était un non-sens total ! L’amour était si puissant que, lorsqu’il était là, on ne pouvait douter de sa présence. Lorsqu’elle était tombée amoureuse de M. Bates, cela avait été pour elle un tel bouleversement qu’elle n’avait pas eu besoin de se demander très longtemps ce dont il s’agissait : l’amour lui était apparu comme une évidence, et non pas comme un vague soupçon...
- Est-ce que ça te dirait qu’on sorte ensemble ? demanda alors Joey.
Bien sûr. C’était la suite logique du « je crois que je suis amoureux de toi ». La question tant redoutée par Lisa. Elle l’avait vue arriver à des kilomètres, et naturellement, elle avait déjà préparé sa réponse. En y repensant, c’était tout de même incroyable : avant qu’elle ne rencontre M. Bates, jamais personne n’avait cherché à sortir avec elle, et elle en était même arrivée à se demander si elle ne resterait pas célibataire toute sa vie. Mais depuis qu’elle était amoureuse de son prof de maths, cela faisait déjà le deuxième garçon qui lui demandait si elle voulait sortir avec lui ! Qu’avaient-ils donc tous à s’intéresser à elle, maintenant que son cœur était pris ? Elle les avait attendus pendant seize ans, et ils arrivaient tous trop tard !
- Joey, je suis vraiment flattée par ta demande..., commença-t-elle. Ça fait longtemps qu’on se connaît, tous les deux, et tu sais que j’apprécie beaucoup ta compagnie…
- Mais ? fit Joey, qui se doutait que son amie allait prononcer ce mot.
- Mais… Je préférerais qu’on reste amis…
- Pourquoi ? ne put s’empêcher de demander le garçon d’une voix plaintive.
- Parce que je suis…
Mais à cet instant précis, Lisa fut décoiffée par une nouvelle rafale de vent qui rabattit tous ses cheveux sur son visage.
- Rhaaaa, purée, j’en ai marre ! s’écria-t-elle comme une hystérique, en essayant de plaquer ses cheveux sur sa tête avec des gestes saccadés.
Si cet endroit avait paru à Joey comme l’endroit idéal pour faire sa demande à Lisa, il aurait décidément dû regarder la météo avant de se lancer...
- Désolée, s’excusa la jeune fille, une fois qu’elle eut à peu près regagné le contrôle de sa coiffure. Tu disais ?
- Non, c’est toi qui allais me dire pourquoi tu préférais qu’on reste amis…
- Ah oui, c’est vrai… Eh bien, c’est parce que je… je suis amoureuse de quelqu’un d’autre.
Joey entrouvrit la bouche de stupéfaction, comme si jamais il n’aurait pu songer à cette possibilité. Sans surprise, la question qui suivit fut :
- De qui ?
« De ton prof de maths » pensa Lisa – qui se demanda quelle aurait été la réaction de Joey si elle avait réellement prononcé ces paroles – avant de répondre à la place :
- Je ne peux pas te le dire…
- Dis-moi qui c’est, que je lui pète la gueule ! lança alors Joey en serrant les poings et en fronçant les sourcils.
Lisa resta bouche bée devant une telle démonstration de colère. A quoi cela lui servait-il de tenir de tels propos ? Pourquoi en vouloir à celui dont elle était amoureuse ? Lisa n’avait-elle pas le droit d’aimer qui elle voulait ? L’idée même que Joey en vienne aux mains avec M. Bates lui semblait totalement absurde.
- Ce n’est vraiment pas ça qui va m’encourager à te le dire ! s’exclama la jeune fille. Dans tous les cas, je suis désolée…
- Pas autant que moi…, répondit Joey en baissant la tête et en poussant un soupir.
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