Une douce baignade
C'était comme une douce baignade.
Son corps allongé sur l'eau. Le faible courant qui le poussait. Les ondes qui caressaient son dos. Les bruits diffusés d'un mouvement régulier qui l'apaisaient. Tout était si calme, au point que cet instant paraissait irréel. Ce liquide qui l'entourait semblait vouloir l'inviter à se laisser porter, à l'envelopper de cette froideur acceuillante et l'amener droit vers un endroit inconnu.
Ses yeux s'ouvrit sur le ciel. Les flots soutenaient toujours son corps mais les étoiles avaient rompu une partie de sa communion avec son environnement. Les paupières voulurent se fermer pour retrouver cette harmonie mais, en dépit de toute bonne volonté, elles restèrent ouvertes sur l'horizon de jais.
Cette vue n'empêchait pas de ressentir tout de même l'eau réconfortante à ses côtés, au contraire, elle soulignait son calme. Cependant, avoir activé un nouveau sens l'ouvrait à d'autres sensations. Ce n'était pas que les yeux qui s'éveillaient mais tout son être. Son esprit prenait conscience de chaque parcelle du corps. Les jambes détendus. Les mains reposant sur son ventre, se soulevant et retombant grâce à la faible respiration. Les coudes brassant l'eau au lent rythme de sa dérive. Un tiraillement sur les épaules. Le visage figé face au ciel.
Au fur et à mesure de ce réveil sensoriel, un fait apparu: ce corps était paralysé. En dessous de la peau, de l'énergie se diffusait dans les nerfs. Chaque muscle appelait à bouger, à renforcer ce contact avec l'eau en y plongeant dedans mais peu importe la volonté mise dans ce processus, les membres refusaient d'obéir. Comme si l'âme était coincée dans cette prison de chair.
Une peur naquit à cette réalisation mais rapidement, elle fut étouffé par la vue du ciel. C'est vrai. Paniquer ruinerait cet instant si doux. De toute manière, en étant dans l'incapacité de se mouvoir, rien ne pouvait être entreprit pour se sortir de cette situation. Alors, autant profiter de la situation et se laisser bercer par l'eau. S'imaginer que les bras et les jambes puissent devenir des nageoires pour se fondre avec elle et se libérer de ce vaisseau humain qui retenait son esprit.
A un moment, des branches d'arbre appurent dans le champ de vision et rapidement, la dérive s'arrêta et le corps demeura immobile dans la flotte. Le bruit linéaire qui rythmait son voyage fut remplacé par ce qui sonnait comme des voix. Des phrases s'échangeaient mais aucun mot ne résonnait clairement. Les sons dissonants se turent pour laisser place à un chant unique. Une ombre arriva devant ses yeux. A peine la forme se distingua comme celle d'une main que cette dernière se posa violemment sur sa tête et la poussa dans l'eau.
Et cette eau qui paraissait si généreuse en surface n'était qu'une abîme noire qui cherchait à présent le noyer.
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