Comment réussir à la laissé partir ?
"Mickaël"
Elle me rend fou, complètement dingue. Cassandra Dubois, m'a attrapé par les couilles et les tient bien fermement entre ses mains. Elle peut bien faire de moi tout ce qu'elle veut, tant qu'elle reste dans ma vie. La nuit dernière a été la plus intense de toute mon existence, la plus belle aussi. J'ai gravé toutes les images dans mon esprit, pour pouvoir me les repasser quand elle sera partie. Parce que oui, elle me quitte aujourd'hui et la douleur que je ressens est tellement intense, que j'ai du mal à respirer.
Elle dort encore profondément face à moi, ses longues boucles blondes s'étalent sur l'oreiller. Sa bouche est entrouverte, sa respiration est calme. Je n'ai pas fermé l'œil de la nuit, j'ai passé mon temps à la regarder. J'ai écouté tous les petits bruits qu'elle fait en dormant. Je l'ai vue froncer les sourcils pendant qu'elle rêvait, me demandant à quoi elle pouvait bien penser.
Je voudrais pouvoir la garder auprès de moi jusqu'à la fin de mes jours et je prie pour disparaître avant elle. Parce que je sais que sans elle, je ne suis absolument rien. Je veux pouvoir lui faire l'amour tous les jours pour lui montrer à quel point je l'aime. Je veux lui offrir le monde sur un plateau et vieillir à ses côtés. Je veux l'entendre rire, être là pour la consoler quand elle est triste et lui tenir la main dans la rue. Je veux l’embrasser à en perdre le souffle, je veux devenir son mari et qu'elle soit mienne pour toujours.
Elle n'a pas dit oui, mais elle n'a pas dit non, elle a juste été surprise. Je l'ai vu dans ses yeux quand je lui ai posé la question. Enfin, c'était plus une affirmation qu'une question en fait, mais c'est sortie comme ça, sans que j'y réfléchisse vraiment. C'est exactement ce qu'elle me fait. Elle me fait dire et faire des choses comme ça, sans y réfléchir, sans avoir pesé le pour et le contre, sans m'être demandé si c'est la bonne chose à faire. Mais même avec du recul, je ne reviendrai sûrement pas sur ma demande. Bientôt je recommencerai, elle mérite ce qu'il y a de mieux et j'espère que je serai à la hauteur de ce que je prévois.
Elle commence à s'agiter, je sais qu'elle est sur le point de se réveiller. Alors je la serre un peu plus fort dans mes bras et je la respire. Elle a toujours cette odeur de vanille que j'aime tant. Je me demande s'il serait envisageable que je la séquestre, attachée au lit jusqu'à la fin des temps. Je souris à cette pensée parce que telle que je la connais, elle me fera vivre un enfer. Mais pour l'enfer, je signe de suite si c'est avec elle.
Ses paupières se soulèvent et papillonnent plusieurs fois pour s'habituer à la lumière ambiante, ses yeux bleu gris plongent dans les miens. Putain, qu'est-ce qu'elle est belle, si elle pouvait ne serait-ce qu'apercevoir ce que je vois quand je la regarde, elle ne douterait plus jamais d'elle-même. Mon ange !
Elle se frotte les yeux et le visage, avant d'étirer ses lèvres en un sourire tellement sincère que je bande déjà. Je pourrai remettre ça et lui faire l'amour toute la journée, mais je m’abstiens. Je l'ai tellement baisée cette nuit, que mes couilles vont probablement être bleues pendant plusieurs semaines.
- Bonjour mon ange !
J'enfouis mon visage dans son cou, préférant éviter son regard parce qu'en cet instant, je suis triste. Je vais devoir la laisser partir et c'est la chose la plus difficile que je n'ai jamais eu à faire. Mais je ne veux pas qu'elle le sache. Quand elle me regarde, j'ai peur de craquer et je sais qu'elle verra tout de suite à quoi je pense. C'est comme si son cerveau était directement branché sur mon esprit, quand elle plonge son regard dans le mien. Je lui ai promis de lui laisser du temps et de l'espace, mais putain, qu'est-ce que c'est difficile.
- Bonjour bébé !
Ces mots dans sa bouche sont comme une litanie. Je n'avais jamais laissé personne me donner un surnom et encore moins celui-ci, mais quand elle le prononce, je trouve ça magnifique. Elle passe sa main dans mes cheveux pour les ébouriffer et j'adore ça. Elle essaie de rouler sur le côté pour consulter l'heure sur son téléphone, comme elle le fait chaque matin. Mais aujourd'hui, je n'ai vraiment pas envie de la laisser m'échapper, alors je la serre encore un peu plus fort.
- Lâche-moi Wilson, sinon tu vas finir par me mettre en retard !
Je finis par la relâcher, sachant pertinemment que je ne pourrai pas la retenir indéfiniment. Elle se lève complètement nue et se met en quête de quelque chose pour se couvrir. J'admire les courbes magnifiques de son corps, sa peau pâle, ses seins généreux dont la pointe se dresse fièrement devant elle. Sa taille fine, ses hanches développées que j'aime tant agripper, quand je la prends par derrière et ses longues jambes. Elle a repris le poids qu’elle avait perdu, quand j’ai eu mon accident et j’en suis content. Son corps tout entier est un appel au sexe et le pire dans tout ça c'est qu'elle ne s'en rend même pas compte. Elle ne voit pas à quel point les hommes la désirent et comment les femmes l'envient. C'est la chose la plus belle qu'il m'ait été donné de voir, de toucher et c'est à moi qu'elle appartient. Elle finit par débusquer mon tee-shirt de la veille, elle adore porter mes vêtements sales. Je me demande bien pourquoi, mais quand je vois le tissu descendre et s'arrêter juste en dessous de ses fesses, je la trouve encore plus sexy. Quand elle se penche un peu vers l'avant, je peux apercevoir le galbe de son cul. Elle se tourne vers moi.
- Je vais prendre une douche et si tu te dépêches un peu on aura peut-être le temps de s'arrêter prendre un petit déjeuner.
- Vas-y, j'arrive.
Et c'est tout ce que j'arrive à dire, je n'ai pas le courage de prendre ma douche avec elle. J'ai peur de flancher et de lui dire tout ce que j'ai sur le cœur, j'ai peur de la supplier de rester. Parce que je sais que si je lui demande, elle est capable de le faire juste pour me faire plaisir et il ne faut pas. Elle a besoin de partir, de se retrouver et je sais qu'elle est très enthousiaste à l'idée de donner des cours de pâtisserie. Je l'ai vu dans ses yeux quand elle m'en à parlé, je sais aussi que sa famille lui manque, elle a besoin de ce break. Mais putain, si je le pouvais je donnerais tout ce que je possède pour le faire avec elle. Mais c'est impossible, j'ai des obligations auxquelles je ne peux pas déroger et moi aussi j'ai des choses à régler ici. Ma mère et Sophia ont foutu un sacré bordel ces derniers temps et je dois m'en occuper, pour moi comme pour elle. Je pousse un soupir et me lève.
Quand j'entre dans la salle de bain, elle est enroulée dans une serviette, ses cheveux humides sont en bataille, elle est en train d'essayer de les démêler. Elle me regarde à travers le miroir et relève un sourcil.
- Tu es en retard, j'ai déjà fini ! Dit-elle.
- J'y vais, je n’en ai pas pour longtemps.
Je lui donne un baiser sur la joue et entre sous la douche. Avant de fermer la porte, je vois son regard dans le miroir qui me regarde en se mordant la lèvre inférieure. Je suis complètement nu, je n'ai même pas pris la peine d'enfiler un caleçon. Je croise ses yeux, et je vois qu'elle est perdue, mais en cet instant, je suis parfaitement incapable de la rassurer, parce que je suis tout aussi perdu qu'elle. Alors je ferme la porte et laisse couler mes larmes qui se mêlent à l'eau chaude.
Je suis habillé et prêt, enfin autant que je puisse l'être, j'ai l'impression que je pars pour le bagne. Elle est en train de finir de se préparer et moi j'ai un coup de fil à passer. Je vais m'enfermer dans mon bureau et compose le numéro.
- Bonjour monsieur.
- Bonjour Raûl, vous êtes prêt ?
- Oui monsieur, nous sommes à la gare, tout est prêt.
Je soupire, je sais que j'ai tort de faire ça, mais je n'ai pas réussi à me résoudre à la laisser partir sans surveillance. Mes équipes n'ont toujours pas mis la main sur ce détective privé qui la suivait et je ne suis pas tranquille. Je sais que je prends un risque en envoyant Raûl et Serge, parce qu’elle les connaît et qu'il est toujours probable qu’elle les reconnaisse. Mais je n'ai confiance en personne d'autre. Je sais aussi qu'ils sauront se faire discret, ils ont ordre de n'intervenir que si sa vie est en danger ou qu'ils repèrent Bouvier. Ce sont des anciens des forces spéciales, j'ai toute confiance.
- Très bien, je vous envoie par message le numéro de son siège, j'ai fait en sorte que vous soyez chacun dans une voiture différente de façon à l'entourer.
Je n'ai rien laissé au hasard, tout est sous contrôle. La porte s'ouvre et elle entre pour venir se mettre à côté de moi. Elle est magnifique dans son jean qui moule parfaitement toutes ses courbes, elle n'a aucun maquillage et ça me va. Elle est parfaite sans, elle n'est pas comme toutes ces femmes qui ont besoin de se tartiner le visage de peinture pour être sublime. Je m'éclaircis la gorge pour en finir avec cette conversation.
- Je vous recontacterai plus tard.
Et je raccroche, sans attendre la réponse. Elle fait pivoter mon siège et vient s'asseoir à califourchon sur moi, passant ses bras autour de mon cou. Je l’attrape par la taille afin de la rapprocher un peu plus, elle se penche et m'embrasse. Elle a le goût du café, je la savoure du mieux possible pour graver cet instant dans ma mémoire. Elle me relâche et penche la tête sur le côté.
- On va le prendre ce petit déjeuner ou il faut que je te traîne par la peau des fesses ?
- Tu peux bien me traîner ou tu veux ! Mais si ça pouvait être au lit ce serait encore mieux !
Elle fronce son nez.
- Pervers !
Et elle se met à rire en se levant, me laissant derrière elle.
Je la rejoins dans l'entrée, je lui prends sa valise et nous descendons au sous-sol. Quand les portes s'ouvrent, elle marque un temps d'arrêt.
- Nous sommes où là ?
- Dans mon garage !
Elle me regarde en plissant les yeux.
- Tu veux dire que tout ce qu'il y a là est à toi ?
- Oui, pourquoi ?
Je ne sais vraiment pas où elle veut en venir. Je me dirige vers le petit bijou de ma collection la Ferrari 488, elle me suit et reste bouche bée, quand j'ouvre le coffre pour y déposer sa valise.
- Il faut que tu m'expliques un truc là ! Me dit-elle.
- Quoi donc ?
- Pourquoi tu as autant de véhicules, alors que tu ne te déplaces qu'avec un chauffeur ? C'est complètement ridicule.
Je lui souris en lui ouvrant la portière.
- Et toi pourquoi as-tu autant de chaussures alors que tu n'as que deux pieds ?
Elle éclate de rire, alors qu'elle se glisse à l'intérieur.
- Bien vu !
Je contourne la voiture et me glisse sur le siège conducteur. Elle n'a pas vraiment tort, il est vrai que je ne me sers que très rarement de mes joujoux. Mais pour ma défense, c'est le seul plaisir que j'ai à part elle bien sûr. A l'intérieur, l'odeur du cuir m'enveloppe, je mets le contact et le moteur se met à rugir. Ce bruit est un doux son à mon oreille. Je m’engage sur la voie de sortie, la porte automatique s'ouvre à notre approche. Je m’insère dans la circulation, il est un peu plus de huit heures et son train n'est qu'à onze heures. Je pense avoir le temps de l'emmener où j'ai prévu, j'espère juste qu'il n'y aura pas trop de circulation, avec sa valise impossible de prendre la moto. L'endroit n'est pas très loin, mais on peut vite perdre un temps précieux.
Elle regarde par la fenêtre, elle a l'air perdue dans ses pensées. Je pose ma main sur son genou, elle porte le regard dessus et met sa main sur la mienne. Je me reconcentre sur la route. Quand j'ai réveillé Antony à six heures ce matin, pour lui dire qu'il me fallait une table pour deux vers huit heures trente, il m'a traité de connard. Rien à foutre, ce que je veux, c'est juste que tout soit prêt quand nous arrivons. Je vois du coin de l'œil qu'elle me regarde en fronçant les sourcils.
- On sort de la ville là. Tu m'emmènes où ?
- Prendre le petit déjeuner c'est bien ce que tu voulais.
Elle regarde autour d'elle essayant de deviner quelle idée j'ai encore bien pu avoir. Il faut dire que j'adore la surprendre, tout ce que je veux c'est qu'elle soit heureuse. Je sais qu'elle n'est pas particulièrement fan des surprises, mais celle-ci devrait lui plaire.
- D'accord, mais je te rappelle que mon train part à onze heures.
Comme ci elle avait besoin de me le rappeler, je ne pense qu'à ça depuis qu'elle m'en a parlé. Il m'a fallu faire appel à tout mon self-control ce soir- là pour ne pas exploser. Quand elle m'a regardé avec ses grands yeux surexcités en me disant qu'elle partait minimum six semaines, j'ai cru que mon cœur allait s'arrêter. Bien sûr, aussitôt j'ai posé plein de questions, elle a cru que je m'intéresserais réellement à ce qu'elle allait faire. Non pas que ce ne soit pas le cas, mais je mettais déjà mon plan de protection au point, putain si elle apprend ce que j'ai fait, elle va me pendre haut et court !
- Ne t'inquiète pas tu y seras et puis... Si tu le rates, il y en aura d’autres !
Hé ben, heureusement qu'elle n'a pas des mitraillettes à la place des yeux, parce que je serais déjà mort et enterré. Apparemment, elle n'est pas d'humeur à la plaisanterie ce matin et moi qui essaie de détendre l'atmosphère, c'est raté. Je lui serre le genou.
- Je plaisante, mon ange. Je plaisante, détends-toi !
- Et bien ce n'est pas drôle !
Bon, je vois que je ne suis pas le seul à être de mauvaise humeur. Dans le fond ça me fait quand même plaisir de constater, qu'elle est dans le même état de frustration que moi. Mais merde, c'est elle qui a décidé de partir, pas moi, même si je sais que j'ai ma part de responsabilité dans sa décision. Je voudrais pouvoir la rassurer, mais je ne peux pas, c'est au-dessus de mes forces. Je ne peux pas la regarder en face et lui souhaiter bon voyage, parce que je crève de trouille ! J'ai peur qu'elle rencontre quelqu'un, peur qu'elle m'oublie, peur qu'elle me laisse tomber. Elle a beau me dire qu'elle m'aime, j'ai l'impression qu'elle m'échappe tous les jours un peu plus depuis que nous avons eu cette discussion dans mon bureau.
J'ai essayé de me faire une raison, j'ai essayé de comprendre ses motivations. Je sais qu'elle a besoin de se retrouver, mais j'ai peur qu'elle se rende compte qu'elle est beaucoup mieux sans moi. Elle peut me briser en un claquement de doigt et je ne suis pas sûr qu'elle s'en rende compte. Pendant toute la semaine où elle a disparu, je n'ai pas mis les pieds au bureau. Je me suis enfermé chez moi et j'ai picolé, je pense que je n'ai pas décuvé durant ces sept jours d'intense souffrance. J'ai quelques souvenirs de Justin et Sasha qui ont essayé de me faire entendre raison, sans succès. Jusqu'à ce que Nico m'appelle pour me dire qu'il fallait que je vienne, qu'il ne savait plus comment faire avec elle. Nous en avons bavé tous les deux et c'est pour ça que je la laisse partir, mais putain, que c'est dur. Je l’ai fait souffrir et pourtant elle est encore là à côté de moi.
Je me gare devant le château, elle se penche un peu en avant pour observer l'endroit. Elle a les yeux ronds, quand elles les tournent vers moi.
- Ouaou, c'est magnifique, où on est ?
- Dans un restaurant en bord de Garonne en remontant vers le nord, à moins de trente minutes de Bordeaux. Ce qui nous laisse largement le temps de prendre le petit déjeuner. Viens !
Je lui prends la main et entrelace ses doigts aux miens, nous contournons l'imposante bâtisse sans passer par l'intérieur. J'aperçois au bord de l'eau la table dressée avec le chariot à côté. Parfait, tout est prêt, personne ne devrait nous déranger. Je compte bien profiter d'elle jusqu'au dernier moment. Elle semble ébahie par le cadre, un rien lui fait plaisir et c'est aussi une chose que j'aime. Elle se contente de peu et ne demande jamais rien. Elle s'installe, je lui sers une tasse de café et avance le chariot.
- Alors qu'est-ce qui te ferait plaisir mon ange ?
Je connais déjà la réponse, mais je pose tout de même la question. C'est une fan inconditionnelle de crêpes. Elle pourrait en manger jusqu'à être malade et si elles sont sucrées, alors là c'est carton plein. Et à ce que je vois, tout a été fait selon mes désirs. Elle regarde le buffet et passe la langue sur ses lèvres, mettant ma queue au garde à vous.
- Je veux bien des crêpes s'il te plait !
Je lui donne l'assiette et je prends un croissant. Elle goûte et pousse un gémissement de plaisir.
- Hum trop bon !
- Alors mon ange, qu'est-ce que tu as prévu de faire chez tes parents ?
Elle finit d’avaler ce qu'elle a dans la bouche et prend une gorgée de café avant de me répondre.
- Pas grand-chose en fait, profiter de ma mère, jardiner avec mon père et faire un peu plus connaissance avec mes neveux et nièces. Ça fait tellement longtemps.
Son regard s'est assombri en prononçant ses paroles et mon cœur se serre. Je sais à quel point elle est triste d'avoir perdu presque six ans. Elle a tout abandonné quand elle est partie et ça la ronge encore, je le vois bien.
- Je suis sûr que tout le monde a hâte de te voir descendre de ce train !
Par contre moi, je ne suis vraiment pas pressé de la mettre dedans, mais je me garde bien de le lui dire. Elle se met à rire.
- Oui Susanne m'a dit que si je changeais d'avis, elle viendrait me chercher par la peau du cul.
Et moi je serai prêt à l'accueillir pour la faire repartir dans le sens inverse ! Mais ça non plus, je ne lui dis pas. Elle fixe l'eau et son regard tombe dans le vague.
- Tu sais avec mon frère et ma sœur nous avons à peine trois ans d'écart et nous avons toujours été très complices. Nous ne faisions jamais rien les uns sans les autres, on nous a même donné un surnom, les Dubtrois, dit-elle.
Elle sourit, ce que j'aime la voir sourire. Elle baisse la tête.
- Et quand je suis partie quelque chose s'est brisé entre nous, c'est différent maintenant. On s'aime toujours autant, mais on ne se connait plus comme avant.
Je ne veux pas qu'elle parte triste, je veux la voir sourire et rire, c'est comme ça que je veux me souvenir d'elle. Je me lève et lui tends la main, qu'elle accepte sans hésitation.
- Viens, il nous reste juste assez de temps pour faire une promenade digestive.
Elle consulte l'heure sur son téléphone avant de me jeter un œil.
- Tu es sûr, il est déjà plus de neuf heures trente et s'il y a du trafic j'ai peur que...
Je ne lui laisse pas le temps de finir sa phrase.
- Je te promets que tu seras dans ce train.
A moins que... Est-ce que je connais quelqu'un à la SNCF qui pourrait faire annuler ce trajet ? Il me suffirait de quelques coups de fil. Je suis en train de faire défiler toutes les hypothèses dans ma tête, jusqu'à ce que je la regarde. Non, je ne peux vraiment pas lui faire ça, elle serait bien trop malheureuse.
Nous avons fait un petit tour de jardin en évoquant quelques souvenirs d'enfance, puis nous sommes retournés à la voiture pour prendre la direction de la gare. Plus j'avale les kilomètres, plus je suis nerveux et anxieux. Elle a allumé l'autoradio et elle chante "puisque tu pars" de Goldman. Putain, si même la radio s'y met, je ne vais pas m'en sortir, c'est à croire qu'elle a choisi exprès cette station. Je refuse d'écouter ça plus longtemps, je coupe le son. Elle se redresse et me regarde.
- Pourquoi t'as fait ça ? J'adore cette chanson !
- Franchement, c'est bien trop déprimant.
Je vois que ses yeux commencent à briller quand elle pose sa main sur ma cuisse. Je soupire et prends sa main dans la mienne avant de la porter à mes lèvres. Je suis vraiment un gros con, mais je n'ai vraiment pas besoin que la terre entière me rappelle qu'elle me quitte, je ne le sais que trop bien.
- Je suis désolé mon ange, tu veux que je la remette ?
Pourvu qu'elle dise non !
- Non, ça ira t'en fait pas.
Je change de sujet, je me suis promis qu'elle ne serait pas triste en partant et j'essaye du mieux possible de m'y tenir.
- Tu as fini par recevoir ton programme pour tes cours ?
Son regard s'illumine instantanément.
- Non pas encore, Stacy m'a dit que je devrais le recevoir environ une semaine avant mon arrivée.
- Et pour le logement tout est au point ? Tu sais que mon offre tient toujours pour mon appartement.
Elle soupire, nous en avons déjà parlé plusieurs fois et elle a toujours refusé. Elle est encore plus têtue qu'une mule. Elle me regarde.
- Lâche l'affaire Wilson ! C'est toujours non.
- Qui ne tente rien n'a rien !
Je n’insiste pas, mais bon dieu elle met mes nerfs à rude épreuve. Nous sommes presque arrivés et parfaitement à l'heure. Nous pourrons même prendre un café avant et lui en acheter un à emporter au Starbucks de la gare. J'emprunte le parking souterrain et me gare le plus éloigné possible de l'entrée. J'ai juste envie de faire un peu de chemin à pied avec elle en lui tenant la main. Je n'ai jamais vraiment été ce que l'on peut appeler romantique, mais avec elle je veux bien me balader main dans la main, lui dire des mots doux et la regarder manger une glace sur une plage. Enfin tout ces trucs que j'ai toujours trouvé complètement stupide. Putain, j'ai les hormones d'un ado, je suis vraiment mal barré !
- On va boire un café avant ? Nous avons largement le temps.
En consultant ma montre, je me dis que nous aurions eu le temps de baiser dans les jardins tout à l'heure, je ne suis jamais rassasié de son corps, au contraire plus, j'y goûte plus, je suis addict... Mouais c'est bien ça, un putain d’ado !
- Ok, mais avant je veux vérifier si c'est le bon quai inscrit sur mon billet.
- Sinon, on peut partir de suite et je t’amène directement là-bas !
Pourquoi n'y ai-je pas pensé plus tôt ? Quelques heures de plus en sa compagnie c'est toujours bon à prendre. Elle me regarde avec surprise et relève un sourcil. Bon, c'est officiel elle me prend vraiment pour un fou, mais je m'en tape. Elle secoue la tête.
- T'es dingue y'a au moins... trois cent kilomètres je dirais.
Trois cent soixante trois exactement, je le sais j'ai vérifié ! Mais je suis prêt à faire l'aller et retour si c'est pour gagner un peu de temps supplémentaire et qui sait, je pourrais peut-être grappiller une nuit de plus avec elle.
- Wilson, tu es définitivement bon à enfermer !
- Peut-être, mais mon offre tient toujours.
- C'est ridicule, j'ai déjà acheté mon billet.
Elle secoue le coupon juste devant mon nez. Putain j'ai une envie furieuse de la jeter sur mon épaule, pour la ramener direct dans la voiture. Mais je ne suis pas certain qu'elle apprécie. Je lui prends la main et l'entraine à l'intérieur, c'est blindé de monde, à croire qu'ils ont tous choisi ce jour-ci pour partir. Après avoir vérifié le quai, je l'entraîne au Starbucks. Je commande deux cafés sur place et un à emporter et je retourne m'asseoir en attendant que nos boissons soient prêtes. Elle m’attend sur la banquette, la tête tournée sur l'extérieur et posée sur sa main. Je me glisse à côté d'elle, l'attrape par la taille et la hisse sur mes genoux, elle pousse un petit cri de surprise avant de me regarder droit dans les yeux.
- Mais qu'est-ce qu'il te prend ?
J'ai juste besoin de la sentir contre moi une dernière fois, j'ai beau essayer d'être détaché, je n'y arrive pas.
- J'ai juste besoin de te prendre dans mes bras... Ou de te prendre tout court !
Je sais que ce n'est pas vraiment le moment, mais j'ajoute une pointe d'humour. J'ai besoin de la voir sourire et rougir juste pour me prouver que je lui fais toujours le même effet. Bingo ses joues deviennent rouges et elle éclate de rire tout en me donnant une tape sur l'épaule et puis je ne sais pas ce qui se passe dans son esprit. Mais tout à coup elle se renferme, ses yeux se mettent à briller. Non, je refuse qu'elle pleure, c'est son sourire que je veux graver dans ma mémoire, pas autre chose. Elle passe ses bras autour de mon cou et enfouie son visage dedans, je lui caresse les cheveux et le dos, nous restons comme ça un moment et puis je n'y tiens plus. Je lui tire un peu les cheveux pour qu'elle me regarde et je l’embrasse, juste pour lui montrer à quel point je l'aime.
Nous y voilà, à ce moment que je redoute depuis plusieurs semaines, cet instant où je vais la voir partir, sans moi. J'ai reçu un texto de Serge m'informant qu'ils sont déjà à leur place, parfait. Je monte sa valise et nous redescendons. Elle a toujours ce regard triste, ses yeux reflètent exactement mon humeur du moment. Elle est juste devant moi, mais pourtant, elle est déjà à des centaines de kilomètres. Je lui ouvre les bras et elle se jette littéralement à l'intérieur, je la soulève et elle entoure ma taille de ses jambes. Je l'entend prononcer quelques mots entre deux sanglots.
- Tu... vas me.... Manquer !
Alors je la serre un peu plus fort et je résiste à l'envie de lui demander de rester.
- Toi aussi mon ange, bien plus que tu ne pourras jamais l’imaginer. Je t'aime et je serai là à ton retour, si tu veux toujours de moi !
Elle s'apprête à répondre quand l'hôtesse annonce le départ imminent de son train, invitant tous les passagers à se rendre à leur place. Je la repose au sol et je l'embrasse une dernière fois. Elle monte, s'installe sur son siège et me fait des petits signes de la main. Je lui souris du mieux que je peux, mon cœur étant sur le point d'exploser. Quand le train s'avance, je reste immobile en la regardant partir, j'ai l'impression que mes pieds sont ancrés dans le sol, je me sens complètement vide. Elle part avec mon cœur et il ne me reste plus que la larme qui est en train de rouler sur ma joue !
Elle est partie...
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