Léo

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Elle était amoureuse de lui depuis l'adolescence. Toute petite déjà, elle avait l'habitude de le voir chez eux pour parler "affaires" avec son père. Elle l'avait toujours trouvé gentil. Il lui apportait des paquets de bonbons. Il ne lui prêtait pas plus d'attention que cela le reste du temps. Elle les entendait parler jusque tard dans la nuit. Marielle s'endormait bien après l'heure de son coucher, bercée par leurs chuchotements. Sur la table s'amoncelaient les bouteilles de bières et les parts de pizzas refroidies.

Sa présence ne l'intriguait pas, il faisait un peu partie de la famille. À l'époque, il enchaînait les stages en mécanique, ne parvenait pas à décrocher un contrat qui lui permettrait d'être à l'abri du besoin.

Marielle était élevée par son père depuis que sa mère était partie avec un autre homme et n'avait plus donné signe de vie. Elle se demandait toujours pourquoi elle n'avait pas reçu l'amour de sa mère. Qu'avait-elle fait pour être ainsi abandonnée ?

Son père, carrossier, travaillait dur pour lui offrir tout ce dont elle avait besoin, conscient qu'il ne pourrait jamais compenser l'amour d'une mère.

Ainsi son enfance ne fut pas désagréable, sa passion, la danse, remplissait sa vie. Des posters de danseuses couvraient les murs de sa chambre, son armoire regorgeait de tutus, de chaussons et de boléros.

Elle intégra le prestigieux Centre de la Danse à huit ans, pour la plus grande fierté de son père, car la sélection était rigoureuse. Marielle avait le profil parfait : droite, sérieuse, passionnée, ponctuelle. Depuis le départ de sa mère elle s'était forgée une carapace qui, de l'extérieur, pouvait la faire passer pour hautaine, froide.

Elle allait à l'essentiel, poursuivait son but inlassablement, et la plupart du temps, seule. Elle comptait ses amis sur les doigts de la main.

Un jour, à treize ans, à la fin d'un entraînement, elle se trouvait dans les vestiaires, après avoir pris une douche, quand un des danseurs faisant partie du groupe "Prestige", les quinze-dix-huit ans, la ceintura violemment, lui mit une main sur la bouche et commença à la peloter, tandis que son autre main s'insérait dans sa vulve. Elle ne pouvait rien faire malgré son désarroi, sa rage. Elle ne le connaissait pas, il l'avait sûrement épiée, suivie. Elle ne s'était doutée de rien.

Soudain il s'est arrêté, a relâché sa pression sur elle, l'a laissée respirer. Elle le vit traîné par terre, tiré par le col par un Léo furieux, les yeux revulsés, le poing prêt à donner une bonne leçon à l'agresseur.

  • Petite vermine, lui dit Léo, je te revois ici, tu n'as plus de visage, tu m'entends ? J'en ferai de la bouilllie, tu as de la chance que je ne porte pas plainte. Souviens-toi de ce que je te dis, ce sera facile de te retrouver dans ce quartier, je connais tout le monde. Un branleur comme toi, j'ai aucun problème à le dénicher. Maintenant, casse-toi !

Le jeune agresseur s'enfuit aussi vite qu'il était arrivé. On ne le revit jamais. Marielle mit longtemps à se remettre de cet incident. Normalement, c'était son père qui, chaque soir, venait la chercher à la fin des cours, mais cette fois-ci, il avait demandé à Léo de lui rendre ce service.

Ce jour-là a marqué un tournant dans sa vie adolescente. Léo devint plus qu'un ami de la famille, son sauveur. Depuis ce jour, leur relation changea. Son regard sur lui fut différent.

Leurs yeux se découvrirent l'un l'autre, leurs gestes furent plus affectueux.

Malgré son jeune âge, elle découvrait l'amour, en avait un peu honte, dissimula pendant des mois ses sentiments, n'en parla à personne. Comment le dire à son père ?

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