Purger sa peine
Je ne suis pas un garçon ordinaire. Je suis Léo, ce voyou que tout le monde craint. Cet homme tatoué bien connu dans mon quartier. Ce silencieux garnement qui commet des vols et des braquages sans conséquence pour subsister. Il a fallu qu'un jour, ce rouage bien rodé se grippe. J'ai perdu mes amis, ma réputation, mon amour de jeunesse. J'ai grandi dans un milieu où la prise de risques est reine, je suis frondeur et assoiffé de justice. Les coups bas, ça ne me connaît pas.
J'ai envoyé Roch faire le sale boulot parce que je suis coincé dans cette prison miteuse où chaque jour je lutte pour ma survie. Gagner le respect parmi les prisonniers, c'est un travail de longue haleine. J'y perds mon énergie. Entre deux insomnies, je guette mes futurs ennemis.
J'ai raconté tout ça dans une lettre que j'ai envoyé à Marielle pour lui faire comprendre ce que je vis. Même si on est éloigné par la force des choses, elle reste ma femme, celle qui m'accompagne dans les bons comme les mauvais jours. Celle qui me doit le dévouement. À jamais. Je crois qu'elle a compris. Quand elle a vu Jonathan se faire massacrer, ce fut plus clair pour elle. Depuis, elle a repris une vie tranquille, elle passe ses jours et ses nuits à m'attendre.
Pour ne pas être inutile, je passe un diplôme de soudeur à l'atelier de mécanique. Ça peut toujours servir. Marielle sera fière de moi. J'espère. Je sais qu'elle pleure. C'est le genre de fille vite dépassée par les événements. Quand je l'ai au téléphone, elle parle entre deux sanglots, ça m'énerve.
- Les choses vont s'arranger.
- Oui, je l'espère.
- Notre vie sera différente, je travaillerai, OK ?
- D'accord.
- Tu me crois quand je te dis que je ferai tout pour toi ?
- Oui.
C'est un "oui" timide pas très convaincu, elle se force à se montrer conciliante. Elle n'a pas le choix. elle ne m'encourage pas. Elle ne me réconforte pas. Elle me suit.
Notre relation a pris une drôle de tournure. La faute à mes errances, à ce Jonathan dont elle doit être secrètement amoureuse. Je jubile intérieurement, le voilà handicapé à vie. Je n'aime pas ce genre de mec, qui se comporte comme un petit chien. Il croyait qu'il allait se la faire. J'ai pu agir à temps, il n'y en a qu'un qui peut poser ses mains sur ses courbes à faire damner n'importe quel homme. Je ne suis pas patient mais il va falloir que je ronge mon frein dans cet endroit pour demeurés. Je ne suis pas à ma place. Mon avocat cherche à faire diminuer ma peine, je le paie assez grassement pour ça. Je parviendrai à mes fins, quoi qu'il en coûte.
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