Il laissa tomber le livre, prit un autre au hasard derrière lui.

Il attira avec rage le livre contre les piles devant lui qui s’écroulèrent. Il prit le premier livre du bas d’une pile sans se soucier de la faire tomber. Il voulait bouleverser l’équilibre de cette bibliothèque. Il ouvrit le livre au milieu et se mit à lire.

Il voulait bouleverser l’équilibre de cette bibliothèque. Il voulait faire basculer sa vie hors de ces livres, remplir ses poumons à chaque virgule, à chaque point de suspension… Et crier, déchirer le silence comme on déchire une page. Il était un personnage, pure fiction de papier et il sentait son corps rongé par les termites.

Il avança avec détermination, une détermination qui n’était pas, qui ne pouvait pas être retirée d’un des livres de cette bibliothèque. Oui, il prenait son destin en main, il l’écrivait comme il le voulait. Il avança droit devant lui renversant des piles de livres, les piétinant sans aucun remords. Il avait pourtant l’impression que c’était en lui-même qu’il enfonçait ses talons. En passant par les étagères, il retirait des livres et les laissait tomber. Il sentit autour de lui le vide que ces livres laissaient dans les rangées. Il s’imagina comme un texte entouré par l’espace vide de la page. Il se trouvait à la dernière page. Ses jambes commencèrent à faiblir, il avait du mal à soutenir le poids de son corps, le poids des étagères. Bientôt, il s’effondrerait.

Il s’approchait de la porte, le battement de son cœur ralentissait. Il savait qu’il devait sortir de cette bibliothèque pour renaître. Il parvint finalement à l’entrée, crispa sa main autour de la poignée, la tourna lentement. Il poussa la porte et découvrit des livres, de nombreux livres.