Sous le sable chaud
Je glisse mes pieds sous le sable chaud
Et mes yeux se perdent dans l'étendue d'eau qui s'offre à moi.
J'inspire l'air frais parfumé aux embruns,
Ecoute le doux son du ressac,
Ouvre mes bras accueillant la brise.
Je suis prête à vider mon sac.
La quiétude de la mer,
N'est que le reflet
De ma somnolente colère.
Si dans ma vie,
J'ai connu quelques péripéties,
Comme, adolescente, être raillée pour ne pas suivre les codes,
Détruisant ma confiance en soi
Qui peine à revenir encore aujourd'hui.
Comme m'annoncer une maladie incurable,
Avec qui je vais devoir partager le reste de ma route,
Sans comprendre pourquoi cela tombe sur moi.
Mes ressentiments enfouis ne sont pas pour ma petite personne,
Mais à toutes celles qui subissent des injustices au quotidien.
A toutes ces femmes qui doivent se justifier
De leur réussite,
Car c'est bien connu, c'est leurs patrons qu'elles ont aiguichées.
De leur tenue,
Car trop ou pas assez habillées, c'est une catain ou une persécutée
De ne leur non envie d'enfants,
Car une femme au saint uterus doit connaître les joies de la matérnité,
D'être la victime,
Car elle devient riche et célèbre avec un viol dénoncé.
Avec ces pensées sarcastiques,
Je grince des dents,
Derrière un rictus caustique.
A toutes mes soeurs
Qui ne peuvent pas rentrer seules le soir
Dans la crainte de se faire agresser
Sous prétexte de leur beauté
Ou que leur peau se fasse aperçevoir
Hélas ! Ce ne sont pas que des terreurs nocturnes,
Même sous l'astre diurne,
La violence est toujours présente.
Cela peut être votre voisine,
L'inconnue qui prend le même métro,
Aucune de leur vie est anodine,
Et pourtant quelqu'un a décidé que c'était trop.
Je lis alors dans les journaux :
Féminicide
Au bout de mes bras,
Mes poings se serrent
A mesure que gronde ma colère.
Au bout de mes pieds,
Se diffuse l'ardeur
Dans le sable, ma fureur.
Je lance un cri,
Jusqu'à ce que je m'essouffle.
Le froid de la mer lèche mes orteils
Ou est ce les cris des corneilles
Qui m'ont sorti de ma torpeur.
Les vagues se brisent sur les falaises
Je ne ressens aucune peur
Je suis à mon aise.
Inspire
Expire
Et ainsi de suite.
Je m'avance vers l'océan
Oubliant que j'avais des vêtements
Et profite de cet instant,
Dans ce havre de paix.
J'ai encore trop de raisons de m'indigner,
Trop de causes à mon irritation,
Mais je laisse le fracas des vagues
Exprimer mon courroux.
Je ne suis qu'une femme,
Qui veut vivre sa vie.
Ici, personne ne m'empêche de le faire.
D'admirer l'infinité de l'eau,
La couleur dorée des grains de sable,
L'immensité du ciel sans nuages,
Dévoilant la grandeur du soleil.
Je souhaite que tout individu sur cette Terre
Puisse ressentir cette tranquilité,
Cette puissance qu'offre la confiance,
Et que rien ne peut l'arrêter.
Je songe au poème de Paul Eluard
Liberté
Serait-ce cela la liberté chérie ?
Liberté, j'écris ton nom
Ces mots résonnent désormais en moi.
Sur le sable chaud,
Par mes jambes dansantes
Se dessinent les lignes
Liberté
Ma valse entêtante
Ne s'arrête pas là.
Ainsi j'écris la suite
Egalité
C'est ce à quoi j'aspire
Pour y arriver,
Nous devons être ensemble.
Sororité
Un jour certain
Il y aura un mot
Dans notre belle langue
Ne distinguant pas les frères des soeurs,
Qui viendra remplacer celui-ci.
Le combat doit continuer.
C'est sous le sable chaud,
Entre ces mots,
Que je me pose.
Si ma prose
N'est que laideur,
Mon esprit est sage
En attendant l'heure
D'exprimer sa rage.
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