09 - Bois
- Les deux en simultané ? Tu es bien sûr de toi ? C'est un gros challenge, tu sais, ça peut très bien se passer comme tu peux te griller et passer pour un salaud auprès de bons nombre de demoiselles. Et une fois que tu as une réputation comme celle là, c'est très difficile de s'en défaire.
Quentin porta sa pinte à sa bouche et en but une grande lampée. A ses côtés, Sarah, sa colocataire, le regardait d’un air narquois.
- Il faut dire qu’en matière de mauvaise réputation, tu t’y connais, riait-elle.
- Je t’en prie, tu es bien contente, quand je ramène des filles à l’appart’. Tu crois que je ne t’ai pas vu passer ton temps à reluquer mes conquêtes ?
- Et toi les miennes. Je n’y peux rien si nous avons les mêmes goûts en partenaires d’un soir.
J’écoutais d’une oreille distraite leur joute verbale, attendant de savoir qui l’emporterait. Sarah avait une répartie impressionnante, toujours la petite phrase piquante qui finissait par lui donner raison. J’aurai pu la trouver très attirante si je ne savais pas qu’elle préférait les femmes.
- D’ailleurs, puisqu’on a les mêmes attentes, on pourrait organiser quelque chose, un soir ?, se risquait Quentin.
- Laisse tomber, coloc’, je ne partage pas. Mes conquêtes, mon plaisir. Demande à Tristan de te laisser celle qu’il ne choisira pas !, conclut-elle en s'esclaffant.
- Au moins, j’ai la liberté de choisir, répondis-je en trinquant avec Sarah.
Quentin nous regardait d’un air mauvais. Il n’aimait pas être relégué au second rang et n’être qu’un second choix. Finalement, un sourire illumina son visage :
- Ca vous dirait un petit jeu ? Par exemple, “Je n’ai jamais” ?
- Oh oui, on va bien s’amuser, s’enthousiasmait Sarah.
- Si tu veux, répondis-je. Je pense que je ne crains pas grand chose.
- C’est ce que tu crois. Je commence. Je n’ai jamais eu deux relations en simultané.
Mon frère me regardait d’un air conquérant. Je contestais ce qu’il insinuait :
- Techniquement, je ne sors pas avec deux filles en même temps. Je ne suis même sorti avec aucune.
- Tais-toi et bois. Tu vas sortir avec les deux, alors tu bois.
- Allez Tristan, je t’accompagne, m’encourageait aSrah en buvant une gorgée.
- Ah oui, tu es ce genre de fille ?, interrogeait Quentin.
- Je considère que d’avoir plusieurs sex-friends en même temps, c’est avoir plusieurs relations en simultané. Donc je bois.
- Mince… Bon, je bois aussi alors !, finit Quentin.
- A la vôtre, concluais-je en buvant une grande gorgée de ma bière brune.
Le bar autour de moi commençait à tourner. Ma première pinte m’avait déjà bien éméché. Chaque nouvelle gorgée me donnait un peu plus le vertige. Je prenais la parole en regardant mon frère dans les yeux :
- Je n’ai jamais fantasmé sur ma colocataire.
- Espèce d’enfoiré, marmonna Quentin en avalant une nouvelle gorgée.
- Allez, bois !
Je les entendais scander chacun leur tour de nouvelles phrases “Je n’ai jamais bu d’absynthe”, “Je n’ai jamais surpris mes parents pendant l’acte”, “ Je n’ai jamais couché dans les toilettes d’un bar”... Parfois, je buvais, parfois non. Je ne trouvais plus de nouvelles phrases et subissais les assauts de mes partenaires de boisson. Ma vue commençait à se brouiller et tout devint noir. Je me sentais m’effondrer, mais un bras me retint sur mon tabouret.
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