Le départ !

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Le début du marché aux fleurs est dans moins d’une semaine. Octave est venu dans ma chambre avec une femme. Il me la présente comme Xiana la dernière « Rose éternelle ». C’est une magnifique jeune femme svelte à la peau dorée. Ces petits yeux noisette et son large sourire lui confèrent une aura rayonnante. Octave m’explique que Xiana et M. Anme m’aideront à me préparer pour jouer mon rôle de nouvelle « Rose éternelle ». Xiana m’apprend à utiliser mon corps pour charmer ces serpents à sonnettes. Elle me donne aussi quelques conseils pour fuir si je me retrouve en mauvaise posture, mais aussi pour ne pas céder aux tentations. M. Anme m’aide à me forger une carapace et à me protéger de leurs regards, ainsi qu’à leurs remarques de monstres. Je n’ai pas beaucoup de temps pour tout assimiler, mais suffisamment pour aider M. Leconoistre à sauver ces pauvres enfants. Un homme est venu pour prendre mes mensurations. D’après Xiana ma tenue sera éblouissante. Je n’ai pas pu la porter avant notre départ.

C’est la veille du départ et je n’ai pas revu ni Paul ni M. Leconoistre. G. n’arrête pas de m’écrire que je dois parler à Paul, mais je n’en ai pas l’envie. Je m’installe dans le lit, mais le sommeil ne vient pas. M. Anme m’a conseillé d’écouter le bruit des vagues. Je choisis avec ma montre de mettre au mur un paysage d’une plage sous le ciel étoilé. J’active le son et le bruit de va-et-vient de l’eau se synchronise avec les images au mur. J’écoute les vagues s’échouer sur le sable. J’observe l’écume se former au sommet des vagues avant de s’étaler sur le sol. Les algues et les coquillages sont lentement bercés par ce doux mouvement. Les étoiles scintillent dans l’eau comme des diamants. Je sens l’air marin me chatouiller les narines. Mes pieds dépassant de la couverture s’enfoncent dans le sable mouillé. L’air frais de l’océan caresse ma peau et fait s’envoler mes cheveux. Je sens dans ma main un coquillage rugueux que je tourne pour caresse sa partie intérieure complètement lisse. Je sens une légère chaleur se répandre sur mon corps et une douce lumière perce à travers mes paupières. Je place une main sur mes yeux, avant de les ouvrir lentement pour m’adapter à la luminosité. C’est l’aube et les couleurs chaudes chassent lentement le sombre ciel bleu. Je me place sur mes coudes pour mieux observer cette lente ascension. Je vois au bord de l’eau une ombre. Je me lève en me réchauffant dans ma couverture et me dirige vers les vagues. Une silhouette, le regard vers l’horizon de l’océan, se découpe au fur aux mesures de mes pas. L’air est froid et je ressers la couverture sur moi. Je hèle la personne. Elle se tourne vers moi. Je m’avance encore et vois cet homme avec un long caban noir avec le col relevé qui cache une partie de son visage. Il porte une casquette de capitaine bleu marine qui couvre ses yeux d’une ombre. Je n’arrive à distinguer son visage. J’essaie de concentrer, mais la lumière de l’aube m’aveugle. J’avance encore, mes pieds nus glacer par le froid du sable mouillé. Il me tend sa main. J’hésite et pose doucement ma main sur la sienne. Une chaleur m’envahit soudainement à son contact. Il referme délicatement ses doigts et m'invite à la suivre. Mon corps à moitié gelé par l’air de l’océan se réchauffe près de lui. J’essaie de distinguer les traits de son visage, mais le soleil m’éblouit. Un réconfort m’enveloppe, un sentiment de plénitude m’envahit et un large sourire se dessine sur mon visage. Il prend une respiration près à parler, quand je me réveille dans mon lit. Tout ça n’était qu’un rêve. Un rêve. Je viens de rêver, d’avoir un doux et agréable rêve et non ces immondes cauchemars dont j’ai l’habitude. Je reste un long moment dans mon lit pour garder en mémoire cet instant. Cet homme qui est-il ?Je ne peux pas rester plus longtemps dans cette chambre, je dois partir avec M. Leconoistre et Octave pour le marché aux fleurs. Cette nuit me donnera peut-être la force pour affronter les semaines qui suivent. Je me prépare et me dirige vers le bureau de M. Leconoistre. C’est Octave qui m’accueille récupérant les dernières affaires.

— Bonjour Mme Gouest, M. Leconoistre est déjà au quai d’embarquement. Êtes-vous sûre de vouloir venir ?

— Oui, je dois le faire. Je peux peut-être vous aider ?

— Non, ne vous inquiétez pas, suivez-moi.

Nous nous dirigeons vers ce même quai, qu’il a 1 an. Je me fige un instant avec une boule dans le ventre qui me coupe la respiration. Une voix me tire de ma léthargie.

— Elena, est-ce que ça va ? Tu es toute blanche ?

Paul est venu me dire au revoir.

— Oui, c’est juste que c’est étrange de se retrouver là pour retourner dans cette fosse aux lions. Tu ne trouves pas ?

Je n’ai pas le temps de réagir, que ma tête est déjà contre sa poitrine. Il m’enlace comme un cocon protecteur autour de moi.

— Si tu ne veux pas ou si c’est trop dur pour toi, personne ne t’en voudra. Tu as déjà traversé beaucoup d’épreuves, rien ne sert de continuer à souffrir.

J’entends son cœur qui bat et cette chaleur réconfortante me rappelle mon souvenir de la nuit dernière. Est-ce lui ? Je me détache de lui et souris.

— Merci, Paul, d’être là. Je sais grâce à toi pourquoi je dois le faire. Je reviendrais plus forte qu’avant.

Je l’embrasse sur la joue et me dirige vers le vaisseau. Paul me retient.

— Ne pars pas. Reste avec moi. Je peux t’aider. Je peux faire ce que tu veux. Je…

Je le regarde un peu confus. Je ne sais pas ce qu’il attend de moi. J’essaie de libérer mon bras.

— Elena, je t’aime. Laisse-moi m’occuper de toi. Reste avec moi.

Mais est-ce que moi je peux l’aimer ? Est-ce que j’ai le droit de l’aimer ? Et si je le faisais souffrir ; et s’il était triste de vivre avec moi. Toutes ces questions qui se répètent sans trouver de réponse.

— Paul, je ne…

Je n’ai pas le temps de répondre qu’il caresse délicatement ma joue avec sa main chaude. Cette chaleur enivrante, cette douceur rassurante. Il approche son visage du mien et ferme les yeux.

— ELENA, IL EST TEMPS DE PARTIR !!!

Octave crie depuis le vaisseau. Paul s’arrête, les joues rouges et me laisse partir.

M. Leconoistre, c’est placé à l’avant du vaisseau, pendant qu’Octave m’aide à m’attacher. Je le remercie, tout en repensant au fait qu’il a arrêté Paul. Je m’installe confortablement et repense à l’homme de mon rêve. Un sentiment nouveau m’envahit. Un sentiment qui accélère les battements de mon cœur, réchauffe ma peau et rend ma respiration saccadée. Un sentiment que je n’arrive pas à contrôler. Je me laisse bercer par le mouvement du vaisseau avant de m’endormir.

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