Le Pouvoir

2 minutes de lecture

Sur la colline battue aux quatre vents, sept corps allongés, vêtus de blanc, psalmodient le même couplet. La mousse gorgée d'eau accueille le corps des enfants allongés, dont les lèvres remuent en accord parfait. Ils se donnent la main. Ils ont les yeux fermés.

Le soleil tend une toile orangée qu'il écroule en se laissant tomber.
Alors le crépuscule étire sa couverture sur le monde, sur les corps allongés.
Et les voix à l'unissons résonnent plus fort :

« Mane corvi corrodent et terra aperiet ! Te vocamus, te vocamus... »

La litanie reprend et tissera jusqu'à l'aube un sortilège toublant.
Sur une pierre, haute et plate, le maître de cérémonie, assis en tailleur, veille les enfants.

« Mane corvi corrodent et terra aperiet ! Te vocamus, te vocamus... »

Au crépuscule, succède l'heure des loups. Ils approchent, devancés par leurs hurlements. Ils déroulent les phalanges de leur pattes en silence, tandis que leurs chants soutiennent la litanie des enfants.
Autour de la pierre, sur le sol, ils s'étendent. Ils veillent le veilleur.

Sur la voûte céleste sept étoiles s'alignent en arc au-dessus des corps étendus.
La nuit déploie tout son temps.

« Mane corvi corrodent et terra aperiet ! Te vocamus, te vocamus... »

L'aube presse la naissance d'un nouveau cycle. Les étoiles s'affadissent et les loups s'en vont sans un regard en arrière.
À présent le veilleur appelle les corneilles :

« Corvi corrodent. »

La rosée s'est déposée sur les enfants allongés. Ils brillent d'une lumière particulière qu'ils ont emprunté aux étoiles.

«Et terra aperiet ! »

La colline tremble, pousse. De ses entrailles, une cheminée sort et s'étire faisant rouler les corps endormis.
À présent, un calme sans bruit habite les lieux. Cela ne dure qu'un instant car soudain un grondement puissant fracasse le silence et la Terre s'ouvre en deux. Elle laisse passer un monticule, d'où jaillit un feu follet éclatant, éclipsant un instant le soleil renaissant.

Déroutés, hagards, les enfants s'éveillent, se relèvent, se rapprochent les uns des autres pour se rassurer. Ils ont froid.

Sur la pierre comme une stèle, le veilleur devient le prédicateur :

« Te vocamus, te vocamus... »

Alors les corneilles arrivent en rangs serrées. Elles se dirigent et tournent autour du gouffre qui vomit une terre noire. Lorsque cela cesse, un arbre vient à pousser.

Les enfants dévalent la colline, terrifiés, ils ont suivi le prédicateur, hypnotisés. Ils fuient maintenant la terre sacrée pour rejoindre le village, où ils auront tout oublié.

Et tandis que les corneilles croâssent, un arbre nourri de sa terre noire, s'élance vers le ciel, un seul arbre, un miracle, tous les mille ans. Un arbre pour produire un fruit unique exauçant un voeu sans limite pour qui le dévore.
Le prédicateur n'attend pas une seconde pour l'avaler.

Une nouvelle ère commence.




Annotations

Versions

Ce chapitre compte 7 versions.

Vous aimez lire sortilège ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0