un gyrophare - un polaroïd - un moulin à café - un chapeau de torréro - un panier à salade
Sacha se concentrait sur son expérience. Elle voulait mesurer la longueur énergétique de l'odalisque lorsqu'il se trouvait en contact avec la pierre de lune. Comme tout scientifique de la tour principale de Ransca, siège de la magie du royaume de Logre, elle avait attendu que le signal bleuté de la balise éclaire par intermittence les façades du capitole de l'autre côté de la rue. Le Gardien avait la charge de le mettre en route chaque matin aux premières lueurs du jour. Il devait attendre fébrilement le moment ou le premier rayon de l'astre diurne frappait la paroi transparente et bleue de cylindre avant de basculer le petit interrupteur noir sur le un, sur le côté de l'engin. Cette tâche, qui en soit n'avait rien de compliqué, s'avérait particulièrement délicate les jours où les rayons du soleil ne parvenaient pas à traverser l'épaisse couche nuageuse. Ces jours-là, il n'était pas possible de travailler pour Sacha et ses collègues. Sans la balise, les émanations magiques s'échappaient par les fenêtres de la tour et se répendaient hors de la capitale. Elles s'abbattaient fatalement plus loin dans le pays en faisant parfois des dégâts considérables. Ouvrant une brèche sur l'un des univers parallèle, les résidus magiques laissaient passer des créatures venues tout droit des Enfers.
Dans ce cas-là, Sacha devait partir avec ses collègues avec son Kaptodamone, un objet datant du siècle précédent terriblement redoutable face à ces créatures infernales. Il fallait simplement placer son oeil sur le viseur et fixer le monstre à emprisonner. En appuyant sur le déclencheur, la créature se retrouvait retenue captive sur le papier glacé de quelques centimètres. La bête ne peut plus alors s'échapper du petit espace en deux dimensions. Certains magiciens les collectionnaient et en faisaient des albums. Pour sa part, Sacha ne gardait que les plus affreux qu'elle affichait sur laporte de son bureau afin de dissuader les visiteurs indésirables.
Mais ce jour-là, Sacha ne risquait pas d'ouvrir une brèche intempestive. Elle aligna alors l'odalisque et la pierre de lune, traça des symboles runiques pour mettre le sort en place. Elle prit ensuite en main la poignée en bois de la moulinette. La bras mécanique de l'appareil refusa d'abord de bouger. La jeune femme, habituée à l'objet récalcitrant, força davantage et l'engrenage se mit en branle. Le dome métallique abritait les runes brunes que Sacha devait réduire en poudre. Les dents de l'engrenage mordait les petits pions d'argile à chaque tour de manivelle et les transformait en une fine poudre ébène qui emplit progressivement la caissette en bois se trouvant sous la moulinette. Sacha en nage après tant d'effort, arrêta le mouvement et retira la caissette. La poudre runique vibrait chaque fois que les grains roulaient dans la caissette. Avec précaution, la jeune femme déposa la poudre magique et en préleva une pincée. Elle se plaça au milieu de son expérience et au moment où elle lâcha les grains sombres, une détonation retentit.
La tour sembla vaciller. Sacah perdit l'équilibre. Elle eut tout juste le tempsde s'aggriper au chambranle de la porte contre laquelle elle était tombée avant que la tour ne s'incline dans le sens opposé. Elle enfila son chapeau de sécurité qui pendait à son cou. C'était une sorte de coque plate noir avec deux protège-oreilles en mousse noire également. Fabriqué sur-mesure, le couvre-chef la protégeait des heurts d'objets projetés à cause des oscillations de la tour. Lorsque le bâtiment se mettait à bouger de droite à gauche comme un balancier ou un pendule, il fallait souvent plusieurs minutes voire une bonne heure pour que le mouvement ne s'arrête enfin.
Alors que la tour atteignait le point bas et qu'elle entamait le mouvement inverse, Sacha se demanda ce qui avait bien pu déclencher la secousse. Elle avisa son chaudron portatif qui fit un vol vers elle. Agile et rompue à l'exercie, elle étendit une jambe et rattrapa du bout du pied son matériel. Elle n'avait pas envie d'abîmer le panier métallique. Les minces fils de fer s'entrelaçaient pour former des pieds, un ventre et un col sur lequelune anse était fixée. Sacah l'avait acheté avec son premier salaire de magicienne deux ans aupravant.
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