Chapitre 28

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Les Cruz passèrent Noël en famille, selon la tradition. Cassie se réveilla tôt le matin du fameux jour. Elle força son père et son frère à se lever. Une fois sûre qu'ils ne se rendormiront pas, elle se précipita dans le salon et s'agenouilla devant le sapin de Noël installé quelques jours plus tôt. Elle s'empressa de déchirer le papier qu'entourait les cadeaux. La jeune fille sauta de joie quand elle finit de le déballer. Felipe avait économisé plusieurs mois pour lui acheter un nouveau téléphone, le sien était à deux doigts de rendre l'âme. Quant à son frère, il lui avait offert la paire de talons dont elle rêvait depuis longtemps. Son père lui avait toujours refusé, prétextant que ce n'était pas de son âge, une excuse parce qu'il ne voulait pas voir sa fille devenir une femme.

Cassie sauta au cou de son père, puis claqua deux baisers sur les joues de son frère avant de le serrer très fort dans ses bras.

Elle abandonna soudain ses cadeaux sur le canapé et se glissa derrière le sapin. Tandis qu'Ace regardait sa sœur se tortiller, un sourcil levé, Felipe s’éclipsa avant de revenir avec une boite entre ses mains.

— Joyeux Noël !

— C'est pour moi ? demanda Ace en se saisissant des présents.

— Bien sûr, idiot. Allez, dépêche-toi d'ouvrir ! le pressa Cassie.

— J'ai eu un mal fou à la forcer à garder le secret, soupira Felipe, un sourire aux lèvres.

Ace s'assit sur le canapé. Il commença par déballer le plus petit : il en ressortit un écrin bleu nuit. Il devina immédiatement ce qu'il contenait.

— Papá, tu n'as pas fait ça...

Il ouvrit l'écrin pour y découvrir une montre. Celle qu'il avait repérée cet été quand ils étaient partis en vacances.

— Je suis allé la chercher lorsque Cassie et toi étiez à la plage.

— Mais elle coûtait beaucoup trop cher... commença Ace à voix basse, en retournant l'objet dans ses mains.

Le bracelet était en cuir noir et tranché avec le cadran argenté.

— Disons que c'est une avance sur ton anniversaire, le taquina son père.

— Gracias, papá.

Il avait dû se résigner quand il avait vu le prix affiché en dessous. Jamais il n'aurait osé demander un pareil cadeau à son père, mais il avait dû le surprendre en train de l'admirer.

— C'est pas fini ! S'écria Cassie en posant le second carton sur les genoux de son frère. Celui-ci est de la part de abuelo y abuela. Mais j'ai aussi participé un peu.

— Merci beaucoup, minipousse, répondit Ace en lui faisant une pichenette sur le nez.

Leurs grands-parents étaient restés en Espagne, ils se voyaient très peu. À la mort de leur belle-fille, ils n'avaient pas hésité à voler jusqu'aux Etats-Unis et s'étaient installés de longs mois avec eux, pour les soutenir au mieux.

Ace n'avait aucune idée de ce que ça pouvait être. Ses yeux s’agrandirent de stupeur lorsqu'il ouvrit la boîte. Un costume deux pièces noir se trouvait à l'intérieur avec même une chemise.

— Il y a les chaussures en dessous, murmura Felipe.

— Mais pourquoi ?

— Quand on vit à New-York, on doit avoir une garde-robe adaptée pour les grandes occasions.

— Ça a dû vous coûter une fortune, je ne peux pas...

— C'est trop tard, il ne reprennent pas les achats. Maintenant, file l'essayer et n'oublie pas ta montre.

Ace obéit, trop abasourdi pour imaginer ne pas s'exécuter. Lorsqu'il se présenta dans le salon, le silence se fit. Cassie porta les mains à sa bouche.

— Tu es trop beau !

Ace lui sourit gêné.

— Dis pas de bêtises.

— Elle a raison.

Felipe s'approcha de lui et ajusta sa veste. Il recula de quelques pas pour admirer son fils. Le cœur d'Ace se serra lorsqu'il vit qu'il avait les larmes aux yeux.

— Tu as tellement grandi, Ace. Tu es un homme, maintenant. Tu n'as plus rien du petit garçon qui m'a donné tant de fils à retordre.

Il eut un petit rire.

— Maman serait tellement fière de toi.

Il posa une main sur sa joue. Une boule se forma dans la gorge d'Ace.

— Papá...C'est grâce à toi qu'on est devenus ce qu'on est, Cassie et moi. Tu as toujours été là pour nous et tu as tout fait pour être le meilleur père du monde.

Une larme glissa sur la joue de Felipe. Il l'essuya rapidement en gloussant.

— Tu n'as pas honte de faire pleurer ton vieux père ?

Ace le prit dans ses bras. Après un instant, Cassie se jeta sur eux et les enserra. Ils rirent ensemble.

— Merci pour ce Nöel, papá. C'est le plus beau Noël que j'ai passé depuis la mort de maman.

— Moi aussi, ajouta Cassie, le visage enfoui dans le torse de son père.

— Je voulais que ce Noël reste gravé dans votre mémoire, expliqua leur père, la voix grave. Pour vous montrer que même si la vie peut être dure parfois, elle nous réserve toujours de bons moments. Je veux vous dire qu'on a le droit, nous aussi, de se sentir bien et d'être heureux.

Cassie se blottit un peu plus contre eux. Felipe passa une main dans les cheveux de sa fille.

— Allez, il ne faut pas perdre de temps, je vous rappelle que nous déjeunons chez les parents d'Andreï. Et il y a du bazar à ranger.

Ace se détacha de sa famille, le sourire aux lèvres. Felipe reprenait son rôle de papa-chef.

Les Cruz avaient également fêté la nouvelle année avec la famille d'Andreï et quelques amis. C'était devenu une tradition, et Ace n'avait jamais passé le réveillon sans son meilleur ami d'enfance. Cassie les accompagnait depuis quelques temps et ce n'était pas pour lui déplaire : depuis toute petite, elle était en adoration devant Andreï. À ses six ans, elle avait clamé haut et fort qu'elle se marierait avec lui quand elle sera adulte. Aujourd'hui, elle avait grandi et ce qui était une idée de petite fille était devenu un souvenir que les familles aimaient ressortir à chaque occasion. Cassie rougissait violemment mais elle n'avait jamais vraiment abandonné son béguin : elle avait adoré narguer ses copines du collège quand Ace venait la chercher avec le jeune Russe à la sortie des cours.

Ils dansèrent beaucoup, burent énormément et crièrent tous ensemble le décompte de la nouvelle année. Une salve de cris et d'embrassades s'ensuivit et le champagne coula à flots.

Maintenant, il fallait dire au revoir. La fin des vacances était arrivée et Ace devait repartir à New-York. C'était toujours difficile de quitter sa famille mais Ace n'avait pas le choix. Il essayait de se consoler comme il le pouvait : il reviendrait pour son anniversaire dans deux mois.

La tristesse se battait la place dans son cœur avec un autre émotion. C'était la rentrée demain, il devrait retourner en cours. Et il ne croyait pas une seule seconde qu'il ne croiserait pas une tête bien connue.

Assis sur son siège, sa nouvelle montre au poignet et son costume dans sa valise, Ace eut l'impression de partir pour un grand voyage. Ce qui n'était pas complètement faux.

XXX

Les retrouvailles avec Abby et Matthew se firent à la fac. La jeune femme ne cessa le réveillon du nouvel an qu'elle avait passé avec son petit ami. Elle vanta le romantisme de Morgan et leur expliqua dans les moindres détails les quelques jours passés ensemble.

Matthew complimenta Ace sur sa montre. Pour sa part, il leur raconta ses vacances passées au ski.

Ils déjeunaient à la cafétéria lorsque Abby leva soudain la tête de son téléphone. Un immense sourire se dessina sur son visage, attirant le regard de ses amis. Aussitôt, le cœur d'Ace rata un battement lorsqu'il croisa le regard azur du garçon qui venait d'entrer.

Tyler et Morgan venaient de faire irruption dans la petite cafétéria et se dirigeaient vers eux. Un coup d'Abby, à tous les coups. Elle n'arrivait plus à se passer de son copain. Mais où Morgan allait, Tyler n'était jamais loin.

— Enfin, on vous trouve ! Morgan m'a fait faire le tour de la fac à la recherche de sa dulcinée, j'en avais marre de courir partout !

La voix chaude de Tyler percuta le cœur de l’Espagnol. La dernière fois qu'il l'avait entendue, c'était à travers un téléphone. La dernière fois qu'il l'avait vu, c'était quand ils s'étaient embrassés. Il était tellement beau. Il ne comprenait toujours pas pourquoi il n'avait pas su le voir clairement jusque là. Il portait un pull à col roulé noir près du corps qui contrastait avec ses cheveux blonds. Il se les avait coupés pendant les vacances, ils étaient plus courts. Mais Ace avait toujours aussi envie d'y passer la main.

— Tu comprendras quand tu tomberas amoureux, s'exclama Abby en se levant.

Elle se jeta dans les bras de son copain.

Sa remarque tétanisa Ace. Son regard trouva instinctivement celui de Tyler. Ce qu'il y lut le fit frissonner. Heureusement, Matthew détourna l'attention du blondinet en lui souhaitant la bonne année.

— Bonne année à vous ! J'ai hâte de la commencer avec vous !

Les embrassades se firent. Lorsque vint son tour, Ace ne sut comment réagir. Comment Tyler pouvait-il rester si calme ? Lui, avait envie de hurler. Son cœur battait à toute vitesse et son sang lui martelait les tempes. Il ne pouvait décrocher son regard du blond, qui affichait un sourire resplendissant.

Tyler dut comprendre car il amorça le mouvement.

— Bonne année, Ace chuchota-t-il à son oreille quand il lui fit la bise.

Ace ferma les yeux pour tenter de s'ancrer dans la réalité. Le parfum de son ami le projetait à nouveau dans sa chambre il y a deux semaines, quand ses lèvres avaient goûté celles du blond.

— Alors, ces vacances avec Morgan ? D'après ce que j'ai compris, elles ont été mouvementées.

Tyler était passé à autre chose. Son ventre se tordit de douleur. Avait-il rêvé ? Tyler lui avait-il menti l'autre soir ? Il n'avait pas pu faire semblant, ce n'était pas possible.

— Si tu savais ! Je n'ai jamais aussi peu dormi de toute ma vie.

— Je me doute, rit Tyler.

Il jeta un coup d'œil à sa montre.

— Désolé les amis, mais on est la bourre. Morgan, laisse ta femme, tu vas pouvoir survivre sans elle. Au fait, j'ai décidé de faire une petite fête vendredi chez moi pour fêter la nouvelle année comme il se doit. Vous êtes mes invités VIP, donc interdiction de refuser ! prévint-il en les menaçant du doigt. Juste une petite soirée entre amis.

— Entre amis ? répéta Abby. Tu as combien d'amis ?

— Juste assez pour s'éclater comme il se doit ! J'ai failli oublier : il y a un dress-code, tenue de soirée exigée !

— Je croyais que c'était une petite soirée ? s'étrangla la jeune femme.

Tyler lui envoya un baiser avant de s'éloigner avec Morgan qui secouait la tête, défaitiste.

— Non mais tu l'as entendu ? soupira Abby. Je n'ai même pas une semaine pour trouver la robe parfaite.

Elle se rassit et enfouit sa tête dans ses bras.

Ace était du même avis. Pire encore, une désagréable sensation lui torturait le ventre. Tyler avait fait comme si de rien n'était, comme si rien n'avait changé entre eux, et il l'invitait à une soirée qu'il était certain de détester. Il ne savait plus quoi penser, il ne comprenait plus rien. S'était-il moqué de lui ? Était-ce sa punition, après tout ce qu'il avait fait ?

Son téléphone vibra dans sa poche. Il s'en saisit comme un automate. Lorsqu'il lut le message, il eut soudain l'impression de respirer à nouveau. Tout son cœur trembla et une immense vague de bonheur le submergea.

De : Tyler

12:48 pm : Je sais qu'on a décidé de ne pas se précipiter. Mais je mourrais d'envie de t'embrasser, tout à l'heure. Tu m'as manqué.

PS : Andreï est invité aussi vendredi. Purement par intérêt, j'ai hâte d'en apprendre plus sur toi.

Il n'avait pas rêvé. Tout était bien réel, Tyler, l'autre soir, ses aveux.

Le soulagement fut si grand qu'il dut s'asseoir pour reprendre ses esprits.

— Ace, tu m'écoutes ?

Il releva la tête. Abby le regardait, une drôle d'expression affichée sur le visage.

— Tu peux me dire ce que tu as ? Pourquoi tu souris bêtement ? Et il s'est passé quoi avec Tyler ?

— Quoi, avec Tyler ?

— Tu te moques de moi ? Il se moque de moi, Matthew, hein ? Tu n'as pas vu comment il te mangeait du regard quand il est venu ?

Elle fronça les sourcils.

— Le retour du sourire béat ! Non mais j'hallucine, t'es malade ou quoi ? T'as intérêt à parler ou je te fais cracher le morceau de mes propres mains.

Ace se cacha le visage entre ses mains. Il allait passer le quart d'heure le plus douloureux de sa vie.

—QUOIIII ?

Tout le monde se retourna dans la cafétéria.

Même Matthew avait dû s'asseoir après les confessions de leur ami.

— Tu.. Toi et Tyler ? Je...

Abby ouvrit et ferma la bouche, comme un poisson hors de l'eau.

— Je ne comprends pas tout, honnêtement, Ace, avoua Matthew. Quand ? Comment ?

— Je ne sais pas, gémit Ace. Je n'en ai aucune idée. Il m'a embrassé la première fois à sa soirée en début d'année et je l'ai repoussé. Puis je l'ai embrassé à mon tour quand il est venu chez moi, juste avant les vacances...

— Est-ce que ça te dérange si je mets du temps à assimiler ce que tu viens de me dire ? Genre, plusieurs jours voire semaine ?

Abby était tellement sous le choix que l'Espagnol se demandait si elle n'était pas en train de faire une syncope.

— J'ai moi-même du mal à y croire, chuchota Ace.

— Alors ça veut dire que tu... qu'il t'attire ? Je veux dire...

Il eut un petit rire.

— Oui, Abby, oui, il m'attire et je le trouve... beau.

Abby écarquilla les yeux.

— C'est incroyable... Tout bonnement incroyable. Je suis tellement contente pour toi !

Elle se leva si vite que sa chaise se renversa et prit Ace dans ses bras au-dessus de la table. Le jeune homme lui rendit son étreinte.

— Désolée d'avoir réagi comme ça, je m'y attendais pas du tout. Mais je suis si heureuse pour toi.

Ace cacha son visage dans l'épaule de son amie.

— Merci Abby.

Matthew le serra aussi contre lui.

— Tu es si courageux, je suis fier de toi. Et qui l'eut cru ? Ce petit arrogant péteux et toi !

Ace gloussa.

— J'en suis le premier étonné.

Abby posa un regard tendre sur ses deux amis.

— Vous ne pouvez pas savoir à quelle hauteur se trouve ma dopamine à cet instant. Je vous aime, les amis. Et je sens que cette future soirée sera mémorable !

Ils éclatèrent de rire, s'attirant à nouveau des regards. Mais Ace s'en moquait. Son cœur était aussi léger qu'une plume et il avait du mal à y croire. Un frisson d'excitation le parcourut à l'idée de ce qui l'attendait.

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