CHAPITRE 9 : NOËL ENSEMBLE
Le temps est si distendu sur l'île, et je passe tellement de bons moments avec dame Washington et de Sweetie/Esperanza que je n'ai pas remarqué qu'on était parvenu à la période de Noël. Ma chère amie a de la chance : sa fille et sa petite fille vont toutes les deux lui rendre visite les 24 et 25 décembre. Devant mon air tout penaud, dame Washington me proposa de profiter de ces fêtes avec elles.
-De toute façon cela était prévu, me dit-elle, rajoutant avec malice :
-Si une soirée entourée d'autant de filles ne vous fait pas peur…
Je refusai au début prétextant que c'était une fête familiale et que je ne faisais pas partie de cette famille. Elle se mit alors à rire, et m’a très gentiment dit :
- Mais Noël est la fête de la famille et des amis, et vous êtes mon ami !
Puis elle rajouta avec un air étrange qu’il faudrait pardonner sa petite fille.
- Elle est dans l'année de ses 15 ans et c'est une année importante chez nous…
Puis elle se ressaisit.
-Non, ne vous inquiétez pas. Cela nous ferait plaisir que vous participiez à ce Noël avec nous.
Je finis par accepter, rempli d'une grande joie. La vie sur l'île devenait de plus en plus agréable. Si l'Enfer peut être les autres pour certains, actuellement je me rapprochais du paradis grâce à cette femme…
Le 24 décembre est donc arrivé. J'étais à la fois impatient et inquiet en attendant cette date. Mais cette fête de Noël fut un moment des plus agréables…
Je rencontrai donc Catherine et sa fille. Catherine semblait partager le même amour de la vie que sa mère et cela était agréable à voir et à entendre. Elles partageaient toutes deux ce même rire qui faisait tomber toutes les barrières. Décidément dans cette famille la joie était communicative !
Après ce moment de rencontre fort plaisant les trois femmes et moi avons quitté les rivages de cette île hostile, pour un moment savoureux dans tous les sens du terme. Nous sommes allés au restaurant. Le confit de canard et les pommes de terre sarladaises nous changèrent de la nourriture insipide dont nous avions l’habitude.
Après nous être bien sustentés, dame Washington me proposa d'aller avec elle à la messe de minuit. Je ne suis pas croyant personnellement, mais je me laissai tenter par cette invitation qui me changerait du quotidien insulaire…
Nous passâmes l'après-midi ensemble, flânant quelque peu dans le vieux Gourdon, ce centre-ville médiéval tout en hauteur que cette journée de soleil hivernal semblait magnifier. Et sans que je ne m'en rende compte, le soir arriva et nous profitâmes une deuxième fois d'un restaurant gourdonnais.
Le moment de nous rendre à la messe de Noël arriva rapidement. Ce fut un moment magnifique dans cette église Saint-Pierre, au sommet du vieux Gourdon. A l’extérieur, le froid était saisissant mais à l'intérieur la chaleur humaine et la bienveillance apparente de ces gens me fit le plus grand bien. À la sortie de la messe Ondine, la petite-fille de dame Washington paraissait enthousiaste. La foi semblait grande dans cette famille. Sa mère me confia qu’elle hésitait à entrer dans les ordres. Selon elle, Ondine choisirait définitivement sa vocation avant la fin de ses 15 ans.
J'étais quelque peu interloqué : ça faisait un peu jeune pour une telle décision. Alors dame Washington et Ondine me sourirent gentiment et me lancèrent avec un air entendu :
-Elle a 15 ans. C'est l'année de toutes les décisions…
Quelque chose chez elles me paraissait étrange à ce sujet, mais je n'allais pas plus loin dans mes interrogations.
Toute bonne chose ayant une fin, Catherine nous ramena dans l'île ou nous passerons nos derniers jours. Quand elles virent la tristesse dans mon regard les trois femmes firent tout pour me faire sourire, elles y parvinrent avec une étonnante facilité. Lorsque la petite fille plongea son regard dans le mien, je ressentis quelque chose d’étrange. Il émanait d'elle une telle douceur, une telle bienveillance que je fus rempli de paix. Elle n'eut presque pas à parler. Sa paix intérieure parlait pour elle.
Le lendemain matin elles vinrent nous dire au revoir avant de partir pour Paris. Catherine nous assura qu’elle redescendrait rapidement. Je voyais dame Washington comblée, et cela me faisait plaisir. Elle paraissait encore plus heureuse que d'habitude, ce qui semblait inimaginable.
Le moment de se quitter arriva. Dame Washington me proposa de venir boire un thé. C'est ainsi que nous finîmes les fêtes de Noël. Cela avait été un moment très agréable. Cette famille était décidément extraordinaire.
Lorsque je quittai la chambre 20, Esperanza me suivit et je la caressai longuement, alors qu'elle ronronnait.
Oui, cette fête si difficile à vivre pour moi d'habitude avait été un moment très fort, plein d'émotion et de douceur…
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