Chapitre 18
Ghost
Elle finit par me céder, je vois bien que ses yeux et son corps expriment la panique. Je vois bien qu'elle s'imagine me faire fuir mais rien ne pourra me faire fuir. Je ne sais pas ce qu'elle me cache mais une chose est sûre, je ne partirai pas. Elle se retourne doucement. Bon sang de bonsoir ! Je ne m'attendais certainement pas à cela. Je sors de la salle de bains en claquant la porte car je crois que je vais tout exploser là-dedans. Je ne voudrais surtout pas la blesser ou lui faire peur, je boue intérieurement. J’attrape mes cheveux à pleine mains pour ne pas hurler. Un cri pourtant s'échappe... mais ce n'est pas le mien… Mince quel abruti je fais ! Elle doit croire que je suis parti. Je me précipite dans la salle de bains et la trouve couchée sur le carrelage, son corps tremble et convulsionne sous sa détresse. Je m'accroupis près d'elle, passe ma main sous son corps et son cou, ce qui l'a fait sursauter et la soulève pour la coller contre mon torse. Elle me regarde surprise. Je retourne dans la chambre et la dépose sur le lit. Elle me tourne le dos exposant ainsi le supplice qu'elle a enduré.
— Désolé Tigresa, je ne voulais pas te blesser. Je suis tellement en colère contre celui qui t'a fait ça, que j'ai préféré sortir de la pièce avant de tout dévaster et te faire du mal sans le vouloir. J'ai réagi comme un abruti, pardon. Je ne te fuyais pas. Je ne te fuirai pas. Jamais.
Son dos est parcouru de striures de plusieurs centimètres dans un sens, dans un autre, les lignes se croisent, formant par endroit des sortes de losanges. Une brûlure en haut de son épaule gauche me broie le cœur, imaginant la souffrance qui lui a été faite lors de ce marquage. Un marquage au fer rouge « black vultures », les vautours noirs. Je sais qui rechercher maintenant, pour lui faire payer cet acte. Ça a tout l'air d'un nom de gang ou quelque chose comme cela, je vais demander à Jim de creuser.
— Dis-moi qui t'a marqué comme cela, dis-je doucement en effleurant du bout des doigts cette marque.
Son corps se tend, elle pleure toujours mais en silence cette fois ci. Je m'en aperçois à cause des petites secousses que son corps fait. Je vais pour m'approcher d'elle mais elle se relève d'un bon, toujours le dos tourné vers moi, pour ne pas me montrer l'étendue de son chagrin ou ne pas voir sur mon visage le dégoût qu'elle pense y trouver. Mais elle se trompe, je fais le tour du lit et reviens me placer derrière elle.
— Eh ! Tigresa, ne pleures pas s'il te plaît, ne pleures pas.
Un cri déchirant envahit la chambre, plus fort encore que le précédent. Je sens ses jambes fléchir, son corps lâcher. Elle pleure tellement que le souffle lui manque, elle suffoque. Des spasmes la submergent. Elle ne crie plus car plus aucun son ne sort de sa gorge, pourtant lorsque je la retourne vers moi, sa bouche est grande ouverte. Je la saisis par les hanches et la soulève. Ses jambes s'enroulent autour de ma taille, en me serrant tellement fort que je défie quiconque de me l'arracher. Je m'assieds sur le bord du lit, l'entraînant avec moi. Tel un koala enserrant une branche, un boa étouffant sa proie, je suis prisonnier de son corps. J'essaie de décrocher ses bras de mon cou et dois m'y reprendre à plusieurs fois, en lui murmurant des mots doux, des mots rassurants tout en la berçant d'avant en arrière, lui promettant de ne pas l'abandonner, de ne pas la laisser partir. Elle relâche enfin la pression et je peux de nouveau observer son visage torturé. Je passe mes mains sur ses joues balayant ses cheveux, venus se coller sur son visage et les repousse derrière ses épaules.
— Tu es belle bébé, quoique tu en penses, tu es belle, ne laisses personne te dire le contraire, personne... tu es ma beauté… ma princesse, tu m'entends, hoches la tête si tu m'entends.
Elle fait un petit mouvement de haut en bas et je sais que je l'ai récupérée. Elle n'est plus enfermée dans son cauchemar.
— Maintenant, reprends-je doucement, tu vas me dire quel est le pourri, l’enfoiré, le crevard qui t'a fait ça ? Qui a osé te marquer de la sorte ? Je vais lui faire bouffer ses doigts pour, ne serait-ce, que les avoir posés sur toi ! Je vais le découper comme un morceau de barbaque, sortir ses intestins et l'étrangler avec, tout en le gardant le plus longtemps en vie, pour qu'il assiste à sa mort. Je te promets bébé, que ce fils de chien est un homme mort et je tiens toujours mes promesses.
Je sens son corps se détendre, j'embrasse ses paupières, son bout de nez, ses joues, ses yeux fermés. Je m'empare de ses lèvres, en force le passage et enroule ma langue à la sienne. Notre baiser devient de plus en plus sauvage, nos dents s'entrechoquent, un besoin irrépressible de s'approprier l'autre, se coller pour ne former qu'un seul anneau indestructible. Nos baisers finissent par nous emporter dans un corps à corps endiablé. Un besoin de se fondre l'un dans l'autre, de se souder. Ma queue trouve l'entrée de son paradis et s'y enfonce avec lenteur.
— Tu vois Tigresa, tu sens comme mon corps te veut, loin de me dégoûter comme tu pensais le croire, tu m'excites, ta force m'excite.
Mes coups de butoirs deviennent de plus en plus virulents. Elle me surplombe, me chevauchant tel un étalon. Sa poitrine s'agite sous mes yeux mais c'est ses yeux que j'observe. Elle n'est plus avec moi encore cette fois. Elle cherche autre chose, la douleur ou l'apaisement de celle-ci. L'oubli certainement.
— Vas-y Tigresa, jouis pour moi, vas-y laisses toi aller !
Je sens ses parois se resserrer de plus en plus, jusqu'à ce qu'un cri de jouissance cette fois-ci, s'échappe de sa gorge. Un cri de désespoir ou de libération. Son orgasme entraînant le mien une fraction de seconde après. Elle s'écroule sur moi, la respiration hachée, de légères larmes glissant sur ses joues et venant s'écraser sur ma poitrine.
— Ne pleures plus. Celui qui t’a fait ça, ne mérite pas que tu gâches un si joli regard.
Je la retourne sur le dos, appuie mes avant-bras sur le matelas pour ne pas l'écraser.
— Sèche ces larmes jeune fille et dis-moi, comment t'appelles-tu ?
— Sandie murmure t'elle, je m'appelle Sandie Sulivan et je suis poursuivie par Caleb, un psychopathe, président d'un club de bikers à Las Vegas, « Les black Vultures ».
— Pourquoi te poursuit-il cet enfant de salop ?
Et là, elle me déballe tout, son enfance heureuse avec sa mère. Le rituel qu'elles se répétaient chaque jour dans n'importe quelle circonstance, à n'importe quel moment de la journée. Elle me le récite
« Je t'aime maman ;
Plus que toi ma puce
Aussi grand que le ciel et les étoiles réunis ?
Aussi grand que l'univers ».
Mais un jour Caleb Noslocin est entré dans leur vie et cela n'a plus jamais été pareil. La manipulation mentale exercée sur sa mère pour la prendre dans ses filets. Puis, les jours heureux sont devenus cauchemars et leur rituel une nécessité. Il a obligé sa mère à se prostituer en la menaçant de tuer sa fille, si elle n'obéissait pas. Mais aussi, les coups qu'elles recevaient toutes les deux, si elles s'opposaient à lui. Puis sa fugue avortée à l'âge de quinze ans, avec la complicité de sa mère. Ce qui lui valut, le marquage, pour que toute personne sache qu'elle lui appartenait. Elle me parle également des punitions par le fouet lorsqu'elle ne voulait plus danser pour lui. Car ce pervers lui a appris la pôle dance mais dans ces mouvements les plus sexuels. Et enfin, le plan pour sa fuite définitive qu'elles avaient répété plusieurs fois, si cela devait un jour mal tourner. Sa mère l'a payé de la pire des façons, égorgée devant sa fille, cachée dans un conduit d'aération.
Je comprends tout maintenant, son changement de lieu, de vie à chaque alerte, son changement d'apparence et de noms. Il voulait la vendre à un milliardaire et se faire un paquet de tunes sur sa virginité mais elle a disparu et ça a dû le rendre fou.
— Écoute moi bien Tigresa, car tu es une Tigresa, on ne se relève pas d'un truc pareil si on n'est pas une tigresse. Je te protégerai de ce psychopathe mais je vais aussi le pourchasser comme il te pourchasse et je vais l'éradiquer de cette putain de planète ! Tu m'entends Tigresa ? Je vais lui briser les os et le rendre poussière.
— Non, ne fais pas ça, me supplie t'elle, il est fou et son pouvoir s'est étendu ses six dernières années, il est devenu plus puissant. Je ne veux pas te perdre... j'ai déjà tellement perdu.
— Tu ne vas pas me perdre, ne t'en fais pas. Il est peut-être puissant mais bébé, tu n'as aucune idée de l'étendue de mon club. Nous ne sommes pas que présents sur le sol des États Unis, mais aussi sur celui d'Australie, d'Allemagne, de Russie... Je suis à la tête d'une véritable armée et sans parler de ceux qui nous ont voué allégeance. J'ai déjà perdu un être cher car je n'avais pas assez de pouvoir à l'époque mais plus les années sont passées, plus ma force s'est décuplée. J'ai travaillé dur pour en arriver là où je suis. J'ai perdu des hommes et mon humanité en chemin, je suis devenu aussi cruel que mes adversaires. Ne crois pas que je suis un agneau, on me craint et me respecte, personne ne connaît mon visage, je suis Ghost. On ne connaît que ce qu'il reste sur mon passage la « Sudden Death », la mort subite. Les seuls qui ont vu mon visage ne sont plus là pour en témoigner, j'ai été leur dernière image avant que les ténèbres ne les emportent. Je ne tue pas pour le plaisir, je tue pour survivre. Je ne me vante pas d'avoir les mains propres mais frapper une femme, la marquer ou la tuer alors qu'elle est innocente, jamais. Je ne m'en prends jamais aux innocents. Ceux qui tombent sont comme moi, des coupables. Par contre, je te fais la promesse qu'à mes côtés, tu seras à jamais en sécurité.
— Comment peux-tu me promettre autant de chose. On ne se connaît que depuis… quoi... une semaine.
— Pas tout à fait, même si tu as l'impression que le temps passe vite. En fait on va dire quelques jours, dis-je en souriant. Mais ces quelques jours à te regarder, m'ont retourné le cerveau. Bon maintenant assez discuté, on remballe tes affaires et tu viens vivre au club.
— Attends, vivre pour quelques jours. J'ai trouvé un appartement tu sais, j'emménage samedi qui arrive.
— Non non non... dis-je doucement, tu ne peux pas t'éloigner de moi comme ça.
— Mais on ne se connait pas.
— Je dirais plutôt que j’ai l’impression de te connaitre depuis toujours. C’est une sensation bizarre, je l’avoue et tellement soudaine. Après ce que tu viens de me raconter, tu seras plus en sécurité au club.
— Hé, je ne m'éloigne pas loin, mon logement est à une rue, sur la route d'Orchard et je l'adore. J'ai besoin de ça, j'ai besoin de me sentir chez moi. Mais tu seras le bienvenu si tu veux ?
— On ne va pas se disputer maintenant mais je compte bien te faire changer d'avis, lui réponds-je.
— Laisse-moi au moins quelques mois de bonheur dans cet appart. D'ailleurs, on n'est pas obligé de vivre collé l'un contre l'autre. C'est bien aussi d'avoir son indépendance, non ?
— Non... mais promis, je vais faire un effort pour quelques « semaines », lui fais je avec un clin d'œil.
Elle lève les yeux au ciel. Je me relève l'entraînant avec moi, je la dépose sur le sol attendant qu'elle se stabilise avant de la relâcher. Je me retourne pour récupérer mes affaires jonchant le sol, vu qu'on est encore à poils.
— Oh nom d’une pipe ! entends-je.
Je sens ses doigts se poser sur mon dos, des frissons me parcourent à son toucher. Un chef d'œuvre, dit-elle.
— Oui je sais, je suis taillé comme un dieu, ris-je
— Je ne parle pas de ça trompette !
Les mots doux s'étant fait le mal.
— Je parle des tatouages sur ton corps, ils sont tout simplement magnifiques.
Elle parle de l'emblème de mon club que j'ai fait encrer dans ma peau. Une tête de mort avec deux poignards plantés de chaque côté et les initiales SD dans chaque orbite. Dessous la phrase « Your war is my war, for traitor it's Sudden Death ». Sur mon épaule gauche, un ange est tatoué avec une larme au coin de l'œil et la phrase « I'll never abandon you », je ne t'abandonnerai jamais. Sur l'autre épaule un cœur brisé avec dans chaque partie, les initiales de mes parents. Je me retourne, la prends dans mes bras et la colle contre mon torse.
— Alors comme ça, je suis une trompette ? lui dis-je, mon sexe se remettant au garde à vous contre son ventre… je vais te faire passer l'envie de m'insulter Tigresa, je vais t'emmener aux portes du plaisir, tu vas me supplier de mettre fin à ton calvaire...
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