Dévoilée, libérée
La pluie redouble d'intensité lorsque je sors du métro, sous les rafales de vent, mon parapluie se retourne et n'a plus aucune utilité. Trempée jusqu'aux pieds, je franchis le hall d'entrée de l'immeuble dans lequel je réside. Le froid a engourdi chacun de mes muscles, de mes membres et glacé mon sang qui tourne au ralenti. J'ai tout juste le temps de prendre une bonne douche avant que ma petite soeur et ma meilleure amie arrivent pour un apéro dinatoire entre filles. Heureusement, mon ménage a été fait hier soir en rentrant du travail.
L'interphone sonne, je décroche et quelques secondes après ma soeur, Loéline tape contre la porte d'entrée, nous sommes heureuses de nous retrouver. Nous nous enlaçons puis je l'invite à venir s'installer sur le canapé. Ma meilleure amie Olariane nous rejoint une dizaine de minutes après, je leur sers un ponch et dispose des assiettes d'amuses bouches sur la table basse.
Olariane n'attend pas le feu vert, elle est comme chez elle ici et grignote une première petite brochette de tomates cerises, dé de fromage frais.
Loéline a fait couper ses cheveux depuis la dernière fois que je l'ai vu, c'est un petit carré aux épaules qui lui va merveilleusement bien même si ça a tendance à la rajeunir un peu.
- Dis donc, ça te va super bien cette petite coupe au carré, petite soeur ! Toute belle.
- Merci répond t-elle timidement, les joues rouges des compliments qu'on lui fait. J'avais besoin de changer de tête, mon chéri adore !
- Et tes études de médecine, tout se passe bien ? lui demande Olariane.
- Je m'accroche et travaille dur pour réussir, c'est très difficile pour moi, j'ai redoublé un semestre, s'exclame Loéline. Mais je souhaite vraiment travailler en tant que pharmacienne à la fin de mes études, j'ai un homme qui me comprend et me soutient ça vaut de l'or !
- Je suis fière de toi mon bébé, dis-je émue. Tu vas réussir car tu t'en donnes les moyens. Et toi Olariane, tu as passé une bonne journée ? Les enfants pas trop pénibles ?
- Ils sont fatigués, beaucoup de pleurs mais le souci ce ne sont pas les enfants, je ne m'entends pas avec la maîtresse, elle est constamment dans la plainte ! Et me parle mal, me prend pour sa bonne c'est lassant, soupire ma meilleure amie. Et toi alors, ton boulot de secrétaire ?
Un blanc s'installe entre nous, ce qu'elles ne savent pas c'est que je ne suis pas secrétaire. Si je les ai fait venir c'est aussi pour leur parler ouvertement de mon vrai métier que j'ai mis du temps à assumer, d'ailleurs j'ai peur de ce qu'elles vont penser, de comment elles vont me regarder une fois que je leur en aurai touché deux mots. Je ne peux pourtant pas cacher la vérité à deux personnes que j'aime de tout mon coeur.
- Je ne suis pas secrétaire, répondis-je à voix haute, elles me font répéter. Je ne suis pas secrétaire. Ce n'est pas un métier que l'on peut crier sur tous les toits, c'est peu commun et quand même particulier. Je n'étais pas prête pour en parler mais je vous aime tellement toutes les deux, que c'est difficile pour moi de faire comme si de rien n'était.
- Tu me fais peur, Greta, murmure Loéline. Je ne sais pas ce que tu vas nous sortir... Tu n'es pas une prostituée quand même ? (Je me mords la lèvre inférieure en plantant mes canines en profondeur, mon métier s'en rapproche pas mal, comment vais-je assumer ?). Greta ?
Je plonge ma tête dans mes mains, mes yeux se remplissent de larmes, mon coeur cogne dans mes tempes que cela devient douloureux jusque dans ma poitrine.
- Qu'est-ce que vous allez penser de moi ? dis-je en articulant. Non Loéline, pas vraiment mais ça a un rapport au sexe. Mon dieu dans quoi je me suis fourrée ? Et en même temps je me devais de vous le dire, je ne pouvais plus faire comme si de rien n'était, je ne peux pas vous mentir, pas à vous, à personne d'ailleurs.
Olariane prend ma main dans la sienne, de ses yeux bruns, elle m'encourage à continuer alors que ma petite soeur reste figée sur le canapé.
- Vas-y ma puce, lances toi tu y es presque, s'exclame Olariane. C'est courageux de ta part de nous mettre dans la confidence. Je serai toujours là pour toi, ça ne changera rien, je peux essayer de comprendre.
- D'apparence si on ne creuse pas, ça peut paraitre de la prostitution, répondis-je les yeux baignés de larmes. Mais pour moi, ça n'en est pas. On ne me paye pas pour coucher avec des hommes, non je fais partie d'une agence qui lutte contre l'infidélité des hommes. Des épouses victimes des tromperies de leur mari écrivent à l'agence, elles nous recrutent pour qu'on aille draguer leur mari et le faire tomber amoureux, une fois cela fait, nous leur brisons le coeur bien comme il faut et souvent leurs femmes se cassent ! Donc je dois séduire une cible, donc forcément il y a des moments intimes et après je dois le quitter violemment pour qu'il ait le coeur en vrac ! La partie hot je ne sais pas si je vous l'énonce.
- C'est quand même cruel comme principe, s'étonne Loéline. Et ça paye bien ? Ça s'appelle comment ton métier ? Ben si vas au bout des choses maintenant que tu as commencé.
- Cruel oui et non, je cautionne tellement pas la tromperie en fait, déclarai-je. On leur fait justice à toutes ces femmes en pleurs. Ce que je reproche à l'agence, c'est de ne pas chercher à savoir ce qui s'est passé pour que ces hommes se retrouvent à tromper leur femme ? Pour moi ils ne sont pas tous mauvais mais ça m'a été reproché de trop faire dans l'affect ! Oui je suis tentatrice adjointe depuis peu, sinon ça s'appelle juste tentatrice ou agent de séduction comme on veut, oui c'est bien payé et là d'avoir changé le grade, je vais voir mon salaire doubler.
- Hihi moi je valide à 100 %, me rassure Olariane. Ça leur apprendra à tous ces mecs ! Et ils sont beaux ceux que tu dois séduire ? Là on te retrouve bien ma chérie, tu comprends les gens avant de les juger. Elle est où cette agence ?
- Oui, jusqu'à maintenant, je n'ai pas à me plaindre ! A quinze minutes d'ici, à peu près, un peu plus quand le trafic est dense mais vu que je fais tout en métro, ça va ! Ça s'appelle l'Agence Brise Coeurs.
- Oh mais j'en ai entendu parler, renchérit ma meilleure amie. Fin j'ai vu une affiche dans la rue l'autre jour, avec le slogan je crois que c'était : '' Charmez, opérez, foncez ! L'agence Brise Coeurs recrute ''.
- Oui, on recrute car on a de plus en plus de demandes, j'ai géré de recevoir les personnes en entretien, dis-je à mon tour. Alors oui on a acheté une place sur le panneau publicitaire ! Par contre notre identité en tant que tentatrice doit rester secrète. Même de l'extérieur on ne se doute pas qu'il s'agit de l'agence.
- Et la partie hot ? s'interroge ma soeur.
- C'est très embarrassant... Notre patronne organise des entraînements érotiques comme par exemple : Entraînement à la fellation donc on s'entraîne sur des vrais partenaires '' cobbayes '' qui se sont portés volontaires, faire jouir sans toucher les parties génitales de l'homme, jouir uniquement par la stimulation des seins, et pleins d'autres choses. Notre chef, nous évalue dans nos performances, il y a un classement, je suis souvent première d'ailleurs. Et là, mes points ont grimpé parce que j'ai accordé du temps à ma chef en lui faisant un cunnilingus. On est pas contrainte de faire ces entrainements mais ça vaut des points et comme je suis compétitive je prends toutes les occasions pour me retrouver en tête !
- Oula, je suis très surprise par ces révélations. Je trouve ça un brin tordu autant ce que fait ta patronne mais aussi ce à quoi tu participes ! S'exclame Loéline choquée. J'essaie de ne pas être dans le jugement mais j'ai beaucoup de mal. Je trouve ça d'un vulgaire et très malsain...
- Je ne suis pas surprise par ta réaction, après je ne vois plus les choses comme ça après autant d'années de pratique, pour moi c'est un épanouissement dans ma sexualité, et un art érotique, répondis-je. Je suis une femme pleine de sensualité, je suis toujours la même petite soeur et tout est sous contrôle, le risque de maladies est anéanti, je ne fais pas n'importe quoi avec mon corps, je respecte aussi mes limites.
- Je te soutiens, s'exclame Olariane. Quand on sera toutes les deux, on pourra en parler plus librement, je ne veux pas que ça mette mal à l'aise ta soeur mais j'aurai encore beaucoup de questions !
- Merci ça me fait du bien de ne pas me savoir seule, et ça m'a enlevé un poids de vous en parler, même si ça va me peser, Loéline de te savoir un peu choquée de ta grande soeur. Bien sûre Ola que je répondrai à tes questions.
- Tu sais que je suis timide alors forcément là ça me fait très bizarre d'avoir appris que ma soeur est une grande professionnelle en tant que travailleuse du sexe, me répond ma soeur. Je dois juste digérer l'information, ça ne veut pas dire que tu n'es plus ma soeur ni que je ne t'aime plus, je t'estime beaucoup mais ça fait bizarre. Tu peux nous parler de ta cible, tu en as une actuellement ? Il est comment ?
- Il est merveilleux, lâchai-je sincère. Je commence à m'attacher à lui alors que je ne devrai pas, mais il est d'une sensibilité lorsque l'on apprend à le connaitre et je sens qu'il n'est pas très bien dans son couple ni avec lui même ce qui peut expliquer ses infidélités. J'ai envie de m'accrocher et de creuser, surtout qu'il est en train il me semble de tomber amoureux de moi. En plus c'est un dieu ce mec alors c'est loin d'être une corvée. Elles me l'ont choisi un peu plus vieux, il a trente-deux ans mais ça matche super bien, il y a de l'alchimie. Il s'appelle Valentin, c'est un grand investisseur dans la région. Il est vraiment beau, 1m80, des yeux verts à en faire tomber amoureuse plus d'une ! Des cheveux châtains clair, plutôt bien musclés de partout ! Une villa de luxe à Bormes les mimosas, un chalet à Megève et sa résidence principale se trouve à Charbonnières.
- Ah oui tu as tiré le gros lot, s'amuse Olariane. Et tu l'as déjà fait avec lui ?
- Pas qu'une fois, ris-je.
- Et il est bien membré ? continue t-elle.
- Si tu savais... dis-je mystérieuse.
Même ma soeur se met à rire avec nous, l'ambiance est plus chaleureuse, toutes les deux semblent même plus détendues que lors des révélations. Ça me fait un bien fou de ne plus me savoir seule, d'en avoir mis deux dans la confidences. La soirée est passée si vite, que je n'ai pas vu le temps passer.
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