Rentrée à l'appartement, Jennifer décida de se changer en s'habillant d’un pantalon noir à multiples poches et d'un sweat à capuche. Elle jeta un coup d'œil à l'horloge et réalisa qu'il était déjà seize heures passées. Elle sauta dans ses baskets, prête à rendre visite à Clara mais elle fut prise d'un doute. Elle manquait de temps pour passer voir Clara, puis se préparer pour la soirée de Gloria. Ses émotions se mélangeaient, car elle n'avait pas vu sa fille depuis quasiment trois semaines mais elle se résolut à aller à l'hôpital que le lendemain.

Elle ouvrit son placard. Elle se dit par devers elle que son mari ne pourrait jamais se plaindre que l’argent passait dans les toilettes coûteuses dernier cri. La plupart du temps, c’était sa fille alliée à sa sœur qui la traînaient dans les boutiques de prêt-à-porter. Dès qu’elle passait une robe, elle se sentait oppressée. Plus jeune, sa mère n’avait cessé de répéter que sa fille ne trouverait jamais un mari protecteur digne de ce nom en raison de ce manque de féminité. Elle n’en avait cure, pour elle, son entêtement à ne pas céder à cette injonction traduisait son esprit d’indépendance et elle en était fière. Tout ceci était réconfortant mais ne l’aidait pas dans son choix. Elle passa en revue son dressing, cintre après cintre. Pour chaque vêtement, elle trouvait une bonne raison de ne pas le retenir. Patrick entra dans la chambre tandis que Jennifer continuait d’observer son placard de son œil acéré. Il avait l’habitude des hésitations de son épouse dès qu’il était question de porter autre chose qu’une tenue pratique et passe-partout. Il essaya de l’encourager d’une voix la plus douce possible :

« Tu es en porte-à-faux avec ta penderie ?

— Avec mes fringues, tu veux dire ? Plus je les regarde, moins je sais ce que je vais choisir. »

Elle ajouta dans un soupir de découragement :

« Tu ne trouves pas ça dément, je vais dans les zones les plus dangereuses du monde. Parfois, sur le terrain, je dois réagir dans l’urgence. Et là, je suis pitoyable, je ne parviens pas à me décider. Je suis pathétique, non ? dit-elle, sur un ton plaintif.

— Bien sûr que non, ma Chérie. »

Patrick était peu à l’aise face aux effusions de sentiments et les cas de conscience psychologiques. Cependant Il s'agissait de sa femme, alors il se devait de la réconforter. Il entoura son visage de ses mains.

« Regarde-moi. Voilà ce qu’on va faire, je te montre ce que j’ai prévu de mettre. Tu me donnes ton avis. Puis, on voit ensemble comment on peut être assorti. Ça te va ? »

Jennifer hocha la tête en silence. Patrick ouvrit la partie gauche de la penderie, celle dévolue à sa garde-robe :

« Tiens, regarde. J’ai acheté ce smoking. Je l’agrémente d’un nœud papillon noir, d’une chemise blanche, indémodable. Ça fait un peu James Bond, époque Roger Moore. Qu’en dis-tu ?

— Que du haut de ton mètre quatre-vingt-dix-sept, le smoking te va à merveille. Un peu old school mais très élégant.

— Ok. Alors, voyons maintenant de ton côté.

— Promets-moi d’être indulgent.

— OK, j’ouvre mon côté d’armoire. Je mets une chemise ?

— Cette blouse à nœud se marie très bien à tes yeux verts. Tu pourrais ajouter ce pantalon tailleur noir avec ou sans ceinture pour te sentir à l’aise. J’ajouterai une pochette verte à la poche de mon smoking, ce qui finalisa sa tenue avec style. Tous deux se contemplèrent côte à côte dans le miroir avec un contentement non dissimulé.

« Ecoute, je crois que c’est parfait. Nous avons plus d’une heure pour nous habiller. Je propose d’appeler un taxi. A mon avis, il sera difficile de trouver une place pour se garer.

— C’est parfait. »

Tandis que Patrick s’apprêtait à téléphoner à la compagnie de taxis habituelle, Jennifer l’interpella.

« Patrick ? »

Il se retourna à moitié, haussant un sourcil interrogateur.

« Oui ?

— Merci… »