Chapitre 76 - La crise

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Pendant que Jodie préparait le repas, Clara s’amusait avec la Wii.

« Tu sais quoi, Jo ? Je vais demander à avoir une à l’hôpital. C’est vraiment marrant.

— C'est étonnant que tes parents n’y aient pas déjà pensé…. Ou au moins une DS…

— C’est la console portable ?

— C’est ça.

— Tu sais… Sincèrement mais des fois, je me dis que mes parents sont d’une autre planète. J’ai l’impression qu’ils ne se rendent pas bien compte de ce qu’est de vivre en cage. Tu ne les connais pas, mes parents… Non ?

— J’ai déjà rencontré ta mère, mais dire que je la connais, c’est un peu osé. Non, juste que Shany m’a raconté tellement de choses à propos de toi. Quand j’ai vu ta mère, je l’ai trouvée forte et géniale. Mais, je comprends avec ce que tu dis, que c’est juste la surface que je vois. »

Clara ne répondit pas. Jodie regarda dans sa direction. Le silence était éloquent.

« Je vais te faire une confidence, tu gardes ça pour toi ? Je me dis souvent que ma mère utilise son travail comme une excuse pour laisser Papa encaisser et gérer au quotidien. Et Papa… Je l’adore mais le plus souvent, il est lunaire. Tu ne sais jamais s’il est avec toi ou s’il plane à dix mille mètres. Alors… Je vais peut-être dire une énormité mais est-ce que chacun à leur manière, ils n’ont pas trouvé un moyen d’être là sans l’être ? »

Jodie frissonna un peu en entendant la confidence de Clara. Fallait-il qu’elle réponde par la négative aux interrogations de Clara au sujet de ses parents pour qu’elle les idéalise ou bien fallait-il lui dire qu’elle avait sûrement raison pour qu’elle les prenne un peu en pitié. Aucune des propositions ne lui semblait être la bonne. Comme souvent dans la vie., on cherche la bonne manière de faire, la bonne raison mais il n’y en a pas.

« Allez, à table, Marinette, fit Jodie tentant maladroitement de féminiser le nom du personnage de Nintendo.

— J’arrive. »

Et quelques instants plus tard, Clara était attablée.

« C’est quoi ? »

Jodie avait préparé une omelette toute simple avec un peu de lardons et de fromage, le tout accompagné d’une petite salade d’endives.

« C’est peut-être un peu léger pour toi… fit-elle en se rendant compte qu’elle cuisinait comme si elle le faisait pour elle-même et non pour une gamine de treize ans.

— Ça va aller… Faut jamais manger trop lourd le soir, il parait. Et puis, je n’ai pas une activité physique énorme pour mon âge, donc il ne faut pas trop que j’abuse sur la nourriture. En revanche pour les pâtisseries, je fais une exception ! »

Jodie regarda l’adolescente. Décidément presque à chaque instant, Clara lui rappelait qu’elle n’était plus une enfant, en tout cas, qu’elle n’était pas comme toutes les autres. Elles mangèrent en silence. En dessert, Jodie proposa deux boules de glace fruits rouges que Clara avala goulûment.

« Allez, jeune fille, on se brosse les dents et au lit. »

À ces mots, Clara arbora un regard étrange, surprise mais aussi heureuse, de cette petite phrase, certes ordinaire, mais qui lui faisait défaut.

Dix minutes plus tard, la jeune fille était couchée, les yeux fermés avec un sourire sur les lèvres. Jodie ferma la porte de la chambre tout en veillant à laisser une ouverture qui lui permette d’entendre ce qu’il se passait. Elle regarda la pendule. Il n’était que vingt-et-une heures. Le manque de sommeil des derniers jours commençaient à lui peser. Alors elle éteignit la lumière et alla se coucher dans le canapé.

*

Jodie sortit brutalement du sommeil léger dans lequel elle s’était plongée. Elle ne savait pas depuis combien de temps mais des bruits étranges provenaient de la chambre. Elle bondit hors du canapé et se précipita. Elle découvrit Clara qui visiblement manquait d’air et n’arrivait pas à parler. Malgré sa panique, Jodie prit le temps de redresser Clara et de la faire pencher vers l’avant, ce qui lui permit de tousser puis reprendre un peu d’air.

« J’appelle les secours. »

Jodie fila dans le salon pour attraper son mobile et composer le neuf cent onze.

*

Les secours mirent moins de dix minutes à prendre le relais d’une Jodie qui avait certes gardé son calme aux côtés de Clara mais n’en était pas moins intérieurement paniquée.

« Au Saint Luke’s Roosevelt Hospital… C’est là que vous devez l’emmener… »

Le secouriste ne comprit pas.

« Cela serait trop long de vous expliquer, mais c’est son hôpital. Elle est patiente là-bas normalement ! »

L’homme demanda alors à son collègue de la régulation de dérouter l’ambulance.

*

« Monica ! Monica ! »

Monica se retourna pour faire face à la collègue qui arrivait vers elle en courant.

« Qu’est-ce qu’il y a ?

— Il y a une urgence. Elle arrive dans quelques minutes.

— Oui et bon dieu, en quoi cela me concerne ?

— C’est la petite qui a disparu, la petite Cunningham. Elle a été prise en charge par les secours et ils se sont déroutés chez nous parce que la jeune femme qui l’accompagne leur a dit de venir ici. »

Monica cessa ce qu’elle était en train de faire et suivit sa collègue.

« C’est qui, cette jeune femme ? C’est sa mère ? C’est Shany ?

— Euh, attends, j’ai noté son nom quelque part… Jodie. Jodie Taylor.

— Bon dieu c’est qui celle-là ? C’est elle qui l’a enlevée ? Préviens la sécurité qu’ils viennent et qu’ils appellent la police. Elle ne va pas s’en tirer comme ça. »

Monica fouilla dans sa poche pour attraper son téléphone et rechercha dans son répertoire le numéro de Patrick Cunningham. Il lui avait confié, il y avait plusieurs années en cas d’urgence. Elle pianota sur le clavier.

« Venez dès que vous pouvez. On a retrouvé Clara. Urgent. »

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