Ras-le-bol de ce taf alimentaire !
Pitié, faites que ce calendrier mente et que je ne sois pas à la veille de la reprise... J'ai pas fini d'écrire, j'ai pas réussi à tenir mon planning pour mon roman, je ne vais jamais y arriver à ce rythme-là ! Déjà que mes deux premiers volumes ont du mal à percer, je veux finir ma trilogie, juste ça. C'est pas trop demander, si ? Que je puisse me dire que j'ai essayé. Que le peu de lecteurs que j'ai puissent découvrir la fin de cette histoire...
Raaaaah !!! C'est tellement frustrant ! Je suis tellement crevée par mon taf à la noix, que je déteste en plus, que j'ai dormi plus que je ne pensais juste pour rattraper mon quota de sommeil. Si j'étais pas aussi sympa au boulot aussi, à accepter les missions de dernière minute, à bosser parfois les week-ends ou à aider les collègues qui rament sur leurs dossiers. Parfois j'ai envie de tout envoyer valser, je vous jure, mais j'ai un loyer à payer, des factures qui tombent tous les mois et il faut bien que je nous nourrisse mon chat et moi.
Heureusement que je l'ai mon petit Také (oui je suis fan d'Ena L. et j'assume), sinon je crois que je péterai un plomb monumental et que je leur dirais à tous de se sortir les doigts, que je suis humaine et pas un foutu robot et que moi aussi j'ai besoin de repos ! Mais non, je garde la tête basse et je dis "amen" à tout... Une vraie lavette. Juste parce que j'ai eu du mal à trouver un travail alors je fais tout pour le garder. Et si j'avais envie d'autre chose ? Et si moi aussi je voulais devenir une Aly M. (toujours une ref à un bouquin d'Ena L. d'ailleurs Aly est la femme de Také...) et vendre mes bouquins ?
Bon, faut dire que dans "Not a fuckin' romance", Aly est bien entourée et a la chance d'avoir des amis, un frère et un mec en or massif qui l'aident à se montrer et à gagner confiance en elle (petite pub pour Ena L. sérieux, allez lire ses livres ! De vraies pépites !). J'ai même pas d'agent. Si j'accepte tout ce travail supplémentaire c'est parce que je m'auto-édite et que ça me coûte une blinde. J'ai parfois songé à vendre un organe au marché noir, mais c'est pas super légal à ce qu'il paraît. Alors je bosse, je trime, je me tue à jouer les secrétaires administratives. Là j'ai la chanson "Jour meilleur" d'Orelsan en tête et c'est un peu moi... J'ai rien à faire sauf avancer...
Bon, stop la déprime, si c'est mon dernier jour de congé, go aller boire un verre dans un bar et ensuite me prendre mes plats préférés au traiteur asiat du bas de la rue ! C'est toujours ça, faire quelque chose que j'aime. Peut-être que ça me donnera un peu d'inspiration pour continuer ce fichu Tome 3. Je crois qu'il y a un nouvel établissement qui a ouvert récemment, un univers geek avec des jeux de société et du rôle-play. Depuis le temps que j'ai pas fait de partie avec mes amis. Je ne suis même pas sûre qu'ils sachent que je vis encore... Et voilà, je culpabilise. Bon, je leur enverrai un message de groupe sur WhatsApp tout à l'heure. En attendant, faut que je m'habille et que je bouge mes fesses si je veux tenir mon programme !
J'aurais peut-être dû me couvrir un peu plus, il fait un peu frais aujourd'hui (sans blague, en plein mois de novembre, il fait "frais"...). Heureusement, le bar n'est pas loin, quelques centaines de mètres à peine. Et il y fait bien chaud.
Je repère un coin avec peu de monde, pas que je sois associale, c'est juste que je veux envoyer mon message en toute tranquillité, sans personne pour regarder par-dessus mon épaule. Et puis, j'ai pris mon PC portable avec, sait-on jamais, je pourrais avoir la chance d'aligner quelques mots pour ne pas me sentir aussi minable de n'avoir pas assez écrit cette semaine. Pour ça non plus j'ai pas envie qu'on regarde ce que je fais. Je suis fière de mon travail, mais ça me bloque quand on m'observe.
- Pardon mademoiselle.
- Vous êtes ?
- Stefan Wilson, désolé de vous déranger mais j'ai l'impression de vous connaître.
- Bizarre, je ne vous ai jamais vu et votre nom ne me dit rien.
- Je suis pourtant certain de vous avoir déjà vue quelque part.
- Si c'est une technique de drague, elle est nulle. Si ce n'en n'est pas une, je ne vois pas d'où on pourrait se connaître. Vous bossez en ville ?
- Je suis propriétaire d'une maison d'édition qui démarre. "La plume étoilée", je ne sais pas si vous connaissez...
- Si. J'y ai déposé mon manuscrit. Il a été rejeté. Enfin, j'en sais trop rien en fait, j'ai jamais eu de réponse. Du coup je me débrouille.
- Je... je suis désolé. Nous mettons un point d'honneur à lire tous les auteurs qui nous font parvenir leurs œuvres et à leur répondre le plus rapidement possible. Du coup, si vous me donnez votre nom et le titre de votre roman, je me ferais un plaisir de vous dire ce qu'il en est.
- Mais bien sûr. Comme si un éditeur se promenait par hasard dans le même bar que moi et m'abordait. Cela fait bien longtemps que je ne crois plus aux miracles ni aux bonnes fées.
- Voilà ma carte si vous ne me croyez pas.
- Oh bah flûte alors ! Vous êtes vraiment vous ?!
- Sans rire.
- Et ça vous fait marrer en plus.
- Je ne vais pas pleurer non plus. Alors ce nom ? Il faut que je vous le soutire autour d'un verre ?
- Et pourquoi pas ? Ce serait déjà plus convivial.
- J'arrive avec deux bières alors.
Alors là je suis scotchée. si c'est un rêve, qu'on ne me réveille pas ! Un éditeur qui m'offre un verre et il est canon en plus ! Grand, brun, un corps sculpté dans le marbre et moulé dans un pull à col roulé et un jean slim... Il revient, vaut mieux que je reste pro !
- Et une bière pour mademoiselle ?
- Lauren. Mais j'écris sous un patronyme. Lunara. Et mon roman, c'est une trilogie en fait. Je vous ai fait parvenir le Tome 1 : "Viens me retrouver".
- Donne-moi deux minutes, je check ça.
Ok donc on se tutoie maintenant ? Bon bah si on en est là... Je le laisse vérifier sur son Mac et là, il se tourne vers moi, l'air gêné.
- J'ai fait une boulette. J'étais en charge de la lecture de ce roman et il était tellement captivant que je l'ai laissé chez moi... Du coup, je suis assez intéressé pour que tu signes chez nous si ça te dit !
- Si ça me dit ? Mais carrément ! Tu penses que je peux en vivre ?
- D'ici un mois c'est un best-seller. T'as une suite ?
- J'en suis au Tome 3 là.
- Lâche ton taf, entre l'écriture et la promo t'auras plus le temps de rien !
C'est définitif, si je rêve, laissez-moi dans mon trip et ne me réveillez jamais ! Je vais pouvoir enfin démissionner ! Adieu boulot pourri !! C'est fou, d'un coup j'ai envie d'écrire et d'embrasser mon futur boss ! Note à moi-même, ne pas boire une goutte de plus...
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